
Immensément connu pour Cyrano de Bergerac, Edmond Rostand s’était fait construire une villa à son goût au pays basque, sur une colline proche de la petite station thermale de Cambo-les-Bains. Il avait découvert l’endroit grâce à son médecin qui lui avait conseillé d’y faire une cure pour soigner sa pleurésie.
La maison a été achevée en 1906. Rostand y goûtait le calme, loin de l’agitation parisienne. Sa femme Rosemonde Gérard était moins emballée par cet « exil » à la campagne, même dans une prison dorée.

A la différence du Giverny de Monet, où l’artiste s’installe dans une maison existante, la villa Arnaga a été entièrement conçue par l’homme de lettres. Elle compte pas moins de 40 pièces : les quatre membres de la famille ne devaient pas se marcher sur les pieds. On y sent partout le goût du théâtre, le sens du décor. Si Giverny est la maison d’un peintre, colorée mais rurale et simple, Arnaga est celle d’un dramaturge amoureux du luxe, des belles matières, d’un raffinement extrême. Eblouissant.

Les jardins qui s’étendent devant la maison ne sont pas en reste. Rostand les a voulus à la française, aussi rythmés que ses alexandrins. Ils ont une façon de s’intégrer dans le paysage de montagne qui ravit l’oeil. Les bordures, constituées de massifs fleuris plutôt que de petits buis, apportent beaucoup de couleur. C’est Rosemonde qui, pour faire plaisir à Edmond, avait sélectionné une quantité énorme de végétaux à Paris à l’exposition d’horticulture, conseillée par Georges Truffaut. Il se trouve que Truffaut était également ami avec Monet, familier de Giverny et fournisseur du peintre.
Je ne sais pas si Monet aimait le théâtre d’Edmond Rostand. Aucune de ses pièces ne figure dans la bibliothèque du peintre. Mais il est possible que ce dernier les ait vues à Paris et n’en ait pas acheté l’édition papier, ou encore qu’elles aient disparu de ses rayonnages pour une raison ou pour une autre, données, prêtées, emportées… De même que je n’ai pas trouvé trace d’une éventuelle rencontre entre les deux hommes.