C’est le plus époustouflant musée qu’on puisse imaginer. A priori pas de ceux que le visiteur de Rouen placerait en tête de liste : un musée de la ferronnerie, voilà qui n’est pas spécialement inspirant, pas vrai ? Et même si l’on vous précise pour vous appâter que c’est une collection de 15 000 pièces unique au monde, quelque chose vous dit que vous allez en mourir d’ennui.
Pour une fois n’écoutez pas cette petite voix intérieure et foncez au musée Le Secq des Tournelles ! Car cette église aujourd’hui dédiée à la célébration des arts du fer vous réserve des tonnes d’émotions muséales, une déferlante de stupéfaction, d’admiration, de plongeon dans le passé humble ou prestigieux, et une sympathie certaine pour les deux passionnés qui lui ont consacré leur vie.
Tout a commencé au 19ème siècle quand Jean-Louis Le Secq des Tournelles s’est mis à collectionner les objets en fer les plus étonnants et les plus hétéroclites, des grilles de châteaux aux couteaux de cuisine, des serrures sophistiquées aux cabochons de souliers.
Papa LSdT ne s’est pas contenté d’amasser des trésors, il a aussi transmis la manie de la collectionnite à son fils Henri. C’est devenu sa vie, au fiston, pendant plus d’un demi-siècle.
Difficile d’imaginer les merveilles accumulées au fil des décennies par ces deux amoureux du fer. Les enseignes les plus ouvragées surplombent des coffres bardés de renforts, dont les mécanismes paraissent réglés au micron. Les briquets succèdent aux lits à baldaquin, les dés à coudre aux balustrades.
La présentation thématique et chronologique conduit le visiteur éberlué à la découverte d’une multitude d’ustensiles dont l’usage si familier à nos aïeux s’est perdu, ou qu’on préfère aujourd’hui dans un autre matériau. On a oublié tout ce qui se faisait en fer autrefois, tous ces objets qui avaient leur place dans la rue, à l’église, dans toutes les pièces de la maison, dans l’âtre, sur les tables, jusque dans la parure…
La maestria avec laquelle les artisans d’alors ont travaillé le fer, la finesse de certaines pièces émerveille. Saurait-on encore les fabriquer de nos jours ?
Au cours de la visite on ne peut s’empêcher de se sentir gagné par la fascination des Le Secq des Tournelles pour ce matériau aux mille métamorphoses. Et d’avoir envie de les remercier de nous avoir fait partager leur érudition et leur dévorante passion en léguant leur collection à la ville de Rouen en 1921.
Sans vouloir faire offense à la guilde Ariane, cheftaine dans l’art de ménager le suspense de ses en-quêtes patrimoniales, le lit à baldaquin (italien) me semble bien n’être entré apres restauration, dans les collections du musée qu’au XXIème siècle.
L’homophonie des Le Secq, j’avais compris, quant au reste du commentaire sur l’enseigne, voilà maestria d’amirale de vaisseau.
n.b. N’y aurait-il pas quelque branche flamande dans votre arbre à vous, enquêteuse, le prénom labyrinthique me le laisse subodorer!
Je ne suis pas une fille du Nord, croyez bien que je le regrette.