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Success Story

Livre L'Estampe Japonaise, TaschenBon nombre des estampes japonaises de Monet sont revenues sur les murs de sa maison. Le raccrochage s’est fait progressivement au cours de l’été, avec surtout des triptyques et des estampes de grand format.
C’est un art fascinant que celui des estampes, mais il n’est pas facile à percer. A la boutique de la Fondation Monet, j’ai trouvé un livre qui je l’espérais me permettrait d’en savoir plus : « L’Estampe Japonaise » de Gabriele Fahr-Becker, éditions Taschen.
L’intérêt de l’ouvrage tient surtout à ses reproductions pleine page de très nombreuses gravures. Le texte est émaillé de mots japonais, parfois à tel point qu’il en devient fastidieux :

(P. 44) Cette estampe nous montre Danjuro II dans le rôle de Soga no Goro du kyogen intitulé « Yuzuriha nemoto Soga » représenté au théâtre Nakamura la 12ème anée de l’ère Kyoho (1727). »

Je ne sais pas si j’arriverai à en tirer quelque chose. Mais un petit texte imprimé sur le rabat de la couverture et sans rapport direct avec le contenu du livre m’a beaucoup fait rêver.
« L’Estampe Japonaise » a été publié en 2005, l’année des 25 ans de la maison d’édition. Taschen en profite pour raconter sa success story.
Écrire sa propre légende est un exercice qui répond indéniablement à des règles implicites. Cela m’a fait penser à l’histoire de Daniel Terra, le fondateur du Musée américain de Giverny, ou encore à Claude Monet revenant sur son passé alors qu’il avait atteint la gloire.
Il y a ce que l’on dit, ce que l’on occulte, un mélange d’apparente sincérité et d’omissions calculées, le tout forcément teinté d’humour et d’auto-dérision pour se faire pardonner d’avoir réussi.
Au départ le héros est quelqu’un comme tout le monde ou presque. En lui sommeille le génie mais personne ne le sait encore, peut-être même pas lui :

La grande aventure TASCHEN débute en 1980, quand Benedikt Taschen, alors âgé de 18 ans, ouvre une boutique en Allemagne, dans sa Cologne natale, pour écouler son immense collection de bandes dessinées.

Le héros est jeune, c’est préférable mais cela ne suffit pas, j’en connais d’autres qui avaient 18 ans en 1980 et n’ont pas fait fortune pour autant. Tous les ados caricaturistes ne sont pas devenus des Monet non plus.
Le héros a un côté dilettante et mono-maniaque qui a de quoi exaspérer son entourage. Comment réagissaient papa et maman Taschen face à leur fils toujours plongé dans ses sempiternelles BD ? Et d’abord, comment se les procurait-il ?
Personne n’est assez stupide pour croire qu’on devient riche en vendant d’occasion ce que l’on a acheté neuf, même si cet épisode dénote du soin et de l’organisation. Le déclic se produit un peu plus tard, en 1984, quand

il rachète 40 000 invendus d’un ouvrage en anglais sur Magritte et les revend à une fraction du prix original.

Pouce ! Je voudrais comprendre ce ressort essentiel, comment on passe de la boutique au business international. Où B. Taschen a-t-il trouvé ce stock impressionnant au prix du pilon ? Et les fonds nécessaires à cet investissement important ? Comment a-t-il écoulé ensuite tous ces Magritte en anglais ? On ne le saura pas. Ce que le rédacteur veut mettre en avant, c’est l’audace, le flair, l’esprit d’entreprise extraordinaires de cet autodidacte. Monet aussi était rebelle aux études…
Ensuite, l’histoire de Taschen devient moins surprenante. Il juge que

les livres d’art sont trop chers et difficiles à trouver.

Il fait le pari de l’édition de masse à prix démocratisés, en commençant par les artistes les plus populaires, Picasso et van Gogh. Il n’est pas très étonnant que de tels produits aient marché. Mais encore une fois tout un savoir-faire d’éditeur et de distributeur est présenté comme allant de soi. Pourtant il y a tant d’embûches sur la route d’une entreprise, tant d’occasions de la faire capoter que le succès suppose d’avoir su faire à chaque fois les bons choix.
Quant à la gloire en art, elle est encore plus incertaine puisqu’elle doit tout à la reconnaissance de la part de ses contemporains.
Le génie n’a rien à voir avec elle, il peut éclater a posteriori ou demeurer incompris, comme un fleur merveilleuse qui s’est épanouie pour personne.


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Ariane.

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