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Dites-le avec des timbres
Il y avait le timbre en forme de coeur, décliné par les plus grands noms du graphisme ou de la mode, idéal pour affranchir les courriers tendres, un peu ironique pour régler les contraventions. Les Valentins et les Valentines d’aujourd’hui peuvent faire mieux encore : créer leurs propres timbres, en ligne, grâce au service de personnalisation proposé par la Poste.
J’ai été touchée de recevoir un faire-part de mariage orné du timbre ci-contre. Les amoureux ont choisi le pont japonais de Monet comme emblème à leur engagement, c’est une belle image, puisque le mariage unit deux familles, deux êtres qui se rencontrent à mi-chemin, au milieu du pont.
Je connais bien ce jeune couple-là, je me souviens de ce jour de printemps radieux à Giverny, où ils avaient mis spontanément un t-shirt de la même couleur. Rouge passion, au milieu de tout ce vert espoir.
A tous les couples, à toutes les amours naissantes, je souhaite une longue vie d’harmonie.
Et de planer un petit peu, au-dessus de la terre, au-dessus de l’eau.
Monet dans Secrets d’histoire
Stéphane Bern dans l’atelier de l’hôtel Baudy, photo France Télévision
France 2 diffusait hier un long documentaire sur Claude Monet, présenté par Stéphane Bern dans son magazine Secrets d’histoire. (Il n’est plus possible de le visionner en ligne, mais le CD est disponible).
L’émission est excellente, avec beaucoup de bons intervenants historiens d’art comme Philippe Piguet, Marianne Alphant, Pascal Bonafoux…
Et puis, magie de la télé, on entre partout : dans la maison de Monet à Vétheuil, dans les archives du marchand de tableaux Paul Durand-Ruel, dans la salle de l’actuel Office de Tourisme de Rouen d’où Monet a peint les Cathédrales, chez Clemenceau, dans la chambre de Monet à l’hôtel Danieli à Venise…
Les vues aériennes de Giverny, au-dessus du jardin ou de l’église, sont magnifiques. Le reportage a été tourné au printemps, à l’époque des tulipes et des juliennes, il offre de jolis plans du jardin.
Surtout, le documentaire est une mine d’informations, très vivantes, même si le format de Secrets d’histoire oblige à des impasses sur des pans entiers de la vie de Monet. Il faut bien faire des choix…
Je serai heureuse de connaître vos réactions sur cette émission.
Libres !
A l’écriture hésitante du tag placé n’importe comment sur les visages trop familiers de Stéphane Taponier et d’Hervé Ghesquière, on imagine que quelqu’un s’est penché depuis le balcon de l’hôtel de ville de Vernon pour bomber à l’envers le mot grisant : LIBRES !
En fait ce sont des enfants qui ont tagué l’affiche, au sol, avant qu’elle soit remise en place.
J’avais hâte, après l’annonce de la bonne nouvelle hier, de voir le changement s’opérer sur cette affiche trop vue. Ici, chez nous, dans notre petite ville de province.
A la libération d’Ingrid Bétancourt, la ville de Vernon s’était montrée très réactive. Cela n’a pas manqué cette fois-ci non plus. Le geste tenait de l’urgence : marquer la fin d’un calvaire.
Depuis dix-huit mois, comme mes collègues ailleurs en France, j’ai expliqué tant de fois le sens de cette affiche qui intrigue les visiteurs étrangers. Toujours, quelqu’ait été leur nationalité, les touristes se sont montrés désolés et compatissants. Ce matin enfin, sous un soleil radieux, est venu le moment de raconter le happy end. De lire ensemble le joli mot tremblé.
Les deux journalistes de France télévision avaient fini par faire partie de notre quotidien. A cause d’eux, partis pour nous informer, nous étions tous un peu otages. Un peu culpabilisés d’être libres, à chaque fin de journal télévisuel, à chaque passage devant la mairie. Grâce à leur libération, nous voilà libres aussi. La joie explose !
Si j’ai un voeu à faire, c’est que plus jamais une telle affiche ne vienne fleurir sur les mairies de France.
Non pas que j’imagine l’avènement soudain d’un monde où les prises d’otages n’existeraient plus. Comment ce moyen si commode de lever des fonds en faveur de mouvements de guerilla, procédé vieux comme le monde, pourrait-il disparaître ?
Ce n’est pas davantage de l’indifférence. En tant qu’ancienne journaliste – à ma modeste échelle -, en tant que femme, ou pour avoir vécu en Colombie, la détention d’Hervé Ghesquière et Stéphane Taponier, de Florence Aubenas, d’Ingrid Bétancourt m’est insupportable.
C’est plutôt qu’il y a des questions qui dérangent.
« A quoi ça sert, cette affiche ? » me demandent les étrangers. Je ne sais que répondre. Les intéressés ne la voient pas. Les ravisseurs non plus. Il est peu probable qu’elle ait une action quelconque pour faire avancer la libération des otages.
Ou alors, pas forcément dans le bon sens :
« La médiatisation fait monter les enchères dans les négociations », avancent les touristes. J’ai bien peur qu’ils aient raison.
Le débat s’amorce. Les façades de nos monuments doivent-elles vraiment servir de panneau d’affichage ? Les causes à défendre sont légion. Y en aurait-il de meilleures que d’autres, qui auraient droit au devant de la scène ? Politiquement correctes ?
Le débat, pour moi, c’est celui-ci : jusqu’à quel point peut-on nous imposer l’irruption de l’horreur du monde dans notre quotidien ? Avons-nous le droit à l’oubli ? Avons-nous le choix de préférer célébrer la beauté et l’harmonie, et de croire que c’est une façon qui en vaut une autre de faire avancer le monde ?
Si nous n’avons pas ce choix d’éteindre la télé, de refuser le spectacle de l’horreur, c’est nous qui devenons, à notre tour, prisonniers. Otages des otages.
Dans Marianne il y a Ariane
L’exposition Monet qui ouvrira ses portes dans moins d’un mois au Grand Palais suscite déjà des articles. Cette semaine, l’hebdomadaire Marianne consacre trois pages à la Monet mania, dans un reportage qui a conduit le journaliste Vincent Huguet à Monetland, comme il dit : comprenez Giverny.
Pour préparer son papier, Vincent Huguet a fureté sur la toile, et il est tombé sur Giverny News, où visiblement ma boutade gentiment ironique sur Carla Bruni l’a amusé.
Woody Allen (…) le 6 août dernier, est venu tourner une scène de son film chez Monet. Un épisode relaté avec un humour ravageur sur Giverny News (http://givernews.com), l’irrésistible blog tenu par Ariane Cauderlier, guide indépendante à Giverny qui épingle les excès du culte. Rappelant les 32 prises nécessaires auparavant, à Paris, pour filmer Carla Bruni « en train d’acheter une baguette de pain rue Mouffetard » (« Ça n’a l’air de rien, mais ce n’est pas si facile quand vous ne l’avez jamais fait. Un vrai rôle de composition. ») la bloggeuse aux nymphéas ajoute : « Heureusement, Madame Sarkozy n’est pas venue à Giverny. On aurait risqué d’avoir à fermer les jardins de Monet tout le week-end si ce perfectionniste de cinéaste lui avait demandé, disons, de jouer la belle jardinière et d’arroser un massif. »
Sympa, non ? Il est clair que chez Marianne, faire partie de la blogosphère, donc être une voix indépendante, originale et sincère vous fait d’emblée marquer des points.
Merci, monsieur Huguet, ce coup de projo, c’est très aimable à vous.
Mais, comment dire ? je ressens un léger malaise. Si les lecteurs de Marianne ont la curiosité de venir se promener par ici, alléchés par la citation, ils risquent bien d’être déçus de tomber sur des fleurs et des petits oiseaux.
Je ne donne pas dans le sarcasme politique, et à y réfléchir, celui-ci, je le regrette. Car pourquoi Woody Allen s’est-il « acharné » sur Carla Bruni, en lui faisant répéter sa prise 32 fois ? Pour le buzz ? C’est mesquin. Pour humilier notre première dame ? C’est bas. Non, je ne vois qu’une explication, puisque Carla débute il a voulu lui donner un cours de cinéma, patiemment, pour qu’elle soit la meilleure possible. Comme Monet, il a poussé le travail au maximum, jusqu’à ne plus pouvoir ajouter de force au tableau.
Et puis, faut-il le préciser, c’est de la pure fiction d’imaginer la Fondation Monet fermée pendant deux jours. Woody Allen a obtenu une privatisation d’une heure et demi, si je me rappelle bien, sur la moitié du jardin, en fin de journée, quand il n’y a de toutes façons plus personne ou presque : c’est déjà beaucoup. On a le sens du service public à Giverny, pas question de fermer inconsidérément les lieux aux visiteurs, fut-ce pour encourager la création artistique.
Quoi d’autre ? Je ne crois pas épingler les excès du culte. Si culte il y a, je crains fort, au contraire, d’en être l’une des modestes prêtresses, et tout à fait excessive. Un blog entier sur Giverny !
Enfin, ça fait toujours bizarre de se retrouver dans la presse, qu’elle soit écrite, radiophonique ou télévisuelle. J’en ai fait plusieurs fois l’expérience à des titres divers, je l’ai infligée autrefois aux personnes que j’ai interviewées, on se trouve soudainement face à une image de soi vue à travers le prisme de quelqu’un d’autre, qui opère des choix subjectifs.
Voyez la légende de l’illustration, par exemple. Un bonbon rose, moi, j’ai dit ça ? J’ai du mal à y croire, tant, dans le contexte de l’article, l’expression passe pour distanciée et un peu moqueuse.
Vérification faite, oui, bien sûr, c’est dans givernews. C’était à propos de la neige à Giverny, une métaphore filée. « Ici, tout juste un peu de sucre glace. La maison de Claude Monet en devient une confiserie géante, un énorme bonbon rose. «
C’était un regard tendre. Rose bonbon.
Woody Allen à Giverny
Midnight à Giverny
Rien de tel que le cinéma pour transformer un lieu en camp retranché. Woody Allen était en tournage à Giverny vendredi dernier : barrières, police, déviation, il fallait montrer patte blanche pour rentrer chez soi.
Chez Monet, le jardin d’eau était inaccessible en fin d’après-midi. Selon le quotidien Paris-Normandie, le réalisateur n’a passé que deux heures à Giverny. Une scène assez courte et assez facile sans doute, pour laquelle les acteurs aguerris qu’il a engagés n’ont pas eu besoin de s’y reprendre à 36 fois, j’imagine.
Non, j’exagère : 32 fois seulement. Vous avez suivi les exploits de Carla Bruni pour ses débuts au cinéma sous la direction de Woody ? Trente-deux prises pour acheter une baguette de pain rue Mouffetard ! Ça n’a l’air de rien, mais ce n’est pas si facile quand vous ne l’avez jamais fait. Un vrai rôle de composition.
Heureusement, Madame Sarkozy n’est pas venue à Giverny. On aurait risqué d’avoir à fermer les jardins de Monet tout le week-end si ce perfectionniste de cinéaste lui avait demandé, disons, de jouer la belle jardinière et d’arroser un massif.
Évidemment, j’irai voir Midnight in Paris quand il sortira. Comme beaucoup de Français, Woody Allen est l’un de mes réalisateurs préférés. Bien que je ne sois pas certaine qu’il brosse un tableau très flatteur de notre capitale. Le réalisateur new-yorkais est tellement sûr de son public en France qu’il se permet des remarques un peu aigres-douces, bien faites pour plaire aux Américains. Qui aime bien châtie bien, n’est-ce pas.
En ce qui concerne Giverny, Woody est un habitué des lieux, m’a-t-on confié. C’est certainement un plus qu’il associe les jardins de Monet à un film sur Paris. Qu’il en dise du bien ou du mal, ce sera toujours une irremplaçable publicité.
Un bouquet de nymphéas
Combien de temps nous reste-t-il à vivre ? Comment allons-nous employer ce temps-là ?
Il y a cent ans, en 1910, Monet était dans sa 70e année. Il avait une immense carrière derrière lui, et pourtant il lui restait à peindre ses plus grands chefs d’oeuvre, le cycle des Nymphéas. S’en doutait-il, alors qu’en mars il se lamentait au bord de son bassin dévasté par la crue de la Seine ?
L’étang aux nymphéas est un lieu propice à la méditation, métaphore de la vie et de l’apparence des choses. Il me manque, aujourd’hui où je suis allée accompagner une vieille dame dans son dernier voyage.
Elle s’appelait Simone. Douce, discrète, aimante. Nos roses faisaient un horrible bruit sourd en tombant sur le cercueil.
Au même instant, ou presque, une autre Simone entrait sous la coupole. Forte, ardente. La sixième académicienne, en lutte pour les femmes jusqu’au bout.
Peut-être qu’on lui a offert des roses, à cette occasion. Que lui reste-t-il à accomplir, elle qui a déjà tant oeuvré ?
Il y a des questions qui n’ont de réponses que dans les profondeurs du bassin où se mire le saule agité par le vent.
A tous ceux qui trouvent qu’il y a des jours plus difficiles à passer que d’autres, et que celui-ci en était un, permettez-moi d’offrir, par la présente, un bouquet de nymphéas.
Depardieu sera Monet
Rencontre de deux monstres : Gérard Depardieu interprétera Claude Monet dans un film dont le tournage est prévu pour le printemps 2010.
Je brûle déjà de voir comment Depardieu incarnera le peintre. L’aspect bourru et enflammé lui va bien, il a tout le charisme nécessaire, et n’aura pas à composer pour jouer les amateurs de bonne chère !
La réalisatrice de ce biografilm est Chantal Picault. Ce sera intéressant de voir comment elle va condenser la longue vie de Monet, quels évènements elle va mettre en avant, lesquels seront passés sous silence. Comment donnera-t-elle du rythme à l’histoire ? Quelle sera l’image de Monet porté à l’écran ? L’analyse subjective du personnage ?
Un indice, d’ores et déjà : Depardieu ne vient pas seul, le casting propose d’autres stars telles que Michel Galabru dans le rôle de Georges Clemenceau et Sandrine Bonnaire dans celui de Blanche Hoschedé-Monet.
On ne sait pas encore qui jouera Camille, Alice, ou Durand-Ruel… Mais on peut imaginer que l’aspect people de Monet sera mis en avant avec ce choix d’une star pour interpréter l’ami le plus illustre du peintre. Et il faudra bien un peu de glamour aussi. A ce titre la dévotion de Blanche à l’égard de son beau-père ne manque pas de passion, mais sans doute de chair. La femme de sa vie, c’est Alice.
Bref ! Un grand film sur Monet, c’est merveilleux, et tous les guides qui traitent de l’impressionnisme vont se précipiter pour le voir dès sa sortie. Parce que les clients nous en parleront, et parce que notre travail s’en rapproche. En guidage aussi, il s’agit de donner en deux heures une certaine idée de Claude Monet.
Giverny sur Télématin
Aifelle a la gentillesse de me signaler que la maison et les jardins de Monet ont fait l’objet d’un reportage aujourd’hui dans Télématin. Si comme moi vous avez raté le magazine, la séance de rattrapage est ici en fin d’émission. Placez le curseur sur 1h45.
Le reportage est assez bien fait pour atteindre son but, donner envie de venir à Giverny, et c’est là l’essentiel.
L’enthousiasme de Damien Thévenot n’y est sans doute pas pour rien. Il a le ton et presque le timbre de Nicolas Hulot, et un sourire à faire de la pub pour du dentifrice.
On voit l’intérieur de la maison avec un enchaînement entre les photos d’époque et les vues d’aujourd’hui, le jardin de fleurs, le jardin d’eau… Avec des trouvailles très cinéma, les volets qui s’ouvrent, le reflet de la porte dans le miroir, le soleil qui joue à travers les feuilles : pas facile de filmer du mouvement dans un lieu conçu comme un tableau.
Gilbert Vahé, le chef-jardinier, est interviewé. Dommage de l’interroger sur la vie de Monet, même s’il la connaît très bien, alors qu’il est un très grand professionnel avec une profonde sensibilité artistique, et la mémoire vivante de la restauration des jardins.
Passons sur l’envahissante bande sonore. Le plus étrange, c’est le choix des tableaux pour illustrer ce reportage. Impression, Soleil levant (Le Havre), les Glaçons et le Jardin de l’artiste (Vétheuil), le Déjeuner, la Liseuse (Argenteuil)… Les seuls tableaux faits à Giverny sont deux Nymphéas et un pont japonais. Il y avait pourtant le choix entre près de 500 toiles !
Évidemment, j’ai remarqué quelques inexactitudes, elles sont inévitables, mais des dates fausses par-ci par-là, qu’est-ce que ça peut faire ? Des bêtises, on en dit tous.
C’est la rançon du rythme de la télé, pas le temps de tout vérifier. Il en découle forcément de la banalité et de la superficialité, mais comme il faut faire court, ce n’est pas bien grave.
C’est précisément ce qui capte mon attention. Ce sujet que je connais trop bien, qu’en retient l’oeil neuf d’un journaliste qui le découvre ? Comment résumer Giverny en quelques mots, sans omettre ce qui paraît trop évident ? Qu’ajouter aux images ?
Choisis son camp
J’aime bien les pochoirs sur les murs des villes. A force d’avoir des oreilles ceux-ci méritent bien une voix, et les dessins au pochoir leur offrent ce moyen d’expression qui leur manquait.
La grande qualité graphique de ces peintures leur donne un impact incroyable. J’ai photographié ce mur à Montmartre il y a deux ans, mais il est d’une brûlante actualité.
4 novembre ! Ce soir ce n’est pas Big Brother qui nous regarde, je veux dire pas plus que d’habitude, c’est le monde entier qui a les yeux fixés sur le grand frère d’Amérique. Quelle sera la couleur du prochain président des Etats-Unis ? Les urnes vont-elles confirmer les sondages ou réserver une surprise ? De quel côté penchera la balance, celui des porteurs d’arme ou celui de la résistance à la guerre ?
Le mur a son idée. Il la chuchote en légende à l’image de Jean Moulin : choisis son camp ! Et si le conseil se répétait de mur en mur jusqu’aux isoloirs… Réponse demain.
Ingrid libre !
Quelques heures à peine après l’annonce de la libération d’Ingrid Bétancourt en Colombie, une nouvelle affiche flotte déjà sur la façade de la mairie de Vernon.
Depuis des mois, c’était l’image poignante de l’otage au regard abattu qui interpellait les passants.
Avec une réactivité extraordinaire, voici le sourire d’Ingrid. La ville de Vernon a coiffé sur le poteau la municipalité de Paris, qui s’est contentée de rajouter le mot « libre ».
Mais le message reste toujours aussi sibyllin pour qui n’est pas au courant des affaires franco-colombiennes. Les touristes étrangers s’interrogeaient sur la première affiche. La nouvelle, plus souriante, va les laisser guère moins perplexes.
Derrière le buisson
Comment ça se traduirait, Bush, en français ? Buisson, sans doute, ou encore broussailles, taillis, fourré. Il y a aussi cette expression géniale de hair bush, une tignasse. J’espère que cette photo prise dans un angle du jardin fleuri de Monet est assez évocatrice d’un bush. Ce qui est sûr, c’est que Monet ne cherchait pas à faire un jardin bien peigné.
J’aurais pu vous parler plus tôt de la visite de la First Lady à Giverny. Mais pour une fois que mon petit sujet de blog rejoint l’actualité journalistique, ça coince, plus envie de parler de news, malgré ce titre de Giverny News choisi il y a très longtemps.
Samedi dernier j’ai croisé à Vernon tout un cortège de voitures officielles emmenées par des motards, et il m’a fait perdre le feu vert. Mon sentiment égalitaire s’agace de ce genre de choses. Les VIP sont-ils vraiment si pressés ?
Qu’est-ce que c’est que ces huiles, me suis-je demandé. Ils vont sûrement à Giverny.
Une heure et demi plus tard, le cortège est repassé dans l’autre sens, alors que je me rendais à mon tour à la Fondation Monet. C’est là que j’ai appris l’identité de la personnalité. Madame Bush soi-même ! Elle est venue (presque) toute seule, elle faisait du tourisme pendant que son petit mari faisait de la politique à Paris, chacun son truc.
Personne ne la reconnaît en France, elle pourrait profiter de cette impression grisante d’incognito, mais c’est bien trop dangereux puisque ses ennemis éventuels la connaissent, eux, quel que soit l’endroit où elle se trouve.
C’est le poids de la haine, tout ce déploiement de force. Laura Bush ne se déplace pas sans une bonne escorte. Ses gardes du corps sont essentiellement des femmes, d’ailleurs.
Madame Bush est efficace. En une heure et demie, elle a réussi à voir à la fois le musée d’art américain et le musée Monet. Elle s’est beaucoup intéressée aux expositions de peintures présentées dans le premier, car elle a retrouvé des noms d’artistes qu’elle connaissait pour avoir déjà vu des toiles d’eux à la Maison Blanche. Ça doit faire un peu le même effet qu’à la brocante quand on reconnaît le service à thé de sa grand-mère, j’imagine.
Après 45 minutes devant les tableaux, Madame Bush n’a pas traîné chez Monet. Dans la maison, elle a zappé les chambres à l’étage, elle n’a vu que le rez-de-chaussée. Tant pis pour la vue sur le jardin.
Et pas le temps d’aller regarder de près ce qui se cache derrière les buissons.
La grand messe du sport
Impossible de bloguer tranquillement pendant le match d’hier soir. L’équipe de France a offert un tel festival d’essais au public toulousain face à la Namibie que j’ai fini par me laisser convaincre de regarder moi aussi, malgré mon ignorance en matière de rugby.
Ne rien comprendre aux règles d’un sport incite à un regard différent, qui se porte sur les apparences plutôt que sur la qualité de jeu. Une sorte de regard oblique, comme un essai transformé.
De Chabal, j’avais entendu des descriptions aussi admiratives que peu flatteuses. J’ai été frappée par son visage d’apôtre. Plus exactement, il m’a fait penser au Saint-Christophe de Verneuil. Porter le ballon pendant la Coupe du Monde, n’est-ce pas un peu porter tout le poids du monde ? Chabal a l’air d’être descendu de quelque pilier de cathédrale pour s’animer soudainement sur une pelouse, avec une énergie surhumaine.
L’énergie, c’est cela qui m’a impressionnée aussi ; je ne sais pas si, comme on le dit, les rugbymen sont des gentlemen. En tout cas ils jettent dans la lutte toutes leurs forces et tous leurs muscles, ce qui n’est pas peu dire. Il y avait quelque chose de la corrida dans leurs charges déterminées.
On dirait que cette énergie est communicative, qu’il en passe dans le public. Bien sûr il y a l’enjeu du jeu, mais tout aussi sûrement l’effet du rassemblement de dizaines de milliers de personnes autour d’un spectacle de joutes physiques. On doit ressortir galvanisé, j’imagine.
Et dans cette grand messe du sport, on chante. Le stadium résonnait des cuivres des bandas, de la Marseillaise entonnée par des cohortes de supporters, toute une foule qui se levait en houle pour de puissantes olas.
Ce sont les prières ferventes de notre temps, ce désir de victoire porté par toute une nation.
Le V de la victoire
« La victoire de la Liberté », c’est le nom de cette sculpture de Dali qu’on peut voir au château de Vascoeuil. Cette statue de la Liberté qui lève les deux bras m’a parue parfaite pour illustrer l’élection de Nicolas Sarkozy à la Présidence de la République, lui qui tourne si volontiers son regard vers les Etats-Unis. Si cela avait été Ségolène Royal, la rose rouge était prête aussi. Il me reste des réflexes de journaliste, l’anticipation et la neutralité.
Je suis frappée par la ferveur des partisans de l’un ou l’autre camp. Au-delà des divergences d’opinion, ils sont semblables, anxieux du résultat, massés avec les mêmes drapeaux, les mêmes ballons, le même slogan « les jeunes avec xxx ». Tout cet affect investi, toutes ces énergies tendues vers le même but, la victoire électorale, et ce mot sacré, le changement.
La France change de Président, le nouveau est du même bord que l’ancien, est-ce vraiment la victoire du changement ? Sommes-nous à l’aube de temps nouveaux ? Ils ont tous l’air de tellement le croire, tous ces jeunes qui jubilent de voir leur candidat élu. Je les envie. J’envie même ceux qui pleurent ce soir, qui pensent que tout aurait été tellement mieux avec Ségolène. De cohabitation en alternance, j’ai perdu leur fraîcheur de sentiment.
Il reste au candidat à entrer dans la fonction. Le virtuel va se confronter au réel, les projets sont appelés à devenir des actions. Les illusions d’un monde meilleur vont se heurter à la difficulté de gouverner la France.
Dans cinq ans on fera le bilan du quinquennat de Nicolas Sarkozy. On saura alors quelles auront été ses victoires et ses échecs, puisqu’il y aura des deux, forcément. On saura si la Liberté avait de bonnes raisons de lever les deux bras, ou si elle aurait mieux fait de les garder baissés.
On saura si sa promesse à propos d’Ingrid Bétancourt, par exemple, aura été suivie d’effet.
Défense d’afficher
Nous vivons une époque vertueuse.
C’est la dernière ligne droite de la campagne électorale. La tension monte, chaque camp fourbit ses armes. La ville exprime-t-elle quelque chose de cette effervescence ?
Non. Les murs sont sages comme jamais. Pas un tag plus haut que l’autre, pas une affiche qui dépasse. C’est le nouvel ordre écologique.
N’allez pas croire que je le déplore. Bien sûr, je me réjouis que la discipline règne, que l’affichage se limite aux panneaux disposés devant les écoles. Mais quelle différence avec les premières campagnes dont je me souvienne.
Chaque arbre dans la ville servait à placarder des noms. C’était une explosion, un matraquage de communication intempestive qui avait l’énergie qu’on attribue aux porteurs d’espoir.
Aujourd’hui les arbres sont bien tranquilles. Ce sont eux qui se penchent vers les murs nus. Ils s’y étalent de toute leur ombre, un brin goguenards.
Le Mont Saint-Michel entre dans la campagne
Voilà le Mont Saint-Michel propulsé dans la campagne électorale. Ce matin, Nicolas Sarkozy s’y est rendu pour sa première visite en tant que candidat officiel de l’UMP à l’élection présidentielle. Parce que c’est le « symbole du patrimoine français », de « la France éternelle », « des atouts de la France ».
Ce n’est pas la première fois que le Mont profile sa silhouette dans une campagne électorale. Il avait eu la visite de Jacques Chirac en 2002. Va-t-il devenir un passage obligé ?
Pourquoi le taire ? Cela m’agace. Ce n’est pas une question de candidat. Mais l’idée d’une utilisation, d’une récupération du Mont à des fins politiques, ne passe pas. Qu’avait Sarkozy de si essentiel à dire ce matin qui ne put être dit ailleurs ?
Certes, le Mont a toujours été partie prenante de l’Histoire de France. Certes, il s’est plié à tout, avec bonne grâce, après les nuées de pèlerins il a accepté les soldats, les prisonniers, les ouvriers, les touristes. Mais c’est un lieu qui mérite mieux que de servir d’estrade. De décor hors du commun, comme la Grande Muraille de Chine, pour offrir un fond aux caméras.
C’est un endroit pour entrer en soi-même, pour se créer un espace de solitude au milieu de la foule, pour méditer. Exactement l’inverse d’une déclaration politique devant des dizaines de journalistes.
11 septembre
Il y a des instants où personne ne peut plus ignorer l’histoire en marche. Le brouhaha habituel du monde comme il va devient soudain un hurlement, tirant les jardiniers de leur jardin, les peintres de leur atelier. Ce sont des secondes où quelque chose bascule.
Chacun se souvient de la façon dont la tragédie du 11 septembre s’est imposée à lui. Cette radieuse journée de fin d’été, comme aujourd’hui, il y a cinq ans. Et puis, au détour des gestes du quotidien, cette violence impensable qui nous a percés au coeur.
Est-ce que nous mesurions, avant, la force de la haine ? Est-ce que nous soupçonnions qu’elle pouvait aller jusqu’à cette rage de tuer et de mourir, en mettant la mort en scène comme un spectacle à sensation ?
Ici, en France, beaucoup d’aspects de ce drame nous restent étrangers. L’architecture en est un. Nous ne comprenons pas ces tours inhumainement hautes, d’où l’on ne peut pas descendre à pied. Mais Madrid, depuis, nous a montré que l’absence de tours ne nous mettait pas à l’abri de l’assassinat collectif.
Giverny est terre américaine depuis plusieurs générations. Le musée d’art américain perpétue la présence des quelque cent artistes qui ont séjourné dans la colonie au tournant du 20e siècle. Tout le monde côtoie des Américains. Le 11 septembre nous a bouleversés comme un évènement personnel. Je me souviens des drapeaux en berne, des cloches sonnant le glas, de la prière collective à l’église, des minutes de silence…
Tout à l’heure j’ai levé les yeux vers le ciel pour regarder les avions voler, paisibles, droit vers l’ouest. Les nuages avaient la forme d’ailes d’anges.
Le passage du Tour de France
Ce rendez-vous en pleine campagne à la mi-journée, cette hâte pour ne pas manquer l’heure de l’évènement rappelaient l’éclipse de 1999. Mais cette fois, pas besoin de guetter les nuages. D’ailleurs, il faisait beau.
Deux heures avant l’arrivée de la course, une bonne centaine de personnes se trouvait ce matin au point de passage du Tour de France le plus proche de Vernon, à l’endroit où les coureurs venant des Thilliers en Vexin piqueraient à angle droit vers Guitry, après une ligne droite de 4 km.
Pourquoi une telle anticipation ? Pour ne pas rater la caravane publicitaire ! On peut juger de l’importance de l’évènement sportif aux moyens publicitaires qu’il mobilise. La Grande Boucle est une grosse affaire. Elle est susceptible de véhiculer l’image d’une foule de marques grand public dans des domaines variés, supermarché, horlogerie, produits alimentaires, électroménager, banque, assurance, prêt-à-porter, presse, téléphone, jeux…
Les voitures sérigraphiées sont passées les unes derrière les autres, lançant dans la foule des casquettes, des rustines et des porte-clés. Autrefois on jetait ainsi des dragées ou des pièces de monnaie à la sortie des cérémonies, et les enfants couraient pour les ramasser. Les spectateurs qui arrivaient à saisir au vol un couvre-chef ressentaient une joie d’enfant, celle du bambin qui a attrapé le pompon du manège.
Après les distributions gratuites sont venues les ventes d’objets officiels « qu’on ne trouve nulle part ailleurs ». Discours bien rodé pour couper court aux hésitations : « c’est maintenant ou jamais, dépêchez-vous on repart ».
Longue attente, tandis que le ciel se couvre.
On en aurait presque oublié qu’on venait voir du sport. Tout à coup, une voix dans un haut-parleur annonce une échappée du Français Samuel Dumoulin et de l’Allemand Bjorn Schroeder. Les yeux scrutent le bout de la ligne droite, les gendarmes sortent leurs jumelles. Ca y est, voilà les échappés le nez dans le guidon. Juste le temps de les apercevoir, ils sont passés.
C’est le moment qu’a choisi le nuage qui s’était subrepticement glissé au-dessus de nos têtes pour éclater. Le peloton qui suivait à deux ou trois minutes a pris le temps d’enfiler les vêtements de pluie, tandis qu’au-dessus des têtes des spectateurs les parapluies aux couleurs du Tour s’ouvraient en grosses corolles jaunes.
A peine le temps d’applaudir, de crier des encouragements. Après une aussi longue attente, les 170 coureurs ont filé en quelques secondes. Il ne reste plus qu’à suivre la fin de l’étape à la maison, à la télé. C’est encore là qu’on voit le mieux les cyclistes.
Tour de France
Le Tour de France va passer tout près de Giverny demain, à une quinzaine de kilomètres au nord. Difficile de l’ignorer : la route de Vernon à Giverny sert de déviation à la circulation routière, elle porte les panneaux jaunes depuis plusieurs jours déjà.
L’étape Beauvais-Caen, une très longue étape de 225 km, emmène les coureurs de la Grande Boucle dans l’Eure, de Gisors à Cormeilles.
Le peloton traversera Les Andelys et franchira la Seine au pied de Château-Gaillard. Un sprint est même prévu dans l’artère principale de la ville. L’épreuve est dédiée à Christophe Marchix, un cycliste mortellement blessé à cet endroit en 1995.
L’espace d’un jour, les habitants des Andelys vont donc faire l’expérience d’une ville coupée en deux. Le passage qu’emprunteront les coureurs s’annonce aussi infranchissable que le mur de Berlin, de 9h15 à 15h. Les Andelysiens sont invités à prévoir leurs déplacements en conséquence. Et pas la peine de grogner en incriminant la mairie, les élus n’y sont pour rien, on ne leur a pas demandé leur avis. Sage précaution.
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