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Claude Monet vu par Fosca

Claude Monet vu par Fosca

La mort de Claude Monet en décembre 1926 a donné lieu à de nombreuses publications, que ce soient des articles nécrologiques, des recueils de souvenirs ou des essais. Dans celui-ci, publié en 1927, François Fosca (pseudonyme de Georges de Traz), romancier et critique d’art, tire une sorte de bilan de l’art et de la carrière de Claude Monet.

Un entrefilet de l’Excelsior avait attiré mon attention sur ce titre, car la famille de Monet (Michel et Blanche, probablement) avait réclamé l’interdiction de l’ouvrage, le jugeant diffamatoire.

Je l’ai lu et je ne crois pas qu’il le soit. L’auteur reste dans les limites de la critique, me semble-t-il. Peu flatteur, certes, même s’il lui échappe de temps en temps des louanges sur la virtuosité de l’artiste. Pour faire court, Fosca est à cent pour cent d’accord avec la boutade de Cézanne, sur laquelle il conclut : « Monet, ce n’est qu’un oeil, mais bon Dieu quel oeil ! »

Mais lu avec le recul de l’histoire, son manque de discernement prend des allures d’autant plus comiques que l’auteur se veut tranchant et définitif. Cette phrase, par exemple :

Il est peut-être encore trop tôt pour se rendre compte de la place exacte que tiendra Monet dans l’art du dix-neuvième siècle. Je crois pourtant qu’il sera considéré comme un beau peintre, et comme un libérateur, plutôt que comme un grand artiste. (…) Mais l’importance d’un libérateur, considérable au moment même, diminue à mesure que les conquêtes sont accomplies.

Et cette autre :

Aujourd’hui, nous ne pouvons lire sans un certain étonnement, les commentaires enthousiastes que suscitèrent les expositions de Monet, que ces commentaires soient signés de Théodore Duret, de Georges Lecomte, ou de Gustave Geffroy. Comme beaucoup de leurs contemporains, ils étaient persuadés que Monet avait conquis à l’art des territoires nouveaux.

Ce sont plutôt les réserves de Fosca que nous ne lisons pas sans un certain étonnement. A sa décharge, il ne pouvait, en 1927, se douter de la fécondité de l’oeuvre de Monet, de ses répercussions infinies dans l’art du XXe siècle et au-delà. Dans son dernier chapitre, il imagine son « musée idéal » où les tableaux de ses contemporains seraient placés par affinités près des maîtres du passé, Delacroix près de Tintoret, Manet entre un Caravage et un Velasquez, Renoir entre un Rubens et un Fragonard, etc. « Mais une Cathédrale de Rouen de Monet, ou une Débâcle, ou un panneau de la série des Nymphéas, auprès de quelles oeuvres les placerait-on ? »

Il ne pouvait pas deviner que Monet deviendrait le maître admiré entre tous, et que c’est auprès de ses oeuvres à lui qu’on viendrait placer Rothko, Joan Mitchell et tant d’autres.


2 commentaires

  1. To our present day understanding of Monet’s achievements and influence in the history of painting, it is astonishing to read the article. However, after Monet’s death and even while he was living his last years at Giverny, he was regarded as outdated, merely one of the originators of Impressionism – but the Art world had moved on from Impressionism. Monet’s reputation began to suffer, thought of as a simplistic painter of pretty landscapes and airy fairy fantasies of water lilies. I think I remember reading that already by the 1930s, the Musee Orangerie was already rather neglected with no more than a couple of visitors in a day. It was Monet’s greatest fear – that history would regard him as irrelevant. Whether it was the direct influence of the rediscovery of Monet’s later Grand Etudes and Decorations by the American painters in the 40s and 50s or not, it’s remarkable how Monet is now in the Pantheon of the greatest painters of all, a historical A list celebrity! If Monet had died young, he’d still be remembered and loved for his Impressionist paintings of the 1870s, but throughout his long life he was moving forward, pushing boundaries…always a sign of the truly great artists – his achievements are phenomenal.
    Thankyou, Ariane, for writing such interesting articles.

    • Thank you Dugald for your very thoughtfull appreciation of Monet. Fosca (and others) blindness forces us to feel humble in our judgment of present day art. What a tough job it is to be an art critic!

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Ariane.

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