Sur un bateau, deux hommes. L’un se penche vers le chargement, dans un beau geste ample et rond qui paraît poursuivre la coque. L’autre, vêtu d’une longue blouse bleue, grimpe à une échelle. Il a jeté un sac sur son épaule.
Dans le panneau voisin, deux autres hommes ploient sous le fardeau qu’ils portent eux aussi sur les épaules. On comprend que les quatre personnages sont occupés à décharger le bateau qui vient d’accoster. Au Moyen Âge cette tâche harassante était volontiers confiée à des manoeuvres de passage, des trimardeurs, d’où le nom du vitrail, « Les Trimardeurs du port ». Il fait partie des collections du musée des Antiquités de Rouen.
Ces deux panneaux de soixante centimètres de côté environ sont des détails d’une verrière plus grande, perdue semble-t-il, réalisée pour la cathédrale de Rouen vers 1220-1230. Le verre bleu qui présente des stries et une épaisseur plus renflée appelée boudine est caractéristique.
Il s’agit probablement de la signature de donation d’une verrière offerte par la corporation des marchands de blé de la ville. Les professionnels avaient l’habitude de se cotiser pour financer des ornements pour les églises. Pour que le Bon Dieu et les générations présentes et futures n’oublient pas leur geste généreux, les donateurs étaient souvent figurés en petit en bas du vitrail, de la statue ou de la fresque.
Les marchands de blé formaient une corporation puissante à Rouen. La ville est située sur la Seine à 120 kilomètres de la Manche, et c’est depuis l’époque antique un grand port fluvio-marin. Les céréales récoltées en Normandie et en Picardie convergent encore aujourd’hui vers Rouen pour en faire le premier port céréalier d’Europe, et le numéro un au monde pour le blé.
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