Mont Saint Michel
Avec plus d’un million d’entrées payantes par an, le Mont Saint-Michel est le site culturel le plus visité de Normandie. La merveille de l’Abbaye se classe au 9eme rang national. (source ODIT France)
Le Mont St-Michel enregistre un surcroît de visiteurs aux périodes de grandes marées, comme c’est le cas en ce moment. Le spectacle de la marée montante, du Mont redevenu île, rendent la visite encore plus inoubliable.
C’est au Mont-Saint-Michel qu’on peut observer les plus grandes marées de l’Europe continentale : la mer se retire à 18 km des côtes et remonte avec une vitesse de plus en plus rapide. Pour bien voir les flots arriver « à la vitesse d’un cheval au galop », il faut se trouver au Mont-Saint-Michel deux heures avant la marée haute.
Mais bien sûr on vient surtout au mont Saint Michel pour l’abbaye, centre de pèlerinage depuis des siècles. Toute l’année, on visite ce chef d’oeuvre d’architecture normande. A voir aussi, le musée de cire (musée Grévin) au pied de l’abbaye, l’archéoscope, spectacle multimédia sur l’histoire du Mont, le Musée Maritime, le Logis Tiphaine, dans la maison de Du Guesclin (1320 -1380), les défenses avancées du bourg, la grande-rue, les remparts, et les jardins de l’abbaye. Enfin, pour découvrir le Mont différemment, des promenades nocturnes sont proposées par la Caisse Nationale des Monuments Historiques et des Sites.
Banc taillé dans un tronc
Voici un banc qui ne se trouve pas dans le commerce, mais qui semble assez simple à réaliser, pour peu que l’on ait la matière première et quelque talent de bûcheron.
On coupe les racines, le faîte, puis on évide délicatement la partie médiane, tout en prenant soin de ménager des accoudoirs et un dosseret. Il ne reste plus qu’à caler le banc sur un socle de ciment, et à traiter le bois contre les parasites et l’humidité.
Ce banc trouve sa place avec naturel dans un coin un peu sauvage du jardin. Celui-ci a été photographié en Normandie dans le parc du château de Vascoeuil, réputé pour son musée de sculptures contemporaines en plein air.
Poire
On peine aujourd’hui à imaginer quelle passion animait nos aïeux pour les poires : comptées, convoitées, comme l’a mis en scène la Comtesse de Ségur.
Au château de la Roche-Guyon, un document daté de 1741 fait l’inventaire des variétés d’arbres fruitiers cultivées dans le potager du château. Celui-ci recense la bagatelle de 675 arbres, dont 442 poiriers. Le reste du contingent se compose de pommiers, de pêchers et de pruniers.
A en croire le document sur le potager de la Roche-Guyon, on avait là une véritable collection de fruitiers, sorte de conservatoire des espèces avant l’heure. Les poiriers se partageaient en 14 variétés, les plus nombreuses portant les noms de « crazane, Colmar, beuré, Saint-Germain et Ambrete ».
La culture des poires se poursuit dans la région. En octobre, la récolte bat son plein. C’est le moment de déguster celles qui ne se garderont pas et qui garnissent en ce moment les étals des marchés.
Jardin à la française
Devant le château d’Auvers, qui domine la petite cité de l’Oise, s’étend un jardin à la française. D’autant plus travaillé qu’il est de dimension modeste, on y retrouve les principales caractéristiques des jardins du 17e siècle.
On peut s’amuser à les repérer : la création d’une perspective dans l’axe des appartements du château, sur une terrasse, le dessin géométrique et symétrique des allées, les banquettes de buis taillés qui entourent les parterres de broderies – ici de somptueuses arabesques -, la présence de jets d’eau et de fontaines, l’escalier monumental qui conduit à un deuxième jardin en contrebas…
Cette partie du parc est en accès libre.
Ce n’est pas le seul intérêt du château d’Auvers sur Oise : à l’intérieur, il propose un parcours didactique sur la vie au temps des Impressionnistes, sous forme de diaporamas. De salle en salle, la reconstitution d’un décor fin 19e permet de se plonger dans l’ambiance des cabarets, des premiers chemins de fer, des bains de mer… L’aspect carton-pâte est tempéré par la présentation d’objets d’époque dans les vitrines. Au final, la visite est intéressante même pour ceux qui trouvent les musées rébarbatifs, mais l’entrée reste un peu chère (environ 10 euros).
Escargot
Il suffit que le temps soit humide, même s’il ne pleut pas, et voilà tous les escargots de sortie.
L’escargot est un ambitieux. Ce mollusque, conçu pour vivre au ras du sol, a le goût des cimes. Il grimpe, poussivement certes, mais il grimpe. Il colonise les pommiers.
Condamné à l’immobilisme les trois quarts du temps, il doit soupirer d’aise quand l’hygrométrie remonte. Voici venu le temps de se dégourdir le muscle et de se remplir la panse.
Dans le jardin de Claude Monet à Giverny, j’ai surpris celui-ci dans une position délicate, en équilibre sur une pivoine arbustive. Le poids de sa coquille va-t-il l’emporter et le faire dégringoler jusqu’à la case départ, tout au fond de cette jungle ? Comment va-t-il se tirer de ce mauvais pas ? Va-t-il glisser jusqu’au bas de la feuille pour passer sur celle d’en dessous, ou bien faire demi-tour vers la tige de la plante ?
Je n’ai pas eu la divine patience d’un escargot pour attendre le dénouement. Mais en capturant son image, je me suis demandée s’il y avait une conscience dans cette petite bête-là, une forme primitive de pensée. Vraiment, je me le demande.
Monet et Daubigny
Admiration réciproque, amitié un peu lointaine : la vie de Claude Monet croise à plusieurs reprises celle de Charles-François Daubigny, le grand peintre de l’école de Barbizon qui est son aîné de 23 ans.
La première fois, c’est sous la forme d’une anecdote charmante que rapporte Marianne Alphant. Dans l’atelier de sa tante Lecadre, le jeune Monet est attiré par un petit tableau représentant des vendanges. A force d’insistance, il obtient de sa tante qu’elle le lui donne.
« Je débarbouillai la toile et je m’aperçus qu’elle était signée Daubigny. Ma joie fut grande, non pas de posséder une oeuvre d’un peintre déjà célèbre, mais d’avoir remarqué, découvert seul une toile de maître. C’était un certificat pour mon oeil. »
Il vendra la petite toile quelques années plus tard pour faire la fête avec des camarades, non sans l’avoir fait authentifier par le maître.
La deuxième rencontre, providentielle, a lieu à Londres où Monet se réfugie pendant la guerre de 1870. Il a retrouvé Pissarro, mais tous deux sont bien près de mourir de faim : les Anglais n’aiment pas leur peinture. Daubigny, rencontré dans un café, les introduit alors auprès du marchand de tableaux Paul Durand-Ruel.
Daubigny a l’oeil tout aussi affûté que Monet. Il a repéré tout de suite le talent de son cadet. « Voilà un jeune homme qui sera plus fort que nous tous », dit-il en le présentant à Durand-Ruel. Un éloge d’une remarquable clairvoyance.
Anémone du Japon
L’anémone du Japon est la princesse de l’automne. Des pétales veloutés d’un rose nacré, doux comme de la soie, entourent sa couronne touffue d’étamines jaune d’or.
Les fleurs se balancent gracieusement au bout d’une longue tige. Très nombreuses, elles forment un nuage coloré mis en valeur par le vert dense du feuillage. Il en existe une variété blanche, tout aussi belle.
L’Anémone du Japon est la providence des jardiniers débutants. Elle pousse de très bonne grâce sans entretien, et ne demande qu’à être rabattue après la floraison. Généreuse en jeunes plants, elle permet de constituer des allées entières, ou d’opérer de fructueux échanges avec ses amis.
Monet à Venise
Aller ou ne pas aller à Venise ? Pendant tout le mois de septembre 1908, Claude Monet se pose la question.
Alice et lui sont invités par une amie anglaise, Mary Hunter, qui dispose du palais Barbaro, sur le Grand Canal. L’occasion est belle, à 68 ans, de découvrir enfin Venise.
Mais jusqu’à la dernière minute, Monet tergiverse, et Alice tremble, elle qui rêve depuis toujours de ce voyage avec lui.
Enfin, le 29 septembre, ils quittent Giverny pour la Gare Saint-Lazare, où ils dorment à l’hôtel Terminus. Le 30 au soir, ils prennent le train de nuit à Paris, et le 1er octobre, après s’être levés à l’aube pour découvrir les paysages traversés par le train, ils arrivent dans la célèbre lagune.
Monet et son épouse prévoient d’y rester un mois, mais le peintre va bientôt être si absorbé par la peinture que le départ sera sans cesse repoussé. Rentrer ou ne pas rentrer à Giverny ?
Cul-de-lampe
Dans le cloître du musée de l’Evêché à Evreux, à la base de deux croisées d’ogives, ce petit diablotin amuse ou effraie les passants depuis des siècles.
Il semble porter le poids de la voûte sur son dos, en raison de sa position en cul-de lampe. On nomme ainsi cet élément du décor des églises gothiques qui affectait, à l’origine, la forme du bas d’une lampe d’église, forme que l’on devine encore derrière le diablotin.
Souvent, ces éléments cousins des chapiteaux sont prétextes à enrichir le décor par une sculpture expressive.
Celle-ci ne fait pas mystère de sa nature diabolique. Ailes façon chauve-souris, oreilles pointues, visage grimaçant, yeux étirés… Cet ange malfaisant paraît prêt à nous sauter dessus – s’il n’était en pierre ! Et c’est peut-être parce qu’il est tout de même un peu effrayant que quelqu’un, il y a sans doute bien longtemps, lui a retiré son principal attribut en l’amputant de ses petites cornes. Une façon de faire les cornes au diable qui devait réjouir et rassurer nos ancêtres !
La Grande Allée fin septembre
Atmosphère d’automne : la vallée de la Seine était pleine de brume ce matin. Derrière la maison de Claude Monet, la colline se voile d’une gaze légère.
Dans cette lumière tamisée, les couleurs d’automne de la Grande Allée paraissent plus éclatantes encore : le jaune vif des rudbéckias et des soleils, le mauve des asters, et, enfin, l’orange des capucines.
Le chemin n’est plus qu’un tapis de verdure et de fleurs. La façon dont les taches colorées des pétales sont réparties, dans les derniers interstices laissés libres par les feuilles, me rappelle la disposition des touches de corail dans le tableau Impression, soleil levant.
Montrer un monument aux enfants
Comment faire apprécier les merveilles de notre patrimoine architectural aux enfants ? Comme pour les adultes, la confrontation avec les vieilles pierres ne prend sens que si elle s’accompagne de paroles. Voici quelques suggestions pour vous aider à montrer un monument, disons une cathédrale, à des enfants.
1/ En faire une fête. Le meilleur moment est le coucher du soleil et la tombée de la nuit. Les enfants aiment ressortir après le dîner. Proposez leur d’aller attendre l’instant où l’éclairage du monument va s’allumer. Asseyez-vous près d’eux et contemplez ensemble la cathédrale.
2/ Exprimer votre admiration. Juste pour les confirmer dans ce qu’ils ressentent. Regardez ensemble la lumière changer, les ombres s’allonger et disparaître.
3/ Nourrir leur imaginaire. Les pistes sont infinies, en se souvenant qu’il faut avancer pas à pas, au rythme de l’enfant, là où l’adulte se contente d’une allusion rapide. Des exemples :
– le volume. Vous faites remarquer comme vous êtes petits face au monument. Si vous connaissez sa hauteur, vous pouvez passer un moment à calculer combien de fois on pourrait mettre des papas les uns au-dessus des autres jusqu’au sommet. Et les maisons autour, sont-elles aussi grandes ? Pourquoi une si grande église ? Voilà qui vous conduit à parler de la pratique religieuse au Moyen-Âge.
– l’architecture. L’enfant a fait l’expérience qu’une pierre, c’est lourd. Partez du haut de l’édifice et essayez de lui faire ressentir le poids des pierres posées les unes sur les autres. Comment ce poids se répartit jusqu’au sol. Pourquoi la construction ne s’écroule pas au-dessus des portes et des fenêtres, comment les arcs-boutants l’empêchent de s’effondrer sur elle-même.
– le décor. Choisissez un élément du décor. Quand l’enfant l’a bien repéré, racontez-lui comment cette sculpture est arrivée là, les carriers qui ont extrait la pierre, son transport en bateau ou en char à boeufs, le choix du sujet à sculpter, le tailleur de pierre qui a mis des semaines pour façonner une belle statue, puis le travail délicat de la mettre en place, si haut. Faites-lui imaginer qu’il est ce tailleur de pierre tout en haut de l’échafaudage, en train de craindre pour son ouvrage. Racontez les cordes, les poulies.
– le temps. Si vous connaissez la date de construction du monument, vous pouvez calculer ensemble le nombre de générations qui se sont succédé. Et expliquer – si c’est le cas – qu’il a fallu plusieurs générations pour bâtir le monument, que ceux qui l’ont rêvé et commencé ne l’ont pas vu fini. Ou bien quelle prouesse cela a été de terminer cette gigantesque cathédrale en quelques années. Parlez de la difficulté de l’entreprise, de son coût, du grand nombre d’ouvriers sur le chantier.
Voilà qui vous a permis de patienter tranquillement en attendant l’illumination du monument. Moment magique… qui doit rester exceptionnel pour lui garder tout son charme.
Gelée de mûres
Les dernières mûres sont à point le long du chemin qui va de Giverny à Vernon. Une petite pause grappillage est la bienvenue : les baies noires ont une saveur douce, peu prononcée. Aïe ! Ces saletés de ronces m’ont attrapé la manche !
Il faut une bonne dose de détermination et des vêtements épais pour cueillir des mûres en vue d’en faire de la gelée. Les fruits sont petits, protégés des gourmands par des épines acérées. Pourtant, à la campagne, il est bien rare que la saison en passe sans que l’on se retrouve tôt ou tard devant les buissons de ronces avec son petit panier.
Plusieurs plaisirs s’entremêlent, les souvenirs d’enfance, le rite qui marque la fin de l’été, la satisfaction de profiter d’un aliment que la nature nous offre, peut-être même un atavisme qui nous vient du plus profond des âges, quand nos ancêtres étaient des chasseurs cueilleurs.
Une fois à la maison, on lave rapidement les fruits, on les met dans la bassine à confiture avec une petite goutte d’eau et on les fait bouillir cinq minutes tout en écrasant les baies. Après quoi on filtre le jus et on le refait cuire avec le même volume de sucre (ou un peu moins) et un jus de citron. Une odeur délicieuse emplit la cuisine, qui est déjà une première compensation à vos bras lacérés. Au bout d’un quart d’heure de cuisson, théoriquement, c’est pris. Quelques gouttes versées sur une assiette froide sont sensées figer rapidement. Il est temps de mettre la gelée en pots.
Mais la gelée de mûres est capricieuse. Au cas où, après plusieurs jours dans des pots, elle refuserait de se conformer à votre désir, ne vous obstinez pas. Transvasez-là dans une bouteille et rebaptisez-là sirop de mûres. C’est très bon en cocktail avec un vin mousseux, consommé modérément comme il se doit.
Voie verte
Saviez-vous que c’était la journée des voies vertes aujourd’hui ? L’info risque bien d’être passée inaperçue, même auprès des promeneurs qui ont emprunté le chemin réservé aux cyclistes, piétons, rollers et personnes à mobilité réduite entre Vernon et Giverny.
Pourtant, cette ancienne voie ferrée convertie en sente à l’écart de la circulation mérite un coup de projecteur. Car tous les jours, on voit des touristes mal informés marcher ou pédaler le long de la route en contrebas, au ras des camions et des voitures pressées.
Une rangée de maisons sépare le chemin de la route, ce qui le rend presque inaccessible une fois qu’on s’est engagé du mauvais côté. Les riverains, quand ils le peuvent, font traverser leur jardin aux touristes pour les remettre dans le droit chemin. En quelques pas, les visiteurs de Giverny passent du cauchemar d’une progression inconfortable et dangereuse au rêve d’une voie verte conçue pour la promenade.
Que ce soit à pied ou à vélo, le chemin est plat, ancienne voie ferrée oblige. Tout en flânant au pied de la colline, avec vue sur la vallée de la Seine, le promeneur a tout loisir d’imaginer le petit train à vapeur où Monet et les siens ont pris place tant de fois, pour se rendre de Giverny à Vernon et plus loin encore.
Pour trouver l’entrée du chemin quand on vient de Vernon, il faut, en sortant du pont sur la Seine, ignorer les indications pour les voitures, et continuer tout droit sur 100 mètres en suivant les panneaux marrons. Devant la pharmacie, le chemin commence au milieu d’un parking. Pas très engageant, d’accord, mais juste après, quel confort !
De la gare de Vernon au musée Monet, il faut compter une heure de marche. Les cyclistes qui n’ont plus touché un guidon depuis leur enfance et aiment mettre souvent le pied à terre prévoiront environ le même temps, tandis que ceux dont c’est le moyen de locomotion préféré seront vite arrivés.
Grandes Orgues
La cathédrale d’Evreux vient de se parer d’un nouveau bijou : un grand orgue flambant neuf, d’une beauté saisissante. Avec ses volets qui ressemblent à des panneaux solaires, on dirait une navette spatiale, une fusée pointée vers le ciel.
Il fallait une certaine audace pour oser intégrer un design aussi contemporain dans un monument presque millénaire. Pari gagné. L’harmonie qui se dégage de l’orgue mis en place, la façon dont ses lignes dialoguent avec celles de la cathédrale, me frappent encore plus que l’originalité de l’instrument lui-même.
On espère que le ramage se rapportera au plumage, mais l’inauguration de l’orgue a été retardée par des poussières dues à des travaux, qui se sont infiltrées dans les tuyaux.
Une autre ville vient d’acquérir des grandes orgues. L’église d’Auvers-sur-Oise dispose depuis ce mois de mai d’un orgue à tuyaux complet. Le buffet en chêne clair se veut sobre. Le festival de musique d’Auvers, au printemps, est une bonne occasion d’entendre chanter l’instrument.
Normandie Niemen
Pendant sa visite officielle en France, aujourd’hui, Vladimir Poutine s’est rendu en compagnie de Jacques Chirac au musée de l’air et de l’espace au Bourget. Les deux chefs d’Etat ont inauguré un monument en l’honneur du régiment Normandie Niemen.
Je vous parle de cette info, parce que ces glorieux aviateurs de la deuxième Guerre Mondiale ont leur musée aux Andelys.
Le mémorial Normandie Niemen rassemble des souvenirs de ces pilotes et mécaniciens qui ont répondu à l’appel du Général de Gaulle dès 1942 et ont combattu avec les Russes.
Le musée n’a pas de gros moyens, mais il intéressera ceux qui se passionnent pour l’histoire du dernier conflit mondial.
Auvers sur Oise
La lumière était belle aujourd’hui à Auvers-sur-Oise. Van Gogh l’aurait aimé, elle lui aurait rappelé la Provence et son soleil éclatant.
Auvers n’est qu’à environ une heure de route de Giverny, dans la banlieue nord ouest de Paris.
Comme Giverny fait vivre le souvenir de Claude Monet, Auvers-sur-Oise veille sur la mémoire de Vincent van Gogh. Pourtant le grand peintre hollandais n’y a séjourné que 70 jours, alors que Monet a vécu 43 ans à Giverny. Mais en quelques semaines, van Gogh a créé près d’une centaine d’oeuvres, dont 70 huiles, des aquarelles et une gravure. De cette fièvre de production sont nés de nombreux chefs-d’oeuvre.
Auvers a su habilement tirer parti des paysages peints par Vincent, qu’on retrouve à travers la ville et la campagne environnante sous forme de grands panneaux. Le paysage rustique ou urbain que l’on a sous les yeux y gagne soudain en intérêt. C’est émouvant de retrouver un pignon de maison, le tracé d’un chemin… A cet égard, la très belle église dont il a représenté le chevet est certainement l’endroit le plus fort.
On visite à Auvers de nombreux lieux de mémoire : la maison du docteur Gachet, que van Gogh a fréquenté, l’auberge Ravoux où il a logé et où il est mort, le cimetière où il est enterré au côté de son frère Théo, disparu six mois après lui.
L’auberge Ravoux, devenue la Maison van Gogh, a réussi une restauration exemplaire. La visite des mansardes où logeaient les peintres est réellement poignante. Des pièces minuscules et sombres, en soupente, éclairées d’un simple vasistas : comment des êtres voués à la couleur et à la lumière résistaient-ils au manque de clarté ?
Tout change quand on descend au rez-de-chaussée. L’auberge est toujours un petit restaurant, où l’on peut déguster une cuisine à l’ancienne dans un décor façon 19e siècle. De ses conditions de logement misérables à l’histoire de son suicide, le souvenir de van Gogh à Auvers est assez pesant. Pour respirer un air plus léger, il faut aller visiter « l’atelier de Daubigny », en fait toute la maison du maître du début du 19e siècle. C’est, je crois, l’endroit le plus charmant d’Auvers. La décoration de chaque pièce a été réalisée par Charles François Daubigny, son fils Karl, Corot et Daumier. Cette histoire d’amitié et d’affection transparaît dans leurs pinceaux en sujets pleins de grâce ou de romantisme.
Pédiluve
Les bâtiments qui figurent sur la droite de la photo sont des écuries. Elles se trouvent au château de Bizy à Vernon, dans l’Eure, et sont inspirées de celles de Chantilly et de Versailles.
Au 18e siècle, on logeait les chevaux aussi somptueusement que les princes, dans des demeures en pierres de taille rehaussées de hauts-reliefs.
Ce logement luxueux allait de pair avec des soins attentifs. Le bassin aux courbes gracieuses qui se trouve en plein milieu de la cour d’honneur, face au château, servait à baigner les chevaux. Ils descendaient le long de la petite rampe pavée, après quoi on devait les asperger et les frotter, car l’eau n’est pas profonde.
De beaux chevaux, c’était certainement un grand luxe, la marque de la noblesse.
Toutefois, le pédiluve de Bizy s’inscrit dans un réseau complexe de fontaines, bassins et cascades, aussi est-il permis de croire que le dessein architectural était d’abord de placer une pièce d’eau au centre de la cour, et le lavage des chevaux un simple prétexte.
Le concepteur des jeux d’eau a tiré profit de la pente du terrain pour créer un long cheminement aquatique. L’eau ruisselle de la Fontaine de Gribouille, dégringole la cascade, jaillit par la gueule des chevaux marins, puis en contrebas par celle des dauphins, avant de disparaître sous les écuries pour ressurgir dans le pédiluve. Ensuite, des tuyaux qui passent sous le château la conduisent jusqu’au parc. Du moins en théorie, car les fuites et les captages ont depuis longtemps asséché le réseau d’adduction qui parcourait la colline.
Winslow Homer
Pour beaucoup, c’est le plus grand peintre américain du 19e siècle : Winslow Homer est à découvrir au Musée d’Art Américain Giverny jusqu’au 8 octobre 2006.
L’exposition est centrée sur le thème de l’eau, aussi récurrent chez Homer que chez Monet.
Pendant une grande partie de sa carrière, Homer s’est attaché à représenter la mer, aimable et riante comme dans cette aquarelle des « Trois garçons au bord de la mer », ou au contraire dangereuse et menaçante. Ce sont des femmes de pêcheurs qui guettent le retour des bateaux, c’est le canot de sauvetage qu’on met à l’eau, c’est la côte hivernale, ou encore cette femme qui paraît évanouie dans les bras de l’homme qui la sauve, glissant avec elle le long d’un filin, au-dessus des flots en furie.
Une toile évoque irrésistiblement la Vague d’Hokusai : au milieu de vagues creusées par une forte houle, les bustes de pêcheurs apparaissent. On ne voit pas leur embarcation, cachée par une vague au premier plan. Dissimulé à notre regard, le bateau paraît bien prêt d’être englouti. L’impression de vulnérabilité transmise au spectateur contraste avec le regard impassible de ces hommes qui en ont vu d’autres.
Banc cygne
Oui, bien sûr, on peut trouver ça kitsch. Ou ravissant, selon les goûts. Le moins que l’on puisse dire est qu’on ne voit pas des bancs de ce genre partout !
Celui-ci se trouve sur la terrasse du Moulin de Fourges, un restaurant au bord de l’Epte près de Giverny. Les cygnes ont l’air sur le point de s’élancer pour retourner à l’eau.
A première vue, ils sont en fonte peinte. J’aimerais bien savoir quel est le siècle qui les a vu naître.
Ipomée
Des corolles bleu ciel qui se détachent sur un fin feuillage vert pâle, aux feuilles en forme de coeur : à la fin de l’été, les ipomées donnent joyeusement l’assaut à n’importe quel support. Ici, elles encadrent avec poésie la porte d’entrée de la maison de Monet à Giverny.
Les volubilis se retrouvent ailleurs dans le clos normand, la partie la plus fleurie du jardin. Les grandes armatures métalliques qui servent de support aux clématites, puis aux roses, et forment de spectaculaires rideaux de fleurs au printemps, connaissent une troisième floraison, plus discrète, avec le velours profond des volubilis qui s’enroulent sur les piliers. Les corolles se déclinent en violets et pourpres, poudrés de pollen pâle laissé par le passage des insectes sur les étamines.
Fleurs de fin d’été
Dans le jardin de fleurs de Claude Monet, à Giverny, les vivaces et les annuelles sont à l’apogée de leur croissance.
C’est la saison du gigantisme. Certains dahlias se hissent à deux mètres de haut, en compétition avec les soleils, dont le jaune illumine le jour le plus morne.
Les premiers asters fleurissent en masses de couleur, aux côtés des anémones du Japon. Les cosmos d’un rose tendre affichent la couleur exacte des murs de la maison.
Le dessin des plates-bandes disparaît sous la profusion de fleurs de toutes tailles, dans un enchevêtrement végétal qui noie les contours. On pourrait jouer à cache-cache dans les allées sans même avoir besoin de se baisser.
Quatre-feuilles
A quelques kilomètres de Giverny sur le plateau qui domine la vallée de la Seine, le village d’Heubécourt possède une ravissante église gothique. Elle est construite en pierre de Vernon, du calcaire blanc parsemé ça et là de rognons de silex. Aujourd’hui, les scies à diamants permettent de trancher ces silex très durs. Mais au Moyen-Âge, les tailleurs de pierre ont préféré les laisser intacts, de crainte de faire un trou dans la pierre. C’est assez amusant de voir les silex noirs faire saillie un peu partout sur la façade blanche.
L’église d’Heubécourt présente la particularité d’être en forme de lettre Tau, sans l’habituelle abside arrondie, mais avec deux chapelles en pignon.
Un détail permet de la dater du premier coup d’oeil. Regardez bien le haut des fenêtres en ogive. On distingue les quatres lobes de l’ornement architectural préféré du 14e siècle, le quatre-feuilles.
Encorbellement
Vernon a conservé quelques maisons du Moyen-Âge telles que celle-ci, voisine de la collégiale Notre-Dame. Dénommée la maison du Temps Jadis, elle date du 15e siècle et abrite l’Office de Tourisme.
Un mode de construction courant voulait que chaque étage déborde au-dessus de l’étage inférieur, selon la technique de l’encorbellement.
Les avantages des maisons à encorbellement sont bien connus : gagner quelques mètres carrés de surface habitable supplémentaire à chaque niveau, optimiser la place à l’intérieur de l’enceinte de la ville, protéger les façades à pans de bois de la pluie…
On souligne moins souvent le double avantage architectural de ce mode de construction. Le premier est de permettre de bâtir avec des poteaux relativement courts, d’un étage seulement. Ces pièces de bois sont plus faciles à trouver et à mettre en oeuvre que des poteaux de la hauteur totale de la maison.
Le second intérêt est le principe du contrepoids. Grâce au débordement, le haut de la maison s’appuie sur le bout des poutres qui traversent les étages inférieurs, évitant l’affaissement de ces pièces de bois.
On voit bien ici que l’encorbellement était de taille réduite, ce qui devait en limiter les inconvénients. Quand il était très prononcé, le soleil et la pluie ne pénétraient plus dans les rues, qui devenaient insalubres. De plus, la proximité des étages supérieurs facilitait la propagation du feu.
Mais il semble que ce soit davantage l’eau que le feu qui ait détruit les maisons du Moyen-Âge. En effet, comme elles avaient pignon sur rue, les murs gouttereaux étaient mitoyens. De ce fait, l’eau s’écoulait mal et elle a fini par pourrir les pans de bois.
Les girolles de Mallarmé
Quel meilleur signe de la familiarité entre deux hommes que l’échange de recettes ? Consignée dans les carnets de cuisine de Claude Monet, on retrouve cette preuve de son amitié avec Stéphane Mallarmé. L’homme de lettres de deux ans son cadet avait sa façon d’accommoder la girolle. Le peintre avait dû la trouver alléchante, puisqu’il l’a notée.
Il s’agit de faire revenir 1 kilo de ces champignons avec du saindoux et 125 gr de lardons. Le temps de cuisson a de quoi laisser pantois : 1h30 ! « pour que l’eau contenue dans les girolles soit réduite », justifie le poète. Certes, mais que restera-t-il de nos précieuses girolles après ce mijotage prolongé ?
La touche finale est des plus classiques, une gousse d’ail et du persil haché à ajouter cinq minutes avant la fin. Mallarmé se montre tout à fait optimiste sur la bonne résistance des girolles à la cuisson, car il est persuadé qu’il y aura des restes. « Les girolles sont aussi bonnes, presque meilleures, réchauffées au bain-marie. » Bon appétit !
Lilas au soleil
5 octobre 2006 / Leave a comment
C’est la toute première, et la plus courte des séries de Monet : deux tableaux seulement ! Non, bien sûr, on ne peut pas encore parler de série. Monet ne va systématiser le processus que dix ans plus tard. Mais déjà il cherche à rendre les variations de la lumière en un même point.
Variations sommaires : Monet raconte qu’au début de sa carrière, il pensait qu’il suffisait de deux toiles, l’une au soleil, l’autre par temps gris, et voilà tout. C’est le cas de figure des Lilas.
Peu à peu il s’aperçoit qu’entre ces deux extrêmes il existe une infinité de variations. Il s’acharne, peint jusqu’à quarante fois le même motif à Londres.
En 1872, il n’en est pas encore là et se contente d’une paire. Les deux toiles d’Argenteuil ont malheureusement été séparées. Lilas au soleil est conservé au musée Pouchkine de Moscou, l’autre tableau de cette paire, Lilas, Temps gris se trouve au musée d’Orsay à Paris.