Photo : Evocation du débarquement canadien à Juno Beach, Calvados
C’est réconfortant, les collègues, surtout quand ils vous confortent dans votre opinion. Hier j’ai été témoin d’un débat entre spécialistes du Débarquement, des guides qui arpentent les plages de Normandie à longueur de saisons avec tous les publics, y compris des vétérans. Ce n’est pas mon cas, je me suis donc bien gardée d’apporter ni grain de sel ni grain de sable, et j’espère ne pas trop déformer leur propos.
La question soulevée était celle des volontaires canadiens. L’usage des guides, racontait ma collègue, est de dire que cette armée d’un million d’hommes était composée exclusivement de volontaires. Mais, poursuivait-elle, pour être précis il faudrait ajouter que c’était vrai au début de la guerre mais pas à la fin, sur le sol normand mais pas aux Pays-Bas, etc. La formulation exacte se résume donc à celle-ci, les soldats canadiens qui ont débarqué en Normandie en juin 44 étaient tous volontaires.
La suite du débat a tourné autour de l’inutilité d’entrer dans ce genre de détails. Là-dessus nous étions tous d’accord. Veiller à la façon de dire les choses pour qu’elles soient exactes, c’est bien, mais l’excès d’exactitude est contre-productif. La rigueur absolue n’est pas ce qui intéresse les auditeurs, elle est au détriment de la clarté. Les enseignants partagent certainement cet avis.
On a beau être d’accord là-dessus, ça nous chiffonne quand même d’affirmer, jour après jour, des choses qui ne sont pas tout à fait vraies. Prenez l’âge de Monet à son arrivée à Giverny, par exemple. Il est né en 1840, il arrive en 1883, il décède en 1926. Vu comme ça, Monet a 43 ans quand il emménage à Giverny, et il y passe 43 ans, donc pile la deuxième moitié de sa vie pour mourir à 86 ans. C’est clair, efficace, juste un peu trop beau pour être absolument vrai. Car Monet est né le 14 novembre 1840, donc à la fin de l’année. Quand il s’installe à Giverny en avril 1883, il n’a que 42 ans, même pas et demi.
C’est bien ennuyeux tout ça. Car avouez qu’on s’en moque, de ce détail, c’est d’un ennui total.
Comment s’en sortir ? Selon les cas, les publics, l’humeur, je dis que Monet était dans sa 43ème année, ou j’affirme comme la plupart de mes collègues qu’il avait 43 ans, en lui demandant mentalement pardon. Il m’est arrivé aussi plus d’une fois de m’apercevoir à la fin de la visite que j’avais carrément oublié de parler de la durée si longue de son séjour à Giverny… Oups ! Ca, ce n’est pas un détail.
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