Des messieurs en costumes sombres et porteurs de drapeaux étaient réunis ce matin en plein centre de Vernon, sur la Place de Gaulle.
L’endroit ne sert qu’une fois par an à la commémoration patriotique. D’habitude, les célébrations se passent plutôt dans les carrés militaires des cimetières, devant les monuments aux morts ou à la mairie. Mais il y a quelques années, chaque commune de France a reçu un exemplaire de l’appel du 18 juin du Général de Gaulle, et a été priée de l’afficher bien en vue.
Vernon avait une Place de Gaulle, place centrale où se tient le marché deux fois par semaine. Le lieu a paru tout indiqué. Le mémorial patriotique a pris place à côté de la boulangerie et du coiffeur, dans un des endroits les plus passagers de la ville. Certaines années, suivant les hasards du calendrier, les anciens combattants se retrouvent à quelques mètres des marchands de légumes, dans un irrévérencieux téléscopage du passé le plus glorieux et du présent le plus prosaïque. Mais cette année, le 18 juin tombe un dimanche et la place était libre.
Giverny n’a pas de place de Gaulle. S’il était besoin de donner des noms à de nouvelles rues, le village a bien assez de peintres à honorer. L’appel figure au mur de la mairie, où cette photo a été prise.
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A vérifier : il paraît que c’est Winston Churchill qui aurait déclaré qu’un pays capable d’offrir 325 variétés de fromages n’est pas un pays gouvernable. Moi, je croyais que c’était notre Général, et j’aimais bien l’idée d’un téléscopage matinal entre le Général et les fromages, et les victuailles en général. Aujourd’hui, c’était aussi la fête de tous les papas. Ceux que j’ai vus aujourd’hui n’étaient pas à la fête. D’ailleurs, la fête des pères a été instituée pour faire pendant à celle des mamans, instituée par un Maréchal cette fois-là. De toutes manières, Winston détestait Charles. Je crois que je vais me consoler avec un bon chèvre local.
Retournez à la mairie, et prenez le temps de bien regarder le texte de la plaque. Ce n’est pas l’appel du 18 juin, dont voici le texte correct :
Les chefs qui, depuis de nombreuses années, sont à la tête des armées françaises, ont formé un gouvernement.
Ce gouvernement, alléguant la défaite de nos armées, s’est mis en rapport avec l’ennemi pour cesser le combat.
Certes, nous avons été, nous sommes, submergés par la force mécanique, terrestre et aérienne, de l’ennemi.
Infiniment plus que leur nombre, ce sont les chars, les avions, la tactique des Allemands qui nous font reculer. Ce sont les chars, les avions, la tactique des Allemands qui ont surpris nos chefs au point de les amener là où ils en sont aujourd’hui.
Mais le dernier mot est-il dit ? L’espérance doit-elle disparaître ? La défaite est-elle définitive ?
Non ! Croyez-moi, moi qui vous parle en connaissance de cause et vous dis que rien n’est perdu pour la France. Les mêmes moyens qui nous ont vaincus peuvent faire venir un jour la victoire.
Car la France n’est pas seule ! Elle n’est pas seule ! Elle n’est pas seule ! Elle a un vaste Empire derrière elle. Elle peut faire bloc avec l’Empire britannique qui tient la mer et continue la lutte. Elle peut, comme l’Angleterre, utiliser sans limites l’immense industrie des Etats-Unis.
Cette guerre n’est pas limitée au territoire malheureux de notre pays. Cette guerre n’est pas tranchée par la bataille de France. Cette guerre est une guerre mondiale. Toutes les fautes, tous les retards, toutes les souffrances, n’empêchent pas qu’il y a, dans l’univers, tous les moyens nécessaires pour écraser un jour nos ennemis. Foudroyés aujourd’hui par la force mécanique, nous pourrons vaincre dans l’avenir par une force mécanique supérieure. Le destin du monde est là.
Moi, Général de Gaulle, actuellement à Londres, j’invite les officiers et les soldats français qui se trouvent en territoire britannique ou qui viendraient à s’y trouver, avec leurs armes ou sans leurs armes, j’invite les ingénieurs et les ouvriers spécialistes des industries d’armement qui se trouvent en territoire britannique ou qui viendraient à s’y trouver, à se mettre en rapport avec moi.
Quoi qu’il arrive, la flamme de la résistance française ne doit pas s’éteindre et ne s’éteindra pas.
Demain, comme aujourd’hui, je parlerai à la Radio de Londres.
De qui se moquent ceux qui ont conçu cette plaque ?