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Tiens, voilà un Boudin

Eglise sainte Catherine de Honfleur par Eugène Boudin

Eugène Boudin, Le clocher de Sainte-Catherine, Honfleur.  Huile sur panneau de bois. 

Le musée Marmottan célèbre actuellement les talents de collectionneur de Monet. Aux côtés de beaux Renoir, Cézanne et autres Pissarro, on peut voir à Paris l’oeuvre ci-dessus prêtée par le musée Eugène Boudin de Honfleur. Depuis plusieurs années on sait qu’en dépit de la signature « Claude Monet », il s’agit d’un tableau de Boudin.

La confusion s’est faite en toute bonne foi, cela ne fait pas de doute.

Le directeur du musée Eugène Boudin de Honfleur, Benjamin Findinier, propose un scénario convaincant : à la mort de Boudin en 1898, son exécuteur testamentaire aurait offert le Clocher de Sainte-Catherine, sans signature ni date, à Monet en souvenir de son ami Boudin. Le tableau reste pendant 28 ans à Giverny. A la mort de Claude Monet en 1926, son fils Michel appose le cachet de l’atelier sur toutes les toiles de son père non signées. Il croit reconnaître dans le Clocher une oeuvre de jeunesse de son père.  

Michel conserve le tableau jusqu’en 1964. Il est alors âgé de 86 ans et décide de faire don de l’oeuvre au musée de la ville de Honfleur. C’est, croit-il, un tableau qui  « date de la période Boudin » de Monet. Mais l’analyse stylistique de la touche laisse à penser qu’il s’agit plutôt d’une oeuvre de Boudin. Une vue très proche du Clocher Sainte Catherine attribuée à Boudin et conservée au musée d’Art de l’Université du Michigan ne laisse pas de doute.  En 2013 le musée Jacquemart à Paris exposait les deux oeuvres côte à côte. La parenté est évidente. Et puis les deux tableaux sont peints sur panneaux de bois, ce qui est courant chez Boudin mais rare chez Monet.

Monet et Boudin se sont connus au Havre. C’est Boudin qui a encouragé le jeune Monet à se lancer dans la peinture de paysage, qui lui a montré comment on pouvait peindre ce qu’on voit, sans tricher. On est alors à la fin des années 1850.

Le Clocher, lui, paraît avoir été peint plus tardivement. Le tableau de l’Umma n’est pas davantage daté, ce sont donc des similitudes dans le style qui permettent de proposer une datation.

Qu’a ressenti Monet en recevant cette oeuvre ? Tristesse, tendresse, ou un peu de culpabilité ? A l’heure où Monet était enfin devenu un peintre reconnu, Boudin lui avait écrit pour lui demander une oeuvre en souvenir de leur amitié. Il joignait l’une des siennes. Monet, en le remerciant, lui avait répondu qu’il n’avait rien d’assez bien à lui adresser en retour, rien qui soit digne de son vieil ami. Une réponse dilatoire qui avait dû bien peiner le peintre honfleurais. 

C’est intéressant de se poser la question du ressenti de Monet, puisque c’est une oeuvre où l’on en est réduit aux conjectures. Voici les miennes : peut-être que Monet, embarassé par ce souvenir, n’a pas accroché le tableau dans sa chambre avec les autres oeuvres de ses amis impressionnistes. Peut-être qu’il l’a plus ou moins laissé traîner dans l’un de ses ateliers au milieu de ses propres toiles. Probablement le deuxième atelier, car l’ordre régnait dans le salon-atelier. Ce serait cette mise à l’écart qui aurait provoqué la confusion bien légitime de Michel Monet.  

   


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Ariane.

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