Les villes sont plus bavardes que les villages. En ville, le regard est happé partout par de l’écrit, des noms de commerces, des affiches de spectacles, des pubs, de la signalétique… Mais à la campagne on chemine entre des murs beaucoup moins loquaces. Étonné de ce silence, le citadin lève le nez vers les plaques de rue. Derrière leur indication brève il entrevoit des usages immémoriaux, il pénètre un tout petit peu dans cet univers rural qui se dérobe derrière les murs de pierre des jardins.
Sente proprette, dit cette plaque du village de Chérence. Le simple nom déjà réjouit le promeneur. Qu’a donc cette ruelle de si charmant, de si particulier qui lui a valu d’être distinguée de la sorte ? En plus du plaisir qu’on éprouve à emprunter les voies étroites où les voitures n’ont pas accès, on sent comme une invitation dans ce côté pimpant mis en avant.
A la campagne il n’était guère besoin d’indiquer le nom des rues aux carrefours. Tout le monde savait bien où se trouvait la rue de l’église ou celle du lavoir. Mais aujourd’hui cet usage a gagné les endroits les plus reculés. Et les édiles se trouvent confrontés au problème du choix de l’aspect des plaques de rues.
La solution la plus simple, c’est d’opter pour le modèle à fond bleu et caractères blancs si courant en France. Mais on peut aussi jouer la carte de l’originalité.
A Chérence, un village d’Ile de France au caractère préservé qui se trouve à une dizaine de kilomètres de Giverny, la municipalité a porté son choix vers un modèle moins courant. Le fond évoque un parchemin déroulé. Le nom de la rue est inscrit en brun foncé dans une police de caractères qui rappelle le gothique.
Je ne sais pas ce que vous en pensez. Bien sûr on peut discuter le style parchemin – qui aurait eu l’idée d’écrire le nom d’une rue sur un parchemin et de l’accrocher à une façade ? – et l’usage du gothique, tout en se réjouissant qu’il ait perdu sa connotation germanique et ne rappelle plus les heures noires de l’Occupation. Mais au moins le message est clair, retour vers le Moyen-Âge, dans une volonté de s’accorder à l’âge des maisons.
Personnellement je trouve cela plutôt coquet. Propret.
Commentaires récents