Au milieu des iris de Sibérie jaunes, pointent les boutons de pivoines qui fleuriront plus tard. Le temps que les boutons se gonflent de pétales en devenir, puis s’ouvrent pour les déployer, les iris seront fanés et coupés. A cet emplacement, on ne verra plus que les corolles à froufrous des pivoines.
La gestion des époques de floraison est l’un des casse-tête de tout jardinier. Le premier objectif est d’obtenir un jardin fleuri tout au long de la saison, où les fleurs se succèdent sans temps mort.
En principe, les fleurs ont une période de floraison qu’elles préfèrent. A Giverny, pour les iris, disons que c’est la deuxième quinzaine de mai.
Mais chez les fleurs, le temps qui passe est aussi fonction du temps qu’il fait. Pour peu que la météo soit capricieuse, les règles habituelles sont chamboulées. La chaleur printanière fait tourner les pendules plus vite, le froid les ralentit.
Cette année, le printemps très frais a décalé le démarrage des vagues successives de fleurs, comme si l’officiant en charge de donner le top départ s’était trop attardé au bistrot.
Mais la fraîcheur a aussi prolongé la durée de floraison des tulipes, ce qui a permis d’en profiter plus longtemps. Au lieu de se croire en course pour le tiercé, elles sont parties au petit trot.
Le froid est embêtant car les fleurs tardent à venir, mais c’est surtout la chaleur au printemps qui sème la pagaille. Vite ! se disent les fleurs, ça sent l’été ! Dépêchons-nous avant qu’il ne soit trop tard ! Elles se précipitent, elles se bousculent, et elles fleurissent toutes en même temps. Le jardinier a le sentiment d’avoir grillé toutes ses cartouches en quelques jours.
La question se complique encore quand, comme à Giverny, on veut gérer non seulement la succession des floraisons, mais aussi leur concomitance. Il s’agit de faire fleurir en même temps des fleurs pensées pour aller ensemble, parce qu’elles ont des coloris voisins ou contrastants, des formes qui se répondent. Pour cela il faut bien connaître les habitudes de chacune, leurs possibles réactions face aux aléas du climat. Les pronostics se font sur le papier longtemps à l’avance, et se vérifient sur le terrain l’année suivante.
Qu’elles lambinent ou qu’elles foncent, il y a tout de même une constante : les fleurs ne se doublent pas dans les virages. Eventuellement, les tardives peuvent (presque) rattraper les précoces, mais elles ne leur passent pas devant. Pour savoir dans quel ordre elles vont se présenter sur la ligne d’arrivée, c’est un avantage indéniable du jardinier sur le turfiste.
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C’était la fête des iris en Drôme provençale, j’en ai vu de toutes les couleurs. Mais dans le Var, leur saison était déjà terminée. Que les floraisons dérangent un peu les plans des jardiniers, ce n’est pas plus mal, un peu d’imprévu ne nuit pas 😉
Ah ! Les iris de Provence ! Le catalogue du producteur du même nom me fait rêver chaque année !