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L’esprit du Japon à Giverny

Le jardin japonais de Monet

Claude Monet n’est jamais allé au Japon. Mais comme ses contemporains, il est tombé sous le charme du pays du Soleil-Levant. Il collectionnait les estampes japonaises, il a peint Camille dans un costume rouge à motif de samouraï avec des éventails sur le mur, sa maison débordait de meubles en faux (et parfois en vrai) bambou, son service de table s’appelait Japon, et ainsi de suite. Il n’est pas surprenant que l’on retrouve cette inspiration japonisante dans son jardin.

Qu’est-ce qui fait qu’un jardin évoque le Japon ?

Jean-Paul Pigeat, dans son livre L’esprit du Japon dans nos jardins (Editions Ulmer), détaille les caractéristiques de l’horticulture nippone que l’on peut transposer chez soi. Le Japon récèle des milliers de jardins qui ne sauraient se réduire à un style unique, mais ils obéissent à des principes qu’on retrouve souvent et qui sont bien différents de notre façon occidentale de voir les choses.

Celui de Monet s’apparente au jardin-promenade de l’ère Edo, où l’on chemine autour d’un étang et où le regard porte sur le paysage alentour pour en capter des éléments. A Giverny c’est la colline qui est ainsi empruntée.

Le jeu de l’ombre et la lumière sont essentiels dans un jardin japonais. Monet en a joué dans le jardin d’eau, en créant des masses sombres avec les bambous, les arbres ou les buissons, et des zones lumineuses comme le bassin. 

Selon Pigeat, 

« On n’entre pas n’importe comment dans un jardin japonais. Le portail, souvent couvert d’un petit toit, ouvre presque toujours sur un espace étroit. Il faut avancer pour découvrir, après un changement d’axe, le jardin. Rien à voir avec nos entrées triomphales. »  

L’entrée des groupes a cette configuration de portail couvert, d’espace étroit et de changement d’axe. Et même un banc : 

Tout de suite, un petit abri avec un banc où le visiteur sera invité à s’asseoir. On n’entre pas brutalement dans un jardin japonais, mais on attend que le propriétaire vienne vous chercher avec le thé de bienvenue.

Bon, l’accueil ne va pas jusque là chez Monet…

L’eau et les ponts sont très présents dans les jardins japonais. Celui de Giverny s’inspire d’estampes collectionnées par le peintre. Et non, ils ne sont pas forcément rouges.

Les barrières en bambous sont nombreuses, variées, essentielles au Japon. Elles ont depuis peu fait leur apparition à Giverny grâce aux échanges entre jardiniers japonais et givernois. Dans la plus pure tradition, les bambous entrecroisés sont attachés par des ficelles noires. « Tout le Japon est dans l’attache de bambous avec une ficelle noire, » note Pigeat.

Le choix des végétaux est important pour donner une touche japonaise. Sur la photo ci-dessus, ils sont nombreux à être des marqueurs de jardin nippon : bambous, glycines, cytise, érable du Japon, azalées, pivoines arbustives…

Ailleurs dans le jardin on trouve aussi des fougères, et parmi les arbres des cerisiers, pruniers, abricotiers et pommiers du Japon, des saules pleureurs, un paulownia, deux pins…

Chez les arbustes on note des camélias, des rhodo, des hortensias, des viornes parfumées, des cotoneasters, des mahonias. 

Les Japonais n’emploient pas beaucoup de fleurs mais Giverny a celles qu’ils préfèrent, primevères candélabres (ci-dessous), hostas, hémérocalles, lis, tricyrtis, chrysanthèmes… 

Primevère du Japon, jardin de Monet à Giverny

Malgré tout le jardin de Monet ne parvient pas à créer une ambiance franchement japonaise, et ce n’était sans doute pas le but du peintre.

Que manque-t-il pour cela ?  Il n’y a pas de pierres, alors que « les pierres jouent un rôle majeur dans la composition des jardins japonais. » Elles devraient être partout, dressées, couchées, dans l’étang, comme pavement des chemins…

Pas non plus de végétaux taillés, que ce soit en transparence, en nuages ou en moutonnement – Monet détestait les topiaires qu’il trouvait trop artificielles. 

Pas davantage d’objets décoratifs orientaux tels que lanternes, portique rouge, bassin à ablution et sa louche en bambou (tsukubai), pagode, pavillon de thé, carpes kois, gravier ratissé, fontaine sonore en bambou, etc. Tous ces éléments qui ont fait les délices d’autres créateurs de jardins de son époque n’ont pas tenté Claude Monet.


Un commentaire

  1. Vraiment très intéressant Ariane ! ! !
    C’est cet esprit japonisant de Monet que nous avons souhaité retenir (avec nos modestes compétences) dans l’évocation de la maison de Monet au sein de notre exposition.
    Nous espérons vous y accueillir.
    Amitiés

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Ariane.

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