C’est une expérience rare que de regarder le feuillage d’un érable du Japon par en-dessous. Le plus souvent, quand nous croisons un acer palmatum, il est en pot à la jardinerie, et si nous le plantons au jardin, il mettra un temps infini à pousser, comme si on avait l’éternité devant soi.
Savourons donc le privilège, à Giverny, de rencontrer un érable vénérable, en provenance directe du pays du soleil levant, qui a si bien l’art de fabriquer des centenaires. Et c’est au soleil levant, ou levé mais pas encore trop haut, qu’il faut le voir, quand les rayons lumineux encore doux font jouer les couleurs de son feuillage dentelé.
C’est fin, c’est délicat, d’un raffinement tout asiatique.
Dès le printemps, au milieu des jeunes feuilles, on voit déjà les samares, toutes petites, d’un rose tendre, des miniatures de graines ailées qui promettent l’automne.
Les visiteurs s’arrêtent invariablement. L’un après l’autre ils se prennent en photo sous l’arbre, la main posée sur le tronc de l’érable, aussi patiné par ce contact répété que les mains d’Aristide Briand.
Merci pour cette expérience rare. Un souvenir d’acer palmatum… Celui que l’on m’avait assuré capable de bien vivre en pot sur une terrasse revenait bien au printemps, jusqu’à ce qu’un soleil trop brûlant lui grillât ses feuilles, définitivement.