Quand le temps est maussade, les tulipes sont à la fête. Elles n’aiment rien tant que la fraîcheur et l’humidité incertaine des premières semaines de printemps,
quand le thermomètre ne grimpe guère au-dessus de dix degrés et que vous n’avez pas une folle envie de vous attarder au jardin.
C’est ce qui les fait fleurir en avril, au moment où l’herbe pousse dans les prés et les feuilles aux arbres, par ce pari des fleurs qu’elles ne tomberont pas pile sur l’une des rares nuits de gel encore possible à cette époque.
Cette année ce n’est pas le givre du petit matin qui les a surprises mais la canicule de l’après-midi. Les fantaisies de la météo jouent des tours aux plantes. Les quelques jours d’été en plein avril, avec 27° à Giverny (et même 30 selon mes constatations) ont fait la joie des humains mais bousculé le développement des fleurs.
Les tulipes ne sont pas équipées pour l’été. En quelques heures de chaleur leurs pétales s’ouvrent à l’horizontale, s’ourlent, se dessèchent et se parcheminent. On a l’impression de les sentir griller, comme les peaux trop blanches qui soudain s’exposent. Celles qui sont plantées à l’ombre résistent mieux.
En revanche, pour beaucoup d’autres végétaux la chaleur soudaine fait l’effet d’un coup d’accélérateur. Que se passe-t-il, se disent-elles, c’est déjà l’été ? Comme le lapin blanc d’Alice elles se croient en retard, elles se dépêchent de faire des feuilles, des tiges, de faire exploser leurs boutons floraux, de répandre leurs parfums les plus capiteux à la ronde. Voici déjà les azalées, les coeurs de Marie, et même le muguet en avance d’une bonne semaine.
A quoi bon toute cette hâte, cette bousculade ? Un vrai temps normand se profile déjà, qui va calmer les ardeurs du soleil et celle des plantes. Ouf ! On aime quand la floraison des tulipes se prolonge pendant six semaines plutôt que six jours.
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