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Les gestes barrières

Quand on sortira du confinement lundi prochain et qu’on reverra les collègues, il faudra penser à ne pas se faire la bise.
On s’efforcera de ne pas être trop tassés dans les transports en commun,
on mettra tous un masque pour ne pas éternuer à la ronde,
on gardera nos distances à l’entrée des magasins,
mais les salles de spectacles resteront fermées…

L’ancienne voie ferrée

C’est un chemin adorable et méconnu de Giverny : le tracé de l’ancienne voie ferrée parcourt encore le bas de la commune, séparé de la route par un épais rideau d’arbres.
On surplombe les champs comme d’un balcon, et la vue porte au loin.
Le chemin est agréablement ombragé et plein de chants d’oiseaux.
Pour éviter les crues de la Seine, la voie avait été construite sur un talus. Un pont franchit le Ru, le petit cours d’eau qui arrose le jardin de Monet.
A l’Est du village, la gare accueillait les voyageurs du temps des trains à vapeur. C’est maintenant une salle des fêtes.

La nouvelle star

Une très jolie plante à fleurs blanches en étoile a été introduite il y a peu dans les jardins de Monet. La reconnaissez-vous ? C’est de l’ail des ours, qui fleurit abondamment à l’état sauvage dans les vallées de l’Eure, et qu’on utilise de plus en plus en cuisine. (photo 01/05/19)

Sur la colline

Je crois que j’ai réveillé le cheval blanc. Il était allongé sur le flanc, la tête posée dans l’herbe. Le bruit de mes pas l’a tiré de son sommeil. Il s’est levé et s’est éloigné en me lançant cet oeil noir, un peu dépité d’être debout si tôt peut-être ?
Voici l’un des délicieux chemins qui traversent la colline au-dessus de Giverny. A 7h30, confinement ou pas, c’est le grand calme.
Mon sentier préféré est celui qui passe en haut de la vigne. Depuis un an, 6000 pieds de chardonnay s’alignent au-dessus de l’église. La parcelle se nomme « Les vignettes » depuis fort longtemps.
Les arbres fruitiers sont en fleurs, le colza bientôt. Le bâtiment au centre de l’image, c’est le moulin des Chennevières.
Le soleil se lève sur la vallée de l’Epte. La verrière du grand atelier de Monet émerge dans le vert. La mairie de Giverny garde un oeil sur la colline, les drapeaux pointés comme autant de lances.
Des peupliers, des lointains noyés de brume… On est dans le paysage de Claude Monet.

Les pivoines japonaises

Les pivoines arbustives offertes en 2018 à la Fondation Monet par le jardin japonais Yuushien à l’occasion de la célébration des 160 ans de relations diplomatiques entre la France et le Japon sont en fleurs à Giverny.
Elles sont plantées devant la maison, en harmonie avec les tulipes roses.
Tout près de là, en clin d’oeil, des tulipes-pivoines. (photo 2019)
Le côté spectaculaire des pivoines éclipse les floraisons alentour. (photo 2019)

Fleurs des villes

Le square Laniel à Vernon

Vous souvenez-vous avoir tracé un cercle avec un piquet et une ficelle ? C’est un peu ce qui nous arrive depuis que nous avons l’autorisation de nous promener dans la limite d’un kilomètre de notre résidence.

Notre laisse est courte, nous en apprécions davantage les merveilles à notre porte. Privée de mon Giverny quotidien, j’ai été éblouie par ce magnifique parterre imaginé par les jardiniers du service Espaces verts de Vernon. Tulipes rouges, jaunes et chamarrées d’orange, narcisses pour éclairer, et quelques touches bleues de muscaris, c’est merveilleusement frais. Quelques pâquerettes de la pelouse viennent même se mêler aux bulbes printaniers. Merci les jardiniers !

Giverny confiné

Le jardin de Monet dans sa splendeur d’avril

Pas un seul visiteur à Giverny pour admirer les somptueuses floraisons d’avril cette année. Les jardins de Monet resplendissent pour personne dans la belle lumière printanière. Seuls les jardiniers sont à l’oeuvre, presque au complet, mais sans l’aide des jeunes stagiaires qui renforcent habituellement l’équipe.

Personne, aussi loin qu’on regarde

Ils ne sont pas démotivés, parce qu’ils aiment trop leur métier, mais on les sent déçus. Tous leurs efforts visent à éblouir le public, au terme de longues réflexions et de beaucoup de travail. Ils savourent à l’avance la magie de ce qu’ils mettent en place, comme Monet autrefois savait le faire, avec son oeil de jardinier qui anticipait les floraisons. Le printemps a fait s’ouvrir les tulipes et les pensées patiemment installées pour le grand show, mais les portes sont restées fermées.

Le rond des dames attend les visiteurs

Il flotte sur Giverny confiné une étrange atmosphère. Comme ailleurs, chacun garde ses distances. Les volets de la maison de Monet sont toujours clos. Ce sentiment de vide qui au début nous émerveillait devant les images des places de Rome ou de Paris désertes est devenu opressant. Tout comme le silence peut être assourdissant, le désert humain de nos rues – et des allées du jardin – finit par peser.

Le jardin d’eau plus paisible que jamais

Les changements les plus visibles intervenus cet hiver dans le jardin concernent les arbres. Au rond des dames, un nouveau paulownia a été planté à la place de l’ancien, et sa taille encore modeste dégage une perspective inhabituelle. Au jardin d’eau, dans la rangée de trois saules, celui du milieu a été renouvelé. Au bout du bassin, le vieux saule planté par Monet a subi une taille sévère. Une nouvelle pelouse a été créée à la sortie du souterrain, au pied du grand cornouiller blanc.

D’autres surprises surgiront au fil de la saison, notamment parmi les rosiers. Les jardiniers seront-ils encore les seuls à les contempler ? Le printemps galope, en avance de quinze jours, tandis que la date du déconfinement s’éloigne, et plus encore celle de réouverture des musées.

Un rêve de Giverny

Le jardin d’eau de Claude Monet en mai

L’an dernier à cette date, les jardins de Monet étaient déjà ouverts depuis dix jours… La date d’ouverture a été repoussée au 1er mai, pour l’instant. Bien malin qui saurait dire si la liberté nous sera rendue d’ici-là.

Le printemps est en avance de quelques jours par rapport à l’an dernier, me semble-t-il. J’imagine l’explosion des narcisses et des jacinthes dans le clos normand désert. Les jardiniers avaient tout préparé, le jardin doit être splendide. Ils sont les seuls ou presque à profiter du fruit de leur travail.

« J’ai le spleen de Giverny, tout doit être si beau par ce temps inouï », se plaignait Monet retenu au loin par sa peinture. Pas un mot à changer.

Contagion

Berthe Morisot, Jeune fille au repos, 1888-1890, pointe sèche, National Gallery of Art Washington DC

Le 25 février 1888, Berthe Morisot, qui signe ses courriers Berthe Manet depuis qu’elle est l’épouse d’Eugène Manet, le frère de Gustave, adresse une lettre de trois pages à Alice Hoschedé, la compagne de Monet. Le peintre givernois séjourne alors à Antibes, et Alice, qui se rend de temps en temps à Paris, a tenté de rendre visite à Berthe mais l’a manquée.

« C’est d’autant plus mauvaise chance que voici 3 semaines que je suis retenue à la maison par un affreux rhume et qu’aujourd’hui, tout à fait exceptionnellement, j’étais dehors pour quelques instants seulement. (…) J’aurais bien voulu savoir si M. Monet travaillait beaucoup dans le Midi. Je crains qu’il n’ait bien mauvais temps. Sans reproches, il nous a laissé sa grippe à sa dernière visite, nous y avons tous passé depuis à tour de rôle, et nous la subissons en souvenir de lui » (…)

Berthe Morisot fait sans doute allusion à la visite de Monet du 7 janvier, attestée par un petit mot qu’il lui écrit avant de reprendre le train pour Vernon :

Chère Madame,
Toutes mes excuses de m’être présenté chez vous avec une si triste mise, et merci de l’excellente tisane que vous m’avez donnée ; grâce à elle et au repas, je peux repartir chez moi tout à fait remis.
Votre amicalement dévoué,
Claude Monet

Monet dit sans doute vrai, car il prépare aussitôt son départ pour la Côte d’Azur, où il arrive le vendredi 13. « Malgré la date fatale, je suis arrivé à bon port, » annonce-t-il avec humour à Alice depuis Cassis.

Mais la tisane miracle de Berthe n’a pas l’air de fonctionner quand c’est elle-même qui la prend. On l’imagine toussant et mouchant sans fin pendant des semaines… Fin février, Alice relaie bien entendu l’accusation pas très aimable de Berthe Morisot, et Monet se fend d’une lettre depuis Antibes, datée du 10 mars 1888 :

Chère Madame,
J’ai appris que vous aviez été malade et que peut-être j’en avais été la cause. Je serais bien heureux d’apprendre que tout le monde est bien à présent, mais je veux croire que le terrible hiver que vous avez eu est la vraie cause de cette vilaine grippe. (…)

Aussitôt, Berthe, sans doute radoucie par le retour de la santé, lui répond le 14 mars qu’il n’a pas à avoir de remords pour elle :

Le mauvais temps et les années sont seuls causes de mes maladies : je deviens une vieille dame à bronchite. Enfin, me voici de nouveau sur pied et en bataille réglée avec mes toiles. (…)

Rhume, grippe, bronchite… Mirbeau de son côté se plaint régulièrement d’influenza. Les correspondances d’artistes sont pleines de détails sur leur santé, et l’on voit que les maladies contagieuses ne les laissaient pas tranquilles.

Trop de vie sociale, sans doute… Cela aurait été plus sage de rester confiné dans un atelier…

Monet à l’Atelier des Lumières

L’atelier des Lumières, un spectacle immersif

L’Atelier des Lumières est logé dans une ancienne fonderie du 11e arrondissement de Paris, transformée en « centre d’art numérique ». Dans cet espace autrefois industriel, le spectateur est plongé dans des projections de tableaux sélectionnés autour d’un thème.

Le spectacle présenté en ce moment (jusqu’au 3 janvier 2021) propose des reproductions d’oeuvres de Monet, Renoir, Matisse, Signac, Dufy, Chagall… peintes sur les rives de la Méditerranée, mais aussi dans le nord de la France.

La mouvance des oeuvres, la mise en avant de détails, la musique, l’immersion dans la couleur contribuent au charme de l’expérience.

C’est très sympa pour tout le monde, y compris pour les bébés. Ils n’ont pas peur du tout, au contraire, ils sont, comme les adultes, totalement fascinés.

Je vous aime parce que vous êtes vous

Georges Clemenceau en visite chez Claude Monet à Giverny

Au 19e siècle, au début du 20e encore, les hommes osaient se dire leur amitié avec des mots forts. On est surpris aujourd’hui en lisant leurs correspondances de ces déclarations profondes, passionnées, tellement sincères.

Les mêmes mots dans la bouche ou sous la plume de nos contemporains seraient-ils possibles ? Il me semble que non. A notre époque où l’impudeur la plus grossière est de mise, cela ne se dit pas. La déclaration d’amitié serait prise pour de l’homosexualité. Notre époque fait une place aux gays, elle n’en fait plus aux amis qui dépassent le stade de bons copains. L’amitié féroce de Monet et Clemenceau existe certainement encore, mais elle n’a plus droit de cité.

Impossible de leur imaginer une attirance physique l’un pour l’autre. Ce qu’éprouvent Clemenceau et Monet n’est pas de ce registre. C’est un lien d’admiration réciproque, de confiance, de fraternité.

Et Clemenceau n’a pas peur des mots. Le 23 décembre 1899, en remerciement du tableau Le Bloc que lui a offert Monet, il glisse : « je voulais vous embrasser et vous dire une fois de plus que je vous aime. »
« Je vous aime, » encore, le 13 octobre 1921.

Et puis, le 22 avril 1922, Clemenceau écrit à Monet cette belle déclaration qui fait penser à Montaigne et La Boétie : « Je vous aime parce que vous êtes vous, et que vous m’avez appris à comprendre la lumière. Vous m’avez ainsi augmenté. Tout mon regret est de ne pas pouvoir vous le rendre. Peignez, peignez toujours, jusqu’à ce que la toile en crève. Mes yeux ont besoin de votre couleur et mon coeur est heureux. Je vous embrasse. « 

Epiphanie

Claude Monet, Vue prise à Rouelles, 1858 Collection particulière.
(W1 c’est-à-dire premier tableau de son catalogue raisonné)

Si vous aviez l’habitude d’utiliser le mot Epiphanie pour désigner la Fête des Rois et rien d’autre, vous avez peut-être remarqué que ce terme est devenu de plus en plus courant. Il est désormais très souvent employé comme un équivalent de révélation ou d’illumination. Bref, chaque fois que la vie nous offre une compréhension soudaine de quelque chose, même dans les circonstances les plus prosaïques.

Cet usage nous vient peut-être de l’influence de l’anglais, qui emploie epiphany de façon banale et à tout bout de champ. En français, le Larousse juge encore le terme littéraire.

Claude Monet, à la fin de sa vie, se souvient encore d’avoir connu une épiphanie. Il se garde bien d’employer ce mot, naturellement. Il dit : « ce fut tout à coup comme un voile qui se déchire. J’avais compris, j’avais saisi ce que pouvait être la peinture. »

Cette minute décisive dans la carrière de Monet, c’est à Eugène Boudin qu’il la doit. Ils se rencontrent au Havre. C’est l’été, Claude a 17 ans, le coup de crayon leste et pas grand chose à faire. Boudin l’invite à aller peindre sur le motif avec lui.

« J’achetai une boîte de peinture, dit Monet, et nous voilà partis pour Rouelles, sans grande conviction de ma part. Boudin installe son chevalet et se met au travail. Je le regarde avec quelque appréhension, je le regarde plus attentivement, et puis ce fut tout à coup comme un voile qui se déchire : j’avais compris, j’avais saisi ce que pouvait être la peinture ; par le seul exemple de cet artiste épris de son art et de son indépendance, ma destinée de peintre s’était ouverte. »

L’adolescent encore tout imprégné de l’académisme appris au lycée découvre, en regardant peindre Boudin, qu’on peut représenter les choses tout simplement telles qu’on les voit, avec leurs vraies couleurs. Une révélation.

Eugène Boudin, Paysage normand, vers 1857-1858 Marunuma Art Park, Asaka

Douceur givernoise

La tartelette aux figues du Coin du Pain’tre à Giverny

En ce début d’année, permettez-moi de vous offrir un peu de douceur avec cette jolie tartelette en forme de fleur faite avec amour par le boulanger-pâtissier de Giverny. La boulangerie, un ancien restaurant, est assez vaste pour qu’on puisse déguster les spécialités sur place, et celle-ci tient ses promesses !
Je vous souhaite de vous créer beaucoup de moments de douceur en cette année 2020, autour des fruits, des fleurs, des feuilles et des branches… Vive les merveilles de la nature !

Cher lecteur, ces textes et ces photos ne sont pas libres de droits.
Merci de respecter mon travail en ne les copiant pas sans mon accord.
Ariane.

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