Berthe Morisot, Psychée, 1876, Musée Thyssen Bornemisza de Madrid
Les impressionnistes n’étaient pas tous des hommes. Au moins quatre femmes contemporaines de Monet et Renoir ont fait partie de la même avant-garde, manifestant un immense talent et un grand sens de l’innovation. Ces grandes dames sont Berthe Morisot, Mary Cassatt, Eva Gonzalès, Marie Bracquemond.
Plus je découvre leur oeuvre, plus je suis émerveillée. Tenue par une main féminine, la brosse impressionniste se pare d’une grâce inégalée. Les toiles de Berthe Morisot irradient, avec une économie de moyens qui laisse bouche bée. Pourquoi ces femmes impressionnistes ne sont-elles pas plus connues ? L’avenir finira-t-il par rendre justice à ces immenses artistes qui vivaient dans un monde où la gent féminine était reléguée au second plan ?
Nos voisins allemands paraissent intéressés par la place des femmes dans l’impressionnisme. Après l’exposition de Brême (2006) qui s’intéressait à Camille, épouse et modèle de Claude Monet, c’est le musée Schirn de Francfort qui, en 2008, a mis en avant les femmes peintres, avec une exposition entièrement consacrée à mesdames Cassatt, Morisot, Gonzalès et Bracquemond qui est partie ensuite à San Francisco. Au passage, le Schirn a forgé un féminin à impressionnistes : ‘Impressionistinnen’, bien joli en allemand où l’on n’a pas peur des mots qui sont longs, mais impossible à transposer en français ni en anglais.
Il fallait une sacrée détermination pour oser, à la fin du 19e siècle, braver tous les interdits inhérents à la condition féminine pour devenir peintre. Et le soutien d’un milieu familial artistique n’était pas gagné d’avance.
Si les choses ne semblent pas avoir été trop difficiles pour l’Américaine Mary Cassatt, amie de Degas, qui a fait de longs séjours en Europe, il n’en a pas été de même pour Marie Bracquemond. Son époux le graveur Félix Bracquemond, moins doué qu’elle, n’a cessé de la railler, si bien qu’elle a fini par dire adieu à la peinture. Avec nos yeux du 21e siècle, on aurait préféré que ce soit à lui qu’elle dise adieu.
Berthe Morisot quant à elle intègre le clan Manet en épousant Eugène, le frère d’Edouard. Cette fois c’est Eugène, qui peignait lui aussi, qui va renoncer à son art, écrasé par les deux génies qui l’entouraient. Edma Morisot, la soeur de Berthe, abandonne elle-aussi la peinture après s’être mariée. On dirait qu’une bizarre compétition s’installe dans les familles, comme lorsque deux arbres plantés trop près se font de l’ombre.
On ne sait pas trop comment le mari d’Eva Gonzalès, le peintre Henri Guérard, considérait le travail de sa femme. La mort prématurée d’Eva à 34 ans a coupé court à toute compétition.
Chez Mary Cassatt, c’est la maladie qui a mis un terme à une longue et fructueuse carrière. Dépression, diabète, et surtout la perte de la vue lui font lâcher les pinceaux. De quatre ans plus jeune que Monet, elle est atteinte de la cataracte à peu près en même temps que lui : elle est aveugle en 1921, il se fait opérer en 1923. Ils vont mourir tous deux en 1926 à quelques mois d’écart, elle dans le noir, lui avec la vue recouvrée.
Pour ceux qui lisent l’allemand, un intéressant article du Stern sur l’expo de Francfort.
Berthe Morisot est une impressionniste de premier plan, heureusement des rétrospectives l’ont mise à l’honneur ces dernières années. J’ai déjà eu l’occasion de voir des toiles de Mary Cassatt et d’Eva Gonzalès, mais je ne sais presque rien de Marie Bracquemond, je vais faire des recherches en ligne. Et d’abord découvrir tes liens.
Oh, mon commentaire semble égaré dans les spams, tu l’y retrouveras peut-être ?
Le plus intéressant c’est l’article du Stern sur l’expo de Francfort pour ceux qui lisent l’allemand. Je rajoute le lien dans le texte.
On peut voir des toiles des 3 premières, en ce moment, au Musée Marmottan, avec l’exposition "Les impressionnistes en privé". A bientôt Ariane