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Miracles à profusion

Cénotaphe de Saint Mauxe en forêt de Bizy à VernonCi-contre, cénotaphe de Saint Mauxe en forêt de Bizy à Vernon

On a beaucoup vénéré Saint Mauxe – alias Saint Maxime – à Vernon. Depuis le 10ème siècle le trésor de la collégiale Notre-Dame renfermait des reliques de l’évêque qui vécut en Provence au 5ème siècle.
Un bon millénaire plus tard, en 1635, le curé de Vernon a jugé utile de rédiger un petit livre sur la vie de ce saint et ses nombreux miracles.
Je ne sais pas si vous croyez aux miracles. Pour l’abbé Théroude les sources antérieures sur lesquelles il s’appuie pour son récit sont paroles d’évangile. Les résurrections et les guérisons miraculeuses foisonnent, ce qui ne surprend guère : on s’attend à la fin merveilleuse, hagiographie oblige.
Ce qui arrête davantage l’attention, en revanche, c’est l’incroyable collection de faits divers qui se trouvent évoqués par ricochet, puisqu’il faut bien qu’un malheur se produise d’abord pour que le saint puisse intervenir. Des morts accidentelles et des blessures comme on n’en fait plus, racontées dans la belle langue imagée du 17ème siècle : on plonge dans le quotidien de nos ancêtres.

Dans la ville de Vernon un petit enfant aagé d’environ d’un an, avoit mis dedans sa bouche une balle de plomb qui luy estoit demeuree dans le gosier à cause de la petitesse des conduits, ce qui luy empeschoit la liberté de la respiration, tellement qu’il ne pouvoit plus vivre : une couleur tristement plombee luy couvroit tout le visage. (…)

Un autre enfant (…) celuy-cy plus aagé que l’autre, se jouant sur une muraille, fut accablé de la ruine & cheute d’icelle. Les voisins au bruit de cet accident accoururent pour le garantir de ce malheur, mais voyans que la mort triomphoit de sa vie, & que les remèdes humains leurs manquoient, ils jetterent leur souvenir & esperance sur sainct Maxe avec un heureux succez. (…)

Dans le territoire de Vernon, un manoeuvre entretenoit sa petite famille de son travail journalier. Un certain jour comme il transportoit des plastrats & ordures d’un vieil bastiment, une muraille tomba sur luy. (…)

La roüe d’une charette traisnee par des chevaux fascheux avoit fort blessé un pauvre homme (…).

Un jour de Dimanche, lors que tout le peuple de Vernon estoit dans les exercices de la piété pour honorer Dieu & le servir comme il est ordonné, un certain homme de bas lieu nommé Barthelemy, blutoit de la farine par mespris & par avarice (…) : ayant esté rudement frappé par deux fois, sans sçavoir par qui, il espandit une telle quantité de sang par le nez, qu’il ne fut pas possible aux voisins, qui estoient accourus à son secours, d’arrester ce flux.(…)

(Les Cahiers Vernonnais N°26, Vie de Saint Mauxe par l’abbé Théroude.)

Pour tous ces cas, l’invocation de Saint Mauxe a fait merveille. Mais il ne faudrait pas en conclure qu’on peut déranger le saint pour un oui ou pour un non. Le plus sage est de vous garder des balles égarées, de ne pas vous jouer sur des murailles ni vous approcher d’un vieil bastiment. Ne blutez pas de farine en douce à l’heure de la messe. Et surtout, surtout, évitez les chevaux fascheux.


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