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Premiers jours de printemps
Quelles fleurs seront au rendez-vous du premier avril dans les jardins de Monet ? A trois jours de l’ouverture il paraît acquis que le rideau se lèvera sur un décor très semblable à celui de l’année dernière.
Les saules ont secoué leur tristesse hivernale et viennent d’ouvrir leurs bourgeons, les pensées, après mûre réflexion, ont décidé qu’il était temps de s’épanouir, les prunus voient la vie en rose, les jonquilles et les narcisses trompettent dans les massifs.
En dehors des saules toujours pressés, peu d’arbres ont l’inconscience d’offrir leurs tendres petites feuilles nouvelles à la morsure du froid nocturne. Ce sont encore des silhouettes nues qui se reflètent dans le bassin, des squelettes d’arbres que le courant fait frissonner.
Les premières feuilles de nénuphars flottent à la surface. Il a fallu casser la glace cet hiver pour libérer les plus précoces, quand le gel de la nuit succédait au soleil de la journée. Auront-ils bien supporté le chaud et froid ?
C’est cette année que l’on va vraiment mesurer l’impact de la disparition des peupliers à l’arrière du jardin d’eau. Les grands arbres donnaient trop d’ombre au bassin, mais ils avaient le mérite de stopper le vent. Comment l’écosystème va-t-il se rééquilibrer ? Les nénuphars si sensibles vont-ils exulter de toute cette lumière, ou grelotter sous la bise ?
La réponse s’inscrira à la surface du bassin de Monet d’ici peu. En attendant, je me réjouis de retrouver bientôt la sérénité des premiers jours, la netteté des parterres au tout début de leur cycle de floraison.
L’hiver fait un grand nettoyage par le vide. Le printemps, habile décorateur, va venir mettre de la couleur partout.
Clématites
C’est le meilleur moment pour admirer les clématites dans le jardin fleuri de Claude Monet à Giverny.
Les vigoureuses clematis montana installées sur des supports métalliques croulent en ce moment sous les fleurs et la végétation. Elles cascadent en rideaux de dentelles blanches et roses au-dessus des passants dans le Clos Normand, créant cette sensation d’être totalement immergé dans la nature que Monet aimait.
C’est irrésistible, on a envie de passer dessous, si bien que j’ai changé mon parcours habituel de visite, tant pis pour le rond des dames et pour le poulailler.
Le jardin est tellement splendide en ce moment que les visiteurs se félicitent d’avoir choisi ce premier week-end de mai. « Quelle chance d’être venus la bonne semaine voir le spectacle du printemps ! » me disait une dame aujourd’hui. « Bientôt tout sera passé ! »
Il n’en sera rien, bien entendu. Dans quelques semaines le jardin sera tellement plein de roses que les visiteurs l’appelleront la roseraie. Les iris et les pivoines étaleront leurs atours somptueux le long des allées en défilé de mode. On ne saura plus où donner des yeux.
Parmi tout ce que je raconte aux visiteurs, je crois que c’est le tour de force du spectacle permanent qui les étonne le plus. Qu’on retire les fleurs passées pour en planter d’autres de la saison à venir, sur une telle surface, ils n’en reviennent pas. Et quand je leur décris l’aspect des autres saisons, les murs de fleurs de l’été, les reflets chauds de l’automne, le tapis de capucines dans la grande allée, ils sont stupéfaits. Waou ! disent-ils. Il faut qu’on revienne plus tard dans l’année !
De mois en mois, ce n’est pas le même jardin que l’on visite. Comme sur la scène d’un théâtre, le décor a changé.
Narcisses et tulipes
Cette année les premières tulipes sont arrivées à l’heure à leur rendez-vous avec les narcisses.
En général, les narcisses se précipitent pour fleurir dès les premiers jours un peu tièdes, tandis que les tulipes attendent sagement le mois d’avril.
Mais cet hiver la température est descendue à un niveau inhabituel, jusqu’à -14°. Le gel a persisté jour et nuit pendant trois semaines. Tout ce froid a calmé les ardeurs des jonquilles et des narcisses. Ouh là là ! se sont-ils dit, ça pince ! Attendons un peu.
Lièvres et tortues ont fini par prendre le même départ, et voilà les narcisses et les jonquilles côte à côte avec les tulipes dans les jardins de Monet, en taches blanches, jaunes et rouges qui réveillent le vert des gazons.
Ces belles plantes à bulbes sont plantées par bouquets dans les pelouses du clos normand. C’est le moment de l’année où l’on se rend compte que Monet avait prévu des carrés d’herbe dans son jardin fleuri, comme une respiration entre les massifs, un gazon bien vert sous les arbres fruitiers et à fleurs.
Bientôt les bordures vont devenir si hautes et si éclatantes qu’on ne remarquera plus les carrés de pelouse. Ce sera le moment de les oublier, quand les longues feuilles du narcisse se dessèchent peu à peu, le temps que le bulbe fasse des réserves pour l’année prochaine.
Jardin de roses
Giverny croule sous les roses. On ne voit qu’elles partout, elles cascadent depuis les supports en forme de parapluies, elles embellissent la façade de la maison de Claude Monet, elles partent à l’assaut des arceaux de la grande allée, des trépieds, des grillages, elles buissonnent, elles grimpent à côté des clématites, elles s’enroulent autour des arbres du jardin d’eau jusqu’à des hauteurs incroyables, elles se fondent dans les massifs au milieu des pivoines et des juliennes…
Il y en a de toutes simples, proches parentes de l’églantine dont elles ont gardé le petit air sauvage, d’autres mousseuses, ou fripées, ou généreuses, des discrètes, des éclatantes.
Les couleurs ? Blanc pur ou crème avec des étamines d’or, rose pâle ou rose vif, rouge sang, jaune tendre, orangé, ou encore d’un mauve violacé étonnant. Certaines sont jaunes quand elles s’ouvrent et deviennent blanches ensuite, comme si la lumière les faisait déteindre.
Et avec tout cela des parfums, des parfums…
Lumière d’avril
Soudainement le printemps déferle. Pour la première fois de l’année il a fallu aller fouiller dans les gardes-robes d’été, et ce geste avait un goût de fête.
La lumière d’avril a une qualité particulière. Elle pétille, on dirait du champagne. La douceur de l’air (25 degrés cet après-midi !) et le soleil aguicheur exercent une attraction irrésistible, faisant naître des envies de promenades dans les jardins.
De même qu’il nous précipite hors des maisons, le soleil printanier fait jaillir les feuilles de leurs bourgeons. Il aspire les végétaux hors du sol. Chaque jour les pivoines gagnent en taille et en vigueur, et elles ne sont pas les seules.
Le jardin de Monet resplendit de toute sa beauté de début de saison, éclatant de couleurs dans les massifs, fragile et tendre dans les ramures.
Dans le clos normand les parterres couverts de tulipes, de pensées et de giroflées sont peut-être les plus somptueux de l’année. Plus que jamais les pétales soyeux, satinés ou d’une douceur de velours accrochent la lumière à la manière d’un tableau impressionniste.
Du côté du jardin d’eau quelque chose semble en suspens, comme une promesse.
Le hêtre pourpre a déplié les éventails de ses feuillettes en un éclair. On les voit grossir presque à vue d’oeil depuis le début de la semaine. Elles sont d’un roux pâle mêlé de vert, et n’ont pas encore passé leur brevet de magiciennes.
Les buissons d’azalées bien taillées resplendissent de rouges profonds et d’orange velouté.
Mais on attend toujours que les nénuphars se réveillent, et que la glycine pare le pont japonais de sa délicate étole.
Tout frais tout neuf
La maison et les jardins de Monet à Giverny rouvriront dans trois semaines, le mardi premier avril. Ce jour-là, le domaine du maître impressionniste va se réveiller après un sommeil hivernal de cinq mois.
Voici l’aspect du jardin auquel on peut s’attendre à l’ouverture. Des coulées de narcisses à travers des pelouses bien vertes, des tapis de pensées et de pâquerettes éclatants de couleurs, des jacinthes parfumées, des fritillaires intrigantes, les premières tulipes qui pointent dans des parterres bêchés de frais…
Les bancs, tout le jardin tout neuf a l’air d’attendre ses premiers visiteurs.
Ceux qui viendront dès le premier jour aiment les commencements, la plage au mois de juin, l’aurore plutôt que le crépuscule, la neige vierge, les cahiers neufs… Ils aiment se lever à l’heure où tout le monde dort encore, sauf les oiseaux.
Ils seront les premiers cette année à marcher dans les allées bien ratissées, à passer sous la tonnelle du pont japonais où la glycine sera tout en bourgeons.
Le saule, toujours précurseur des autres arbres, balancera ses longues branches emplumées de vert tendre.
A la surface du bassin les nénuphars n’auront pas encore réagi à la nouvelle douceur de l’air.
En avance de quelques jours sur les hirondelles qui laboureront bientôt le ciel normand de leurs socs pointus, les premiers visiteurs allongeront leurs reflets à la surface de l’eau, comme un signal à l’attention des nymphéas.
A Giverny, ce sont les promeneurs qui font le printemps.
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