
Claude Monet avait, selon ses contemporains, un charisme naturel qui s’imposait à tous, même aux animaux. C’est ainsi qu’en 1889, lors de son séjour à Fresselines, dans la Creuse, il s’est mis dans la poche les chiens de son ami Maurice Rollinat.
Les seuls êtres qui font ma société tout le jour sont, outre mon jeune porteur, deux superbes chiens de Rollinat ; ils m’ont pris en amitié. Le matin ils arrivent à l’auberge, grattent à ma porte et ne me quittent pas une minute ; je suis donc bien gardé et personne ne peut s’approcher de moi quand je travaille.
Lettre de Claude Monet à Alice Hoschedé, Fresselines, 21 mars 1889
Le peintre dînait tous les soirs chez le poète, grand ami des animaux. L’un de ses chiens se nommait Pistolet. Pourquoi ce nom ? Rollinat s’en est expliqué en vers :
Souple et fort – jappant sec et plutôt taciturne,
Ce chien d’acier répond au nom de Pistolet :
Et certe ! il en vaut un par sa garde nocturne !
Au moindre craquement de porte et de volet
II s’arme ! et, si quelqu’un pénétrait dans la salle
Il ne ferait qu’un bond, soudain comme une balle.
Selon Gustave Geffroy, ami et biographe de Monet, qui lui a fait connaître Fresselines et Rollinat,
Pistolet, qui avait adopté Monet, (…) ne le quittait pas un instant, le suivant au « motif », restant auprès de lui à la fois pour le protéger, le défendre, et lui tenir compagnie, le reconduisant chaque soir à l’auberge, et revenant chaque matin, à l’heure dite, se coucher sur le paillasson en attendant son nouvel ami.
Gustave Geffroy, Claude Monet, sa vie, son oeuvre, 1924
Après le départ de Monet, son souvenir est resté longtemps dans la mémoire du chien Pistolet.
(…) Nous vous regrettons tous, et Pistolet aussi, je vous le promets. On n’a qu’à lui dire : « Ah ! voilà Monsieur Monet ! » pour qu’aussitôt il se mette à piaffer, tourniquer, sauter, le tout entremêlé de moucheries et d’aboiements moitié plaintifs, moitié joyeux ; il court aux portes, renifle l’air du chemin que vous aviez l’habitude de prendre avec lui, et fait encore maintes fois de fréquentes perquisitions dans l’escalier de la mère Baronnet.
Lettre de Maurice Rollinat à Claude Monet, Fresselines, 25 mai 1889
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