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La basilique en point de repère

Claude Monet, Effets d’hiver à Argenteuil (détail), 1875, collection Nahmad

Claude Monet a fait figurer le clocher élancé d’une église dans son tableau Effets d’hiver à Argenteuil. C’est la basilique Saint-Denys. En 1875, elle est achevée depuis dix ans à peine.

La voici telle qu’elle se dresse toujours au centre d’Argenteuil. Jusqu’au 11 mai 2025, la précieuse relique qu’elle abrite depuis l’an 800, la Sainte Tunique, dernier vêtement porté par le Christ lors de sa Passion, est présentée à la vue et à la dévotion des pèlerins. Cette ostention n’a lieu en principe que tous les cinquante ans.

Effet d’hiver à Argenteuil

Claude Monet, Effets d’hiver à Argenteuil, 1875, collection Nahmad

Voici l’un des cinq tableaux de Monet que l’on peut voir en ce moment à Giverny, au musée des impressionnismes, dans le cadre de l’exposition tirée de la collection Nahmad. Cela fait seulement trois ans que l’oeuvre a été achetée par la famille Nahmad. Elle appartenait auparavant à un collectionneur français de Tahiti, Paul Yeou Chichong, un self-made-man au parcours étonnant, né à Papeete d’un père chinois. Premier polynésien à intégrer HEC, il en sort diplômé en 1959, retourne à Tahiti et commence une brillante carrière. Il investit une partie de ses bénéfices en tableaux, jusqu’à amasser 350 toiles, dont de nombreux chefs-d’oeuvres signés des plus grands. Il aime en particulier les toiles de Gauguin, bien sûr, il a un penchant pour les natures mortes de poissons, mais aussi, plus curieusement, pour les paysages de neige. J’imagine qu’ils paraissent très exotiques quand on vit un été permanent.

Mais son rêve de voir l’Etat créer un musée à Tahiti pour y présenter ses tableaux ne semble pas avoir pu se concrétiser. En mai 2022, sa collection a été proposée aux enchérisseurs par Sotheby’s.

Claude Monet, Effets d’hiver à Argenteuil (détail), 1875, collection Nahmad

Les experts de la maison de vente se sont livrés à une étude approfondie du tableau de Monet. En décembre 1874, il avait enfin neigé abondamment, après plusieurs années sans flocons ou presque. On devine l’excitation de Monet et sa joie de peindre de beaux effets d’hiver. Il n’a pas eu à les chercher très loin : à quelques pas de chez lui, le voici face à un stock de blocs de pierre chapeautés de neige. Il est possible que ce soit l’aspect ton sur ton du blanc du calcaire et de celui de la neige qui ait arrêté son regard. Argenteuil est alors une ville en pleine expansion où l’on construit beaucoup.

Claude Monet, Effets d’hiver à Argenteuil, 1875, collection Nahmad

Au-delà de ce motif un peu anecdotique, c’est l’intérêt porté par le peintre aux tons mouvants du ciel qui fascine. Les nuées sont animées d’une vie propre, leurs nuances délicates sont si travaillées que pas un centimètre carré du tableau ne paraît vide.

Dans les rues d’Argenteuil

A Argenteuil, Monet s’impose dans l’art urbain ! Il nous regarde du coin de l’oeil depuis l’étage d’un immeuble, une fresque colorée réalisée par l’artiste C215.

Et le revoici au coin de la rue, peignant Camille dans les coquelicots.

La maison de Monet à Argenteuil

La ville d’Argenteuil l’appelle « la maison impressionniste ». A quelques pas de la gare et non loin de la Seine, la demeure où Claude Monet, son épouse Camille et leur fils Jean ont séjourné pendant quatre ans, de 1874 à 1878, est désormais ouverte au public ; on peut s’y rendre le mercredi, le samedi et le dimanche après-midi.

La restauration a été menée avec un grand souci du détail et de fond en comble. Monet a habité dans une maison qui venait d’être construite, elle devait avoir cet aspect de neuf qu’on lui voit aujourd’hui.

Maison Monet à Argenteuil, le perron

Comme si on arrivait chez le peintre à la manière de Renoir ou de Manet, on monte les marches du perron et on entre par la porte d’entrée côté rue. Elle donne sur un espace minuscule et sur l’escalier, comme à Giverny.

A droite, l’accueil du musée. Je suis émue : le parquet à chevrons de Coin d’appartement est toujours là ! Et le poêle, est-il d’origine lui aussi ? La cloison paraît avoir été un peu déplacée car on ne retrouve plus l’alignement des pièces tel que Monet l’a peint. Mais de jolis rideaux encadrent le passage vers la véranda, entièrement reconstruite.

Maison de Monet à Argenteuil, la véranda

Le parti pris par l’agence Abaque, spécialiste des « expositions d’interprétation », qui revendique de « créer des expositions ludiques, instructives, excitantes et esthétiques », est un compromis entre l’évocation des pièces de la maison et le centre d’interprétation.
La visite demande la participation active du public. Le visiteur est invité à ouvrir des tiroirs, des portes de placard, à s’asseoir à la coiffeuse ou au bureau. En récompense, des projections de tableaux, des fac-similés de lettre, des explications supplémentaires.
Un choix a été opéré dans la très abondante production de Monet à Argenteuil, 259 tableaux en sept ans. Avant de jeter l’ancre dans l’actuel boulevard Karl-Marx, le peintre a habité pendant trois ans une première maison louée à une certaine Madame Aubry. Ce bâtiment a disparu.

Le visiteur peut donc toucher les meubles comme s’il était chez lui. Un logo lui indique où regarder.
Pour qui vient de Giverny, où chaque objet est une relique, cela paraît incroyable. Il est vrai que la fréquentation n’est pas la même.

La maison de Monet à Argenteuil, vue sur le jardin

150 ans nous séparent du séjour des Monet dans la maison. Que voyaient-ils quand ils regardaient par la fenêtre ? Et que reste-t-il d’inchangé ?

L’escalier sans doute est toujours le même. Mais il existe maintenant aussi un ascenseur.

Evocation du bateau-atelier de Monet dans sa maison d’Argenteuil

Tout en haut, le visiteur peut écouter, regarder et même sentir, car l’odeur du bateau-atelier voguant sur la Seine a été recréée. Bluffant !

Je suis impressionnée par le soin apporté à la muséographie, pour que les visiteurs ne s’ennuient pas et repartent en ayant appris quelque chose. C’est un pari audacieux, en partant d’une coquille vide, les simples murs, et sans aucune oeuvre ou objet à montrer, de rendre la visite intéressante.

Partout, des silhouettes animent les murs. Elles sont signées Stéphanie Miguet.

A l’arrière de la maison, le jardin est moins grand qu’à l’époque de Monet. Malgré ses dimensions réduites, il est très joli.

En ce moment, le lilas à petites feuilles déborde de fleurs. Monet en ferait un tableau, ou même plusieurs.

Alors pourquoi venir à Argenteuil voir la maison impressionniste ? Pour en savoir plus sur le séjour du peintre à Argenteuil, sur la ville elle-même. Pour les raisons qui poussent à chercher le site des tableaux : se rendre compte des lieux, des volumes, de la lumière et des ombres… Et pour tenter de capter, dans un lieu paisible, ce qui peut y rester encore de Monet.

La maison de Monet à Argenteuil

Maison de Monet à Argenteuil

Si à Giverny la maison de Claude Monet s’élève dans la rue Claude Monet, celle qu’il a occupée à Argenteuil se trouve 21 rue Karl-Marx. Le peintre s’efface derrière l’auteur du Capital, qui a habité la même rue à trois maisons de là en 1882, avant de décéder à Londres l’année suivante.

(suite…)

Le Pont d’Argenteuil

Monet, Le Pont d'Argenteuil Claude Monet, Le Pont d’Argenteuil, 1874

Voilà ce tableau de Monet soudainement propulsé dans l’actualité internationale. Un geste de vandalisme lui a fait défrayer la chronique pendant huit jours. Heureusement un clou chasse l’autre, et si l’actualité est une grande dévoreuse d’évènements, elle les oublie presque aussitôt. Cela devient déjà difficile de retrouver dans les moteurs l’info relative à l’intrusion au musée d’Orsay dans la nuit du 6 au 7 octobre dernier.
Pourquoi s’en prendre à un tableau ? Sans doute parce que les oeuvres de Monet sont devenues des icônes, et que leur prix vertigineux les rend follement attractives pour qui veut s’offrir un geste iconoclaste. Des actes de cette nature restent heureusement très rares. Ce n’est pas tellement cela que les chefs-d’oeuvres ont à craindre, mais le contact ordinaire du public, hélas ! qui, totalement inconscient des dommages qu’il cause, met les doigts dessus, leur donne des coups de stylo ou de feutre, les accroche de l’épaule ou du sac…

Monet peint le Pont d’Argenteuil en 1874, l’année qui voit Impression Soleil Levant faire scandale. Il représente le pont routier, pourvu d’arches et de piles oblongues (tandis que le pont de chemin de fer qui figure sur d’autres toiles est fait de piles rondes comme des colonnes et sans arches).
Le pont routier a été détruit pendant la guerre de 1870 et vient d’être refait. La reconstruction du pont est le motif de la première toile de Monet à Argenteuil.
Monet choisit un angle en direction de la promenade, vue depuis la berge du Petit-Genevilliers. Au milieu des arbres apparaît l’ancienne maison du passeur. A l’époque de Monet elle est devenue une guinguette. Argenteuil est une destination prisée le dimanche et aux beaux jours, les Parisiens viennent s’y détendre au bord de l’eau : il leur suffit de faire une demi-heure de train au départ de la gare Saint-Lazare. L’attraction principale, ce sont les régates que se livrent des voiliers semblables à ceux du tableau.
Monet a loué une maison à Argenteuil pour être au plus près de ses motifs, attiré par les jeux de l’eau et de la lumière, et par ces ponts modernes qui structurent le paysage.
Le Pont d’Argenteuil frappe par la lumière dorée qui l’inonde, l’aspect paisible de ce paysage péri-urbain vide de tout personnage, l’équilibre des masses sombres et des masses claires, et le jeu des lignes de fuite diagonales rythmées par les verticales du pont et des mâts.

Cher lecteur, ces textes et ces photos ne sont pas libres de droits.
Merci de respecter mon travail en ne les copiant pas sans mon accord.
Ariane.

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