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La famille Butler
Le musée de Vernon propose pendant tout l’été Saga familiale, une belle exposition sur Monet et les peintres de sa famille, à savoir Blanche Hoschedé-Monet, Theodore Butler et James Butler.
Parmi les oeuvres originales présentées pour la première fois par le commissaire Philippe Piguet figure cet ensemble de grands dessins aux crayons de couleur. Ils n’ont rien à voir avec des oeuvres destinées à la vente : ce sont des dessins faits pour être donnés en cadeau à une petite fille. On y reconnaît, dans l’ordre de présentation choisi par le commissaire, les membres de la famille de Theodore Butler : le peintre lui-même, Marthe Hoschedé-Butler, Jimmy Butler, Lily Butler et la cuisinière. L’ensemble est dédicacé dans le premier cadre :
« Ma Sisi chérie,
N’oublie pas le N° ‘coeur’ rue des Corbichons
Giverny par Vernon (Eure)
Ton oncle Butler. »
Sisi, c’est Simone Salerou, la fille de Germaine Hoschedé-Salerou. Elle est née en 1903.
Les dessins débordent de tendresse et de connivence. Qu’est-ce que cette rue des Corbichons, inconnue à Giverny ? Le terme n’est pas dans le dictionnaire. On dirait un mot d’enfant, une blague familiale, à l’image des manradines.
Theodore Butler s’est représenté en sabots, pipe à la main, le nez et la bouche noyés dans une barbe abondante, les yeux naïvement dessinés comme des billes, le visage en forme de coeur.
Sous le titre Tante Pap, la Dame de coeur souligné d’une rangée de petits coeurs, Theodore a figuré sa seconde épouse Marthe, la tante de ses enfants à lui tout autant que la tante de Sisi. Il s’est amusé à n’utiliser que des coeurs pour le visage, le buste et la jupe dont dépassent deux petites chaussures à talons. Au milieu de la poitrine, encore un coeur, marqué ‘Pour Sisi’.
Le dessin représentant Jimmy, alias James, alias Jacques Butler, est peut-être le plus intéressant. L’enfant est pris sur le vif en train de construire une tour de cubes, dans une attitude qui rappelle celles des membres de la famille Fenouillard de Christophe. En regardant attentivement, on s’aperçoit que chaque cube porte le nom d’un proche ou d’un membre de la famille.
Tout en bas, en fondation, le plus gros porte le nom d’Albert. C’est le papa de la petite Sisi.
Puis viennent Michel (le fils cadet de Monet), Bonne (Alice Hoschedé-Monet), Monet, Lili (Alice Butler, la cousine de Sisi), Pap (Marthe Hoschedé-Butler, sa tante), Jim, le cousin de Sisi (James Butler), Maine (Germaine, la mère de Sisi), Lanlan (Blanche Hoschedé-Monet) et Jean Monet (fils aîné du peintre). Ils sont suivis de Diane (?), Sisi elle-même, Dash (?), La petite colombe (?), Sylvain (le chauffeur de Monet, je suppose), Pierre (?), Geneviève (Costadau, épouse de Jean-Pierre Hoschedé), Jean-Pierre (Hoschedé), puis Delasse, Marie, Rosa, Arthur, Petit frère, Pussy et Poussette, sans doute des employés de la famille pour les premiers, ou un bébé à naître, ou encore des chats pour les derniers. On retrouve dans cette énumération le goût de l’époque pour les surnoms.
Et le cube qui doit couronner le tout commence par Bonne Ann.. Bonne année ? Serait-ce un cadeau d’étrennes ?
Lili est représentée en écolière. Elle est née en octobre 1894, ce qui lui fait 9 ans d’écart avec la petite Sisi. Son frère le constructeur de tour en cubes a 18 mois de plus. On peut supposer que Sisi est très petite, on serait vers 1905 ou 1906 tout au plus.
C’est la cuisinière de la famille, sans être nommée, qui clôt cette galerie de portraits avec un bon sourire et les mains ouvertes, tandis que derrière elle, sur le grand fourneau, mijotent oeufs brouillés et ragout. Les plats préférés de la famille ? Ou de Theodore Butler ?
- Note du 7 août : le mystère de la rue des Corbichons est résolu ! C’est l’ancien nom de la rue du Colombier, comme le montre le cadastre napoléonien. Cela pourrait être tout simplement un nom propre. Merci Véronique !
Claude, Blanche, Theodore et Jim
La nouvelle exposition du musée de Vernon Saga familiale est consacrée à Claude Monet et plusieurs autres peintres de sa famille : sa belle-fille Blanche Hoschedé-Monet (épouse de son fils Jean Monet), son beau-gendre Theodore Butler (mari de Suzanne puis de Marthe Hoschedé, deux autres belles-filles de Monet) et le fils de Theodore et Suzanne, Jim Butler.
Philippe Piguet, descendant des Hoschedé et commissaire de l’exposition, a fait appel à ses frères et soeurs pour nombre de prêts. Blanche avait déjà fait l’objet d’une exposition monographique à Vernon en 2017, mais les Butler n’avaient pas encore eu droit à ce coup de projecteur.
L’exposition est organisée par thèmes : en famille, fleurs et jardins, paysages de terre et paysages d’eau, reflets. Si elle ne présente que 3 tableaux de Claude Monet – dont un adorable pastel, Portrait de Germaine Hoschedé (la 4e belle-fille) daté de 1880 en collection particulière – elle regorge en revanche d’oeuvres de Blanche et de son beau-frère Theodore Butler.
Nés tous deux dans les années 1860, lui en 1861, elle en 1865, et tous deux proches de Monet, ils en ont subi l’influence aussi bien dans le choix des motifs que dans leur traitement pictural. Mais le style de Butler semble avoir puisé aussi à d’autres sources et offre davantage de variété, de la douceur à la stridence.
Son fils James, dit Jim ou Jimmy, regarde du côté du fauvisme et de l’expressionnisme, et montre un goût pour les paysages qui dérangent, peut-être en réaction à la douceur des lumières impressionnistes. Né à Giverny en 1893, il grandit dans un milieu artistique, son père étant en lien avec la colonie de peintres du village. Il a 20 ans quand Theodore et Marthe l’emmènent avec eux aux Etats-Unis. James fera des aller-retour entre les deux pays, avant de se tourner vers l’illustration et le batik et de s’installer définitivement aux Etats-Unis en 1940.
La fenêtre de Bonnard
Nous sommes dans la salle-à-manger de Pierre Bonnard et Marthe de Méligny à Ma Campagne, un hameau de Vernon sur la rive droite de la Seine. Pierre et Marthe y ont emménagé en 1910, séduits par ce coin de nature à l’écart de la ville, et par la jolie vue qu’ils ont depuis leur maison. Une vue si plaisante que Pierre la prend comme motif de tableaux. Se place-t-il vraiment devant la fenêtre ? On peut en douter, car il aime recomposer dans sa tête l’image aperçue.
Cette oeuvre, qui fait partie des collections du musée des Beaux-Arts Jules Chéret de Nice, a été montrée pendant toute la saison 2021 au musée des Impressionnismes Giverny, dans le cadre de l’exposition De Monet à Bonnard.
Une petite oeuvre qui appartient au musée Poulain de Vernon lui fait écho :
De dimensions beaucoup plus réduites, elle fait penser à un travail préparatoire à la grande toile. Apparemment, c’est la même chose en plus rapide, moins « fini » : même motif, mêmes couleurs. Mais si on compare les deux oeuvres, on s’aperçoit que le cadrage diffère. La partie droite de la fenêtre est coupée dans le tableau du musée de Vernon.
Impossible de positionner la toile de Vernon sur celle de Nice : la partie qu’elle représente n’est pas du même format. Elle se présente au format paysage à Vernon mais comme un portrait, plus haute que large, à Nice. C’est le travail de recomposition mentale qui donne cette élasticité aux formes, en dehors de toute représentation « réaliste » de ce qui se donne à voir.
Benjamin Rabier au musée
La scène pourrait se passer à Giverny : un ruisseau de rien du tout, un saule têtard, la barrière d’un pont, un petit village au fond. Les deux protagonistes se font face dans un tête à tête immortalisé par Jean de La Fontaine, comme nous le rappelle le titre de cette planche : le Loup et l’Agneau.
Mais au lieu de la morale attendue sur la raison du plus fort, au lieu de toutes les répliques que nous connaissons par coeur, le dialogue prend un tour différent :
– Laissez-moi retourner chez mon maître…
– Imbécile… si je ne te mange pas, c’est lui qui te mangera !
Il y a quelque chose de savoureux dans cet échange, et c’est peut-être cette apparence de logique du loup qui sous-entend « alors autant en finir tout de suite », ou « alors il vaut mieux que tu me nourrisses moi qui suis un animal plutôt que de finir dans le ventre d’un humain ». Une espèce de marchandage fait sur un ton prosaïque, avec des mots de tous les jours soigneusement pesés. Façon punch line.
Ou peut-être que c’est le comique de voir l’agneau déniaisé, et cela par un loup clochard… Car il n’a pas la superbe de celui du poète, qui s’écrie « Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage ? » Celui-ci se balade en charentaises, des pièces aux genoux et courbé sur sa canne. On se demanderait presque s’il lui reste des dents, si Rabier n’avait pas anticipé la question en lui faisant une gueule effrayante.
C’est le musée de Vernon qui présente ce livre dans sa section d’art animalier, où une belle place est faite aux oeuvres du célèbre illustrateur Benjamin Rabier (1864-1939), quasi contemporain de Monet (1840-1926). Je ne crois pas que sa fameuse Vache qui Rit figure dans les collections, mais on peut voir d’autres dessins avec ce même côté désuet qui nous touche encore.
Depuis quelques années, la muséographie de cette section a été simplifiée, selon les tendances du moment. La sélection des oeuvres présentées est donc d’autant plus drastique. Je me suis penchée sur la vitrine pour découvrir ce Loup et cet Agneau, j’ai souri, et j’ai pensé à la personne qui avait eu l’ouvrage en mains, l’avait feuilleté, s’était peut-être amusée à d’autres pages, puis avait finalement décidé d’ouvrir l’album à celle-ci pour nous en faire savourer à notre tour l’humour… comment dire ? Mordant.
Lucie Cousturier
Mettre en valeur les femmes artistes, c’est la mission que s’est donné, avec succès, le musée de Vernon. Cet été c’est une peintre injustement tombée dans l’oubli qui est à l’honneur : Lucie Cousturier.
Quelques grands musées ont prêté des toiles : Orsay, l’Annonciade à Saint-Tropez, le musée de Grenoble. Lucie Cousturier est même présente aux Etats-Unis au musée d’Indianapolis, mais la plupart de ses oeuvres sont en collections privées. Autant dire que c’est un jeu de piste de les localiser.
Etre caché des yeux du public, cela n’aide pas à la célébrité.
Giverny au point de croix
La maison de Monet en broderie, j’ai hâte de voir cela. Le château de Bizy va accueillir une exposition de point de croix la semaine prochaine, du 14 au 19 juin.
Le thème choisi par les brodeuses vernonnaises de l’association 2001 croix est on ne peut plus local, puisqu’elles ont relevé le défi de représenter les monuments de Giverny et Vernon. Il a fallu créer les grilles d’après des images, puis les broder. Le résultat promet d’être inédit et ravissant.
Si vous passez par là, n’hésitez pas, c’est l’occasion de revoir aussi le beau parc du château !
Expositions 2017 à Giverny
Le Musée Des Impressionnismes Giverny propose pour le début de saison 2017 une exposition qui va faire du bruit : Tintamarre ! Instruments de musiques dans l'art 1860 – 1910 s'intéresse, vous l'aurez compris, aux oeuvres picturales qui évoquent la musique. Leçons de piano si prisées de la bonne société, récitals de guitaristes, fanfares et autres orchestres ont énormément inspiré les impressionnistes, avides de figurer la vie moderne et ses loisirs.
En cela, la peinture reflète l'évolution de la société. Le 19e siècle voit l'invention ou l'amélioration d'un grand nombre d'instruments, dont certains tombent vite dans l'oubli, tandis que d'autres connaissent un succès qui ne se dément pas, comme le saxophone. Quelque 4000 brevets concernant des instruments de musique sont déposés au 19e siècle !
Evoquer dans une oeuvre silencieuse les harmonies musicales est une gageure, et c'est intéressant de voir comment chaque artiste s'y est pris pour surmonter cette difficulté.
C'est un peu le miroir de cette musique impressionniste dont Debussy et Ravel sont les principaux représentants, une musique descriptive qui cherche à évoquer des impressions visuelles telles que des reflets au moyen des seules sonorités.
L'exposition articule son parcours autour d'une centaine d'oeuvres signées Manet, Degas, Renoir, Morisot, Bonnard, Whistler, Toulouse-Lautrec ou Vallaton. Elle présente beaucoup de tableaux, mais aussi des oeuvres imprimées. Pour ma part je suis tombée sous le charme de Marguerite Dufay, délicieuse tromboniste à la robe fleurie. Elle vous plaît ? Elle est à voir du 24 mars au 2 juillet à Giverny.
Le deuxième partie de la saison sera consacrée au peintre fauve Henri Manguin et ses couleurs éclatantes.
En attendant, une exposition rafraichissante est à voir au musée de Vernon jusqu'au 25 juin. "Au fil de l'eau, Seine de loisirs" nous emmène pêcher, canoter, danser dans les guinguettes et même sauter depuis le grand plongeoir, pour ceux qui n'ont pas froid aux yeux. L'expo présente des tableaux du 19e et 20e siècle, ainsi que des objets comme une yole, des costumes de bain ou l'appareil photos de MacMonnies. D'émouvants films d'avant-guerre font revivre le Vernon d'antan.
Ci-dessus : Maximilien Luce / Méricourt, la plage. Huile sur toile, musée de Mantes la Jolie.
Le musée de Mantes-la-Jolie présente l'autre volet de cette exposition, 'Seine de travail'. C'est l'occasion de redécouvrir les collections permanentes de ce musée qui possède plus de 400 oeuvres de Maximilien Luce.
Retourner à la poussière
Le musée de Vernon présente jusqu'au 14 février 2016 une exposition d'art contemporain très dérangeante autour de l'oeuvre de Lionel Sabbaté. "Echafaudages d'une caresse", le titre est doux, le thème aussi, puisqu'il s'agit d'animaux. Le jeune artiste réalise des cygnes, des oiseaux, des papillons, des loups… L'expo a tout à fait sa place au musée de Vernon, spécialisé dans l'art animalier.
Alors qu'est-ce qui perturbe, qui fait frémir, qui rend la vue de ces oeuvres insoutenable ?
Rosa Bonheur
Marie-Rosalie Bonheur, dite Rosa Bonheur – Lapins (détail. Cliquez pour voir l’oeuvre) vers 1840. Musée des Beaux-Arts de Bordeaux, sa ville natale.
Le musée de Vernon présente jusqu’au 20 septembre 2015 une exposition intitulée « Rosa Bonheur, l’éloge du monde animal« . La raison : le musée Poulain, outre l’impressionnisme, est aussi spécialisé dans l’art animalier. Le prétexte : les collections vernonnaises comportent une étude de paysage de Rosa Bonheur, qui aimait s’inspirer de lieux réels pour placer ses animaux en situation. Un bronze, le Bélier couché, figure également dans les collections.
Si vous en avez l’occasion, ne manquez pas la visite guidée gratuite proposée le premier dimanche du mois à 15h. L’intérêt de l’exposition est décuplé par l’évocation de la personnalité hors du commun de l’artiste.
Si la peinture de Rosa Bonheur est passablement passée de mode – des animaux traités avec un admirable réalisme – en revanche la femme qu’elle a été reste un modèle pour celles d’aujourd’hui. Avec doigté, elle a su vaincre les préjugés de son époque et fait voler en éclats toutes les limites alors imposées à son sexe (elle est née en 1822).
Rosa Bonheur travaillait avec puissance. Très jeune elle a obtenu la reconnaissance officielle et l’indépendance financière qui l’accompagnait. Elle allait dans les abattoirs procéder à des dissections pour mieux comprendre l’anatomie des animaux qu’elle peignait. Elle portait le pantalon grâce à une autorisation préfectorale de travestissement qu’elle faisait renouveler tous les six mois. Elle vivait en concubinage avec une femme. Elle fumait. Elle montait à cheval à califourchon et non pas en amazone. Elle voyageait. Elle enseignait… Elle est même devenue l’une des premières femmes décorée de la Légion d’honneur.
Rosa Bonheur vivait dans une grande demeure près de Fontainebleau entourée d’animaux, y compris un couple de lions. Le mâle était en cage mais la femelle apprivoisée se promenait en liberté. Une photo étonnante montre l’artiste allongée côte à côte avec le fauve.
En 1889, à l’occasion de l’exposition universelle de Paris, Rosa Bonheur rencontre Buffalo Bill en tournée en Europe avec le Wild West Show. Elle est émue par la cause des Indiens : proche de la nature comme eux, elle ressent le tort qui est fait à ce peuple par « le Blanc usurpateur ».
Ce qui fait rêver dans sa personnalité, c’est son assurance que tout est possible. Rien ne l’arrête, elle peut tout faire, et elle a l’énergie de tout faire. Quel charisme elle devait avoir !
Pas vraiment féministe, Rosa Bonheur ne se bat pas pour ses soeurs (on n’a qu’à faire comme elle, sans doute ! Où est le problème ?) mais pour les animaux. Pour elle, il est évident qu’ils ont une âme. Elle transcrit cette conviction en avance sur son temps dans ses tableaux, en attachant une grande importance à leur regard.
Aux fils de nos voyages
Autrefois, l’épouse de Claude Monet Alice et ses filles s’asseyaient sous le paulownia du rond des dames pour broder ou coudre les belles après-midi d’été.
Tirer l’aiguille est un loisir convivial qui se pratique volontiers à plusieurs. A Vernon, une association perpétue cette tradition. Deux mille et une croix, c’est ainsi qu’elle se nomme, rassemble toutes les personnes qui souhaitent se réunir pour broder au point compté ou coudre quilts et patchworks.
Comme son nom le laisse entendre, l’association existe depuis dix ans. Pour fêter son anniversaire, elle organise une grande exposition d’art textile sur le thème du voyage les 14, 15 et 16 octobre 2011, à l’Espace Philippe-Auguste de Vernon.
La salle Viking accueillera une rétrospective des ouvrages collectifs réalisés au fil du temps par les membres de 2001 croix. On pourra admirer notamment le magnifique paravent fleuri dont ce nénuphar est extrait (cliquez sur l’image pour le voir).
Des oeuvres de broderie en appliqué réalisées par des jeunes femmes de Pondichéry offriront un voyage dans l’Inde ancienne.
La mezzanine recevra des mercières et des créatrices, des dentellières, des auteurs de livres de points de croix. La salle Maubert proposera des ateliers de cartonnage ou de scrap.
Si vous prévoyez d’aller à Giverny ce week-end là, un petit crochet par l’Espace Philippe Auguste, en plein centre de Vernon, à deux pas de la gare, ravira toutes celles et ceux qui aiment les loisirs créatifs.
La Seine au fil des peintres
Déjeuner au bord de la Seine, Gaston Balande, 1914 huile sur toile 140 x 160 cm, Association des Amis du Petit Palais, Genève
Tout comme le musée des impressionnismes de Giverny, le musée de Vernon célèbre jusqu’au 25 juillet la Seine, telle qu’elle a été représentée par les peintres impressionnistes et leurs successeurs.
La belle expo qui investit la plupart des salles du musée nous entraîne tout au long du fleuve, de Mantes-la-Jolie jusqu’au Havre.
Chaque salle est dédiée à une portion du parcours, ce qui permet de faire dialoguer les peintres qui se sont attachés à rendre les mêmes paysages.
Les deux Monet des collections permanentes du musée de Vernon n’ont pas été intégrés à l’exposition à proprement parler, puisqu’ils ne représentent pas le fleuve, mais une vue de Nymphéas et une autre de la côte normande. Rien n’empêche d’aller les admirer en même temps, bien entendu ! En revanche les deux Bonnard y figurent, aux côtés d’oeuvres de Signac, de Vallotton et de Boudin.
Mais, si l’expo de Vernon présente quelques noms célèbres, elle vaut surtout pour les peintres qui le sont moins. Beaucoup d’artistes très talentueux sont restés méconnus tant les plus grands de leur époque leur ont fait de l’ombre. Il devait être bien difficile d’être un peintre contemporain de Monet, de Renoir ou de Cézanne !
L’expo propose donc de belles découvertes hors des sentiers battus, pourrait-on dire. L’oeuvre de Balande choisie pour illustrer l’exposition, par exemple, est merveilleuse de fraîcheur. C’est un hymne aux belles journées d’été au bord de l’eau, presque une publicité pour tous les plaisirs qu’elles offrent. Cette image d’insouciante félicité date de 1914, et rien n’y laisse présager l’horreur imminente…
Le catalogue de l’exposition, rédigé par François Lespinasse, spécialiste de l’école de Rouen, propose de précieuses notices biographiques sur des peintres encore peu documentés, ce qui en fait un ouvrage de référence.
De Corot à Bonnard
C’était aujourd’hui le vernissage de la nouvelle exposition du musée de Vernon, « De Corot à Bonnard, chefs d’oeuvre des musées de Douai et de Vernon » à voir jusqu’au 28 juin 2009.
J’aime bien les expos du musée de Vernon, toujours intéressantes, qui proposent de belles découvertes. Mais cette fois, le musée fête ses 25 ans, et c’est carrément le calibre au-dessus. Le sous-titre « chefs d’oeuvre » n’est pas usurpé.
L’exposition s’étend sur presque toutes les salles, selon un parcours logique. On suit l’évolution de la peinture du 19ème siècle, des paysages encore empreints de clacissisme de Corot aux coloris raffinés de Cross le pointilliste, en passant par des portraits, des scènes intimistes, des oeuvres naturalistes…
Et quand on se penche sur les signatures, on lit Monet, Pissarro, Vuillard, Bonnard, Corot, Boudin, Jongkind, Le Sidaner, Blanche Hoschedé-Monet, MacMonnies, Valloton, Daubigny, Denis, Courbet… Un incroyable rassemblement de grands peintres dans un petit musée ! C’est un régal pour les yeux, d’autant que les toiles et les sculptures ne sont guère connues par rapport à celles vues et revues des grands musées.
Si vous avez l’occasion de venir à Giverny, faites le crochet par Vernon pour voir cette expo de grande qualité, vous ne serez pas déçu. Elle n’aura sans doute pas la même couverture médiatique que l’expo Monet qui s’ouvrira le 1er mai à Giverny, raison de plus pour y faire un tour !
Maurice Prost
Le musée de Vernon présente jusqu’au 26 octobre 2008 une somptueuse exposition du peintre et sculpteur animalier Charles Maurice Prost.
L’art animalier (l’une des spécialités du musée de Vernon avec les tableaux impressionnistes et les dessins de Steinlein et Poulbot), a été très en vogue dans l’entre-deux guerres. Après la célébration du végétal qui a précédé la Première Guerre Mondiale, et à cause de la méfiance envers l’homme que celle-ci a généré, beaucoup d’artistes se sont tournés vers le règne animal dans les années vingt et trente.
C’était l’époque de l’art déco, avec son épuration de la ligne et de la forme. Maurice Prost a tiré le meilleur de ce courant artistique en magnifiant les animaux sauvages qu’il allait observer à la ménagerie du Jardin des Plantes à Paris.
On se passionnait alors pour les colonies dont l’exotisme faisait rêver. Maurice Prost s’est surtout attaché à représenter les félins. Des panthères, des panthères et encore des panthères, des tigres, des lions, des lionnes, et puis décidément des panthères. Et puis non, j’exagère, des ours blancs, des chevreaux aussi, tiens tiens, un cobra incroyable taillé dans du marbre de couleur…
C’est envoûtant. Prost a dégagé la beauté plastique des félins, toute leur force, leur souplesse, tout cela sous des patines de pierre ou de bronze d’une absolue finesse.
L’artiste lui-même n’était pas une force de la nature. Il avait vingt ans quand la guerre de 1914 a éclaté.
Qu’importe le talent ? On l’envoie au front. Il a le malheur ou peut-être la chance d’être blessé dès la première semaine du conflit. Il faut l’amputer du bras gauche.
Comment continuer à créer avec un seul bras ? Il faut deux mains pour sculpter, l’une pour tenir le burin, l’autre pour manier la masse. Il modèle. Il peint. Il dessine. Jusqu’au jour où il s’équipe d’un burin pneumatique.
Les photos le montrent au travail, l’outil coincé contre l’épaule gauche, la manche vide au-dessous. Maurice Prost va s’attaquer aux pierres les plus dures avec cet engin, comme un défi. Le résultat est superbe.
Au final on ne sait qu’admirer le plus, les mystérieux félins en mouvement ou la leçon de vie de l’homme qui les a créés, sa fantastique faculté de résilience.
Christophe Conan
« J’en ai marre de dire aux gens de ne pas toucher, on a beau faire, tout le monde touche ! » Le surveillant de l’exposition Christophe Conan au musée de Vernon soupire. Et moi je souris. Parce que bien sûr, j’ai eu envie de toucher l’incroyable rhinocéros en métal qui a tellement l’air d’être en cuir. Et que bien sûr, je me suis abstenue malgré la tentation, par respect pour l’oeuvre et le travail de l’artiste.
A Rouen, le musée le Secq des Tournelles présente un panorama de ce qui s’est fait en fer, des objets d’une grande qualité plastique mais qui avaient une fonction. On est dans le royaume des arts appliqués. A Vernon, dans de nombreuses oeuvres de l’expo Conan, c’est aussi du fer qui est employé, cette fois dans la seule intention d’exprimer. C’est le domaine de l’art.
Christophe Conan est un artiste animalier, c’est à ce titre qu’il expose au musée de Vernon, musée qui possède de belles collections sur le thème de l’animal.
On dirait que Conan n’en finit pas de s’étonner de l’étrangeté des animaux, la carapace épaisse du rhinocéros, les formes bizarres des poulpes, des calamars, des méduses… Il découpe le métal rouillé avec virtuosité pour donner à voir un banc de poissons de roche soudés si discrètement les uns aux autres qu’ils semblent défier la pesanteur. Il s’interroge avec humour sur les mécanismes qui régissent les mouvements des chiens. Ses cabots suggèrent que les meilleurs amis de l’homme sont équipés intérieurement de pièces articulées qui actionnent la queue, la patte ou la mâchoire.
Et nous, face à la complexité du monde animal, comment nous comportons-nous ? Nous essayons de classer, d’étiqueter, de mettre en boîte. Comme dans un muséum d’histoire naturelle l’artiste place ses oursins chacun dans une petite vitrine numérotée. Avec des vis, du fil de fer et des bouts de papier il invente des quantité de frelons qu’il range dans des casiers.
Il peint aussi, en sculpteur, avec des granulosités, des reliefs, et toujours cet air de ne pas se prendre trop au sérieux. Le spectateur se sent de connivence.
Le LRBA s’expose
Jusqu’à la fin du mois, le musée de Vernon présente une exposition consacrée au LRBA, qui fête ses 60 ans. Le Laboratoire de Recherche Balistique et Aéronautique, c’est l’un des gros employeurs de Vernon, une entreprise de haute technologie qui jouit d’une forte aura, au même titre que Safran, ex Snecma, ex SEP, sa voisine qui fabrique des moteurs de fusées.
Avant-guerre déjà, un certain Edgar Brandt (celui des machines à laver) s’était installé dans la forêt qui domine la ville et testait des missiles sur son terrain de tir.
Après-guerre, le site a accueilli un groupe d’ingénieurs allemands spécialisés dans l’aéronautique. L’aventure spatiale française commençait.
Aujourd’hui, le LRBA fait partie de la Direction Générale de l’Armement. Ses activités restent mystérieuses pour le grand public. J’étais donc ravie de son action de communication, et je suis allée voir cette exposition pleine de curiosité.
Comment dire ? J’ai vu à quoi ressemble un missile. L’expo met en avant la haute technologie qu’il renferme, en passant pudiquement sous silence son potentiel de destruction. J’ai vu des images d’archives de l’INA, des interviews des années 50 qui en disent autant sur l’évolution du journalisme et des médias que sur la conquête spatiale. J’ai vu des photos des premières fusées, celles qui étaient peintes en rouge et blanc comme dans Tintin. Mais je suis sortie frustrée de cette présentation des activités du laboratoire, qui semble conçue par des ingénieurs pour des spécialistes. Il manque quelques phrases cadres, des explications basiques, le rappel de ce qui semble certainement très évident aux professionnels, mais qui va mieux en le disant pour les Candide que nous sommes.
C’est le piège de toutes les expertises. Comment se mettre à la portée de tous, sans ennuyer ceux qui savent déjà, ni ceux qui ne savent pas ? Comment tendre un tabouret à ceux qui en sont au b-a ba d’un sujet, pour leur permettre de gravir la marche qui les sépare des personnes plus averties ? Finalement, ce que je retire de plus précieux de cette exposition, c’est cette interrogation.
Peinture orientaliste
Tout a commencé avec la campagne de Napoléon en Egypte. Tout à coup, l’Europe s’est piquée d’orientalisme, en art et en littérature.
Au milieu du 19e siècle, la colonisation de l’Algérie a ouvert les portes du Maghreb à une génération d’artistes qui n’avait fait qu’en rêver jusque là. C’est le choc d’une lumière éblouissante et d’une population préservée du modernisme qui fait rage en Europe.
Le musée de Vernon fait redécouvrir le courant orientaliste à travers une exposition qui se poursuit jusqu’au 29 octobre 2006.
Peintre officiel, boursiers ou artistes partis dans le sillage de Delacroix, ils ont à faire face aux mêmes difficultés : comment rendre les couleurs écrasées de soleil, comment trouver des modèles dans un pays musulman qui rejette la représentation de la figure humaine, comment aborder l’expression d’une culture très différente de celle de la métropole… L’exposition présente les réponses trouvées par les peintres contemporains de Monet à cette problématique.
De Monet, il n’est point question. On aurait aimé pourtant voir évoquée la période algérienne du maître de Giverny. Il est vrai qu’elle est difficile à documenter. Monet lui-même s’est employé à en effacer le souvenir.
Ce qu’on sait : en 1861, il est affecté au 1er régiment de chasseurs d’Afrique. Durée de l’engagement : sept ans ! Monet n’en effectuera que 18 mois, pour cause de typhoïde.
On a de lui un portrait en tenue de chasseur qui se trouve au musée Marmottan, peint par son ami Charles Lhuillier. Mais sa propre production durant son séjour algérien a disparu.
Dans une lettre à Geffroy, Monet parle d’aquarelles et de dessins faits en Algérie en 1862. Ils ne sont plus localisés aujourd’hui.
Sculptures en plein air
Elles sont arrivées au début de l’été, surprenant le regard : plus de trente sculptures monumentales ont soudain fleuri à Vernon, surgies des trottoirs et des espaces verts comme des champignons.
C’est petit, Vernon : 25 000 habitants, et un centre ville qui a gardé ses dimensions du Moyen-Âge. Alors imaginez tout-à-coup la densité de sculptures, réparties sur un parcours d’un kilomètre et demi !
Les oeuvres d’art sont là pour tout l’été. Elles ont été prêtées par les artistes dans le cadre d’une exposition, « l’Art vous regarde ».
Certaines sont accrochées dans des endroits insolites : un panier tressé est suspendu en plein ciel dans une rue, un poisson se balance sous le pont. Mais la plupart ornent des endroits faciles d’accès, jardins, rue piétonne, esplanades, cour du musée…
Un guide de visite est disponible gratuitement et en plusieurs langues à l’Office de Tourisme de Vernon. Il aide à aborder ces oeuvres d’art contemporain en explicitant quand c’est possible l’intention de l’artiste.
Avec ou sans explication, la promenade est un amusant jeu de piste, où chaque étape est une surprise qui séduit l’oeil par les lignes et les matières.
Les statues sont les bijoux d’une ville. Quand elles repartiront, elles laisseront un vide. Jusqu’aux décorations de Noël.
Pianos d’époque
Une exposition qui sort de l’ordinaire vient de s’ouvrir au musée de Vernon : jusqu’au 11 juin 2006, on peut y voir des pianos très anciens, fabriqués entre 1820 et 1850. Ils ont été sauvés de la destruction et patiemment restaurés par des particuliers.
Au début du 19e siècle, la forme du piano n’est pas encore figée. En sont témoins d’étonnants pianos carrés et même un piano de voyage.
Mais ce sont les pianos à queue Erard et Pleyel qui tiennent la vedette. Grâce à un cycle de concerts au musée, ils reprennent vie sous les doigts des pianistes.
Chopin jouait Pleyel, Liszt préférait Erard. Entendre leurs oeuvres sonner sur des pianos qui furent leurs contemporains est un plaisir rare.
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