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Voir les Velázquez

Diego Velázquez, L’Adoration des Mages, 1619 – Musée du Prado, Madrid

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Malgré sa modernité, Claude Monet avait une grande admiration pour les maîtres anciens. ll vénérait Le Tintoret ou Titien. Pendant ses séjours à l’étranger, il ne manquait pas de visiter les musées, s’octroyant parfois ce plaisir à la fin seulement, après le travail. Monet a gardé un vif souvenir des Rembrandt vus en Hollande. Mais à 60 ans passés, ses voyages ne l’avaient pas encore conduits en Espagne, où il désirait ardemment contempler les Velázquez du musée royal de peinture, aujourd’hui le Prado.

Comment est né ce désir ? Velázquez était fort peu représenté en France. On ne compte toujours que deux oeuvres du maître espagnol dans l’Hexagone, l’une au musée des beaux-arts d’Orléans, l’autre, que Monet connaissait forcément, au musée des beaux-arts de Rouen, qui a pu lui donner envie d’en voir davantage :

Diego Velázquez, Démocrite, vers 1630, Musée des beaux-arts de Rouen

L’oeuvre est entrée dans les collections rouennaises en 1886. Mais on peut faire remonter cette attirance pour le maître espagnol à la jeunesse de Monet, quand il fréquentait les réunions de peintres dans les cafés parisiens, où Manet parlait avec fougue de Velázquez, « le plus grand peintre qui ait jamais existé ». On connaît l’influence de la peinture espagnole sur l’oeuvre de Manet, et l’admiration que Monet avait pour son aîné.

Après la mort de Manet en 1883, d’autres amis de Monet ont fait le voyage à Madrid et en sont revenus éblouis, comme Degas en 1889 ou Renoir en 1891. Leurs récits n’ont fait que renforcer l’envie de Monet de se rendre en Espagne. C’était donc un rêve profondément enraciné, très haut dans sa liste de choses à faire avant de mourir.

Mais les années passent sans que Monet se décide à entreprendre le long périple. Et puis, en 1904, c’est le déclic. Le projet se concrétise. Le mardi 4 octobre, Monet écrit à son marchand Paul Durand-Ruel qu’il va partir pour l’Espagne le vendredi. Il espère qu’il pourra lui faciliter l’accès à des collections privées. Durand-Ruel va faire mieux que lui écrire des lettres de recommandation : par une coïncidence étonnante, lui aussi a prévu d’être à Madrid aux mêmes dates. Pendant plusieurs jours, le peintre, sa famille et le marchand ne se quitteront plus et entreprendront ensemble un marathon artistique, où la contemplation des Velázquez arrachera des larmes d’émotion à Monet.


6 commentaires

  1. J’imagine l’immense émotion de Monet de pouvoir enfin se rendre à Madrid,son voeu a été exaucé!!
    Même si je reconnais l’immense talent des peintres espagnols,j’ai malgré tout « un penchant » pour les peintres impressionnistes…

  2. Voyage épique du 8 au 28 octobre 1904 en partie en voiture avec Alice et Michel comme chauffeur. Après 800 kilomètres, ils doivent laisser la Panhard en panne à Biarritz et poursuivre en train. Ils seraient arrivés à Madrid le 14. Ils récupèreront le véhicule au retour à Biarritz et rentreront à Paris à petite vitesse. J’ai lu 30 km heure !
    Autre époque, autre rythme.

    Merci pour tous vos articles que je lis passionnément chaque fois.

    • C’était épique, en effet ! Il fallait du courage pour se lancer dans l’aventure. Michel a sans doute conduit pour assister Silvain Besnard, chauffeur officiel de la famille. Merci pour votre intérêt et votre fidélité.

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Merci de respecter mon travail en ne les copiant pas sans mon accord.
Ariane.

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