On aurait aimé qu’ils se soient rencontrés, ces deux géants-là. Mais il semble bien que non. La vie de Claude Monet et celle de Marcel Proust sont somme toute bien documentées, et même s’il est toujours possible d’imaginer une entrevue fortuite qui aurait échappé au passage à la postérité, elle reste improbable.
Je n’ai pas trouvé trace, non plus, que Monet ait lu Proust. L’auteur d’ A la Recherche du temps perdu devient célèbre en 1919 avec l’attribution du prix Goncourt pour A l’ombre des Jeunes filles en fleurs. A cette date, la vue de Monet est fortement diminuée par la cataracte. Pouvait-il encore lire ? Se faisait-il lire des livres ?
On sait en revanche que Proust admirait beaucoup les Monet qu’il a pu voir, notamment « Champ de Tulipes près de Harlem ». Le personnage du peintre Elstir, qui apparaît dans la Recherche, a sans doute quelque chose de Monet, même si on peut y lire une anagramme de Whistler.
La rencontre n’a pas eu lieu, et pourtant que de convergences dans les oeuvres de Marcel Proust et Claude Monet… Une étude de Michael Magner (membre de la Marcel Proust Gesellschaft, association des amis de Proust de langue allemande) souligne ces points communs.
Le plus évident est territorial, c’est ce balancement entre Paris et la Normandie, l’attraction pour les côtes de la Manche aussi bien chez Proust que chez Monet, et qui s’exprime dans leurs visions de la Gare Saint-Lazare, point de départ parisien des trains pour la Normandie.
L’évocation de la nature chez Proust présente plus d’un parallèle avec l’oeuvre de Monet : longues descriptions de nénuphars flottant sur l’eau, de lilas en fleur, d’orchidées, de falaises… On pourrait multiplier les exemples.
Au-delà de ces aspects quasi matériels, Magner note des affinités plus profondes. Avec son regard aigu, son infinie analyse de tout ce qui se présente à sa pensée, Proust décrit en mots des phénomènes que Monet exprime en peinture. L’aspect impressionniste du style de Proust a frappé ses lecteurs depuis longtemps – il existe dès 1930 des études sur ce sujet.
Bonsoir, c’est toujours un plaisir de prendre des nouvelles de Ma Normandie sur votre blog.
Lovely picture.
Le peintre Elstir (de La Recherche), n’est-ce pas Monet, quelque part ? (Notamment la troisième partie d’A l’ombre des jeunes filles en fleurs : "Ne pas exposer les choses telles qu’il savait qu’elles étaient mais selon ces illusions optiques dont notre vision première est faite")
C’est toujours un plaisir d’apprendre quelque chose sur Marcel Proust. Merci à vous.
Buena tarde , desearía saber el nombre de esta pintura 🙂 gracias 🙂
Se llama « le Printemps », de Claude Monet, 1886, Cambridge.
Dès les premières lignes d’A la recherche du temps perdu, je me disais que si Proust n’avait pas été écrivain, il aurait été peintre, à la p163/164 (col.nrf) les nymphéas de Monet apparaissent dans le texte ! C’est en recherchant le lien qu’ils auraient pu avoir que je trouve votre article, merci pour ce travail.
Merci Laurence ! Oui, ils ont une démarche assez proche, c’est étonnant.