Voisin du musée des Antiquités, le muséum de Rouen se trouve au 198 rue Beauvoisine, à quelques minutes à pied de la gare.
Le muséum de Rouen a rouvert en 2007 après une fermeture de onze ans.
On pouvait craindre une mutation violente, une modernisation brutale de la muséographie. Il n’en est rien. Le muséum a gardé tout son charme rétro, ses vitrines du 19ème siècle en verre soufflé, ses beaux planchers sonores, et une ambiance inimitable qui fait basculer une bonne centaine d’années en arrière.
C’est un endroit où l’on se trouve assailli, d’émotions, d’interrogations, et en tout premier lieu assailli par les collections.
Rouen possède le deuxième plus grand muséum de France après Paris. 800 000 pièces sont conservées, dont la moitié est présentée au public.
Le curieux déambule donc au milieu de 400 000 spécimens de toutes sortes, et il comprend vite qu’il doit renoncer à tout voir.
La nature tout entière a rendez-vous dans cet ancien couvent. Autant dire que la Création est un peu tassée, genre arche de Noé. Tassée, mais organisée.
L’idée qui domine est celle de rangement. Les savants d’hier ont aimé classer, comparer, ordonner. Sans perdre un centimètre carré s’alignent les uns à côté des autres des restes de ce qui fut de la vie dans son extraordinaire diversité, étiquetée, nommée, codifiée.
La présence d’autant de signes de mort, animaux empaillés, insectes épinglés, squelettes, conserves en bocaux de vers ou de grenouilles, a quelque chose qui met indubitablement mal à l’aise. On n’aimerait pas se trouver enfermé là à la nuit tombée. On hésite à s’approcher des vitrines les plus dérangeantes. On sent, au tréfonds de soi, un instinct de fuite. Il faut se rappeler que le danger est nul, le simple contact impossible. Habitué à toutes les images, on frémit devant le réel.
Et en même temps, quelle fascination s’exerce ici ! La variété du vivant, la fameuse biodiversité vous saute à la figure comme jamais. Même les mammifères, les grosses bêtes poilues qu’on s’imagine bien connaître, réservent des surprises. Bête jamais vue nulle part, coup d’oeil au cartel, jamais entendu ce nom-là… L’expérience se répète à l’infini, on finit par renoncer à lire les étiquettes.
Il y a pourtant eu des gens pour qui les noms des végétaux ou des animaux étaient de la plus grande importance, des hommes qui ont écrit ces légendes d’une belle écriture soignée, quand on trempait les plumes dans les encriers. On les sent présents partout, ces savants d’hier, auteurs de cette accumulation, de cette prédation peut-être, on sent leur passion, leur patience… Ces milliers d’heures passées à tout mettre en case, au propre et au figuré, rendraient presque palpable la fuite du temps.
C’était une façon de s’approprier le monde, cette obstination à explorer chacun de ses recoins et à nommer tout ce qui s’y trouve de vivant ou d’inerte.
Ce bel article a été référencé sur trivago, site de voyageurs. Dans l’espoir de t’y retrouver pour que tu faces partager tes superbes expériences 🙂
Jolie trouvaille que faire se rimer "encrier"° et le part.passé de soigner.
En effet, ce museum ne nous fait pas tant rencontrer des animaux que remonter le temps…des sociétés savantes.
° Encrier: cet objet si usité, antan, aujourd’hui à lui seul fleure le bon vieux temps. Entre deux murs d’immeuble à Rouen en ais-je trouvé un en bois tout vermoulu et à la facture très fruste. Seuls trois trous en travers de son rebord supérieur m’ont fait comprendre que c’était là logement à plume et donc usage de ce "gobelet". Usage d’écolier de faubourg plutôt que de savant de société lettrée.
Les objets les plus simples sont souvent les plus évocateurs.