Cloître gothique

Cloître gothique à EvreuxCe magnifique cloître gothique était autrefois réservé à l’usage de l’évêque d’Evreux pour lui permettre de se rendre de son palais épiscopal à la sacristie de la cathédrale voisine.
Aujourd’hui l’évêque a déménagé, l’évêché est devenu un musée, et tout le monde peut se promener librement dans le cloître les jours d’ouverture du musée.
Le cloître n’est pas complet, il ne dessine que deux côtés d’un carré. La construction de cette galerie date de la fin du 16e siècle. Malgré cette édification tardive, elle est bâtie en un style gothique flamboyant au dessin harmonieux.
Le matériau utilisé est la pierre de Vernon, que l’on reconnaît facilement aux rognons de silex laissés intacts par les tailleurs de pierre au milieu du calcaire parfaitement appareillé.

Libellule

libellule Le corps fuselé comme une flûte traversière, et des couleurs de pierres précieuses sous des ailes de fée Clochette : les libellules sont les plus gracieuses des habitantes du jardin d’eau de Claude Monet à Giverny.
Les plus courantes ne sont pas plus longues que le petit doigt, transparentes, aussi légères que le vent. Turquoise un peu fluo, rouge grenat, bleu outremer, on dirait qu’elles sont allées se servir dans la palette de Monet avant de venir tourbillonner au-dessus de ses Nymphéas.
Certains jours on en voit passer des maousses toutes vrombissantes, style mon papa est un hélicoptère. Difficile de ne pas les remarquer, mais pas très envie qu’elles s’approchent trop près.
Rien n’est plus insaisissable qu’une libellule. Elles ne tiennent pas en place, tout leur être est vol, mouvement.
J’avais quasiment renoncé à arriver jamais à en photographier une quand ce matin celle-ci a bien voulu poser longuement sur sa feuille d’iris.
Les photos valent par ce qu’elles montrent mais aussi par ce qu’elles nous rappellent, les images, les sensations qu’elles font revenir à la mémoire. Derrière la libellule je vois mes visiteurs de ce matin, au moment où j’ai pris la photo, un jeune couple en compagnie de deux enfants de 4 et 6 ans.
Une visite guidée avec des petits, il y a de quoi hésiter. Mais les parents, passionnés par Monet, ont tenté le coup.
Comme d’habitude je me suis régalée à donner la main, à porter pour faire voir des trucs. Entre deux explications pour adultes (pendant lesquelles les enfants alignaient avec concentration des gravillons sur un mouchoir en papier), on a regardé les poules, cherché les dindons, les poissons, décrit les couleurs des fleurs, appris à reconnaître le vrai bambou du faux, joué aux devinettes, raconté l’histoire du chat en porcelaine, senti les phlox, les lavandes, compté les abeilles et les casseroles en cuivre, admiré la marqueterie du bureau de Monet, on est descendu dans un tunnel et passé sur des ponts… et on a vu des libellules.
A la fin de la visite je serrais la main des parents pour prendre congé quand la petite de six ans m’a enlacé les jambes, un geste tendre et spontané qui m’a fait fondre. Vous en connaissez d’autres, des métiers où ce genre de choses risque de vous arriver, un câlin enfantin impromptu alors qu’on se connaît depuis deux heures ?
Cette petite fille, c’est elle, ma libellule du jour, ma petite fée Clochette.

Poignée de porte

poignée de porte en corneComment faisait-on avant le pétrole et le plastique ? Ils ont tellement envahi notre quotidien qu’il est devenu difficile à croire que l’on ait pu s’en passer. Et pourtant il existait naguère des solutions alternatives pour tous les objets.
En Normandie, terre d’élevage, on utilisait volontiers la corne à toutes sortes d’usages. Les portes-fenêtres de la maison de Monet à Giverny sont équipées de poignées de portes anciennes en corne tournée, vraisemblablement d’origine.
Le temps et les intempéries y ont creusé de fines gerçures. Elles rappellent les mains âgées qui s’y sont posées, il y a bien longtemps.

La couleur de la barque

Barque, GivernyL’essor de la photo numérique a pour corollaire une inflation d’images dans nos ordinateurs. Si l’on veut faire quelque chose de ses photos, une sélection s’impose. Mais comment choisir, en fonction de quels critères ?
Selon l’humeur, la sélectivité est plus ou moins grande. Bien sûr, il y a les photos qui provoquent un Waou ! quand on les découvre. Pour celles-ci, même pas la peine de se poser de question ; on sait sans hésiter que ce sont de bons clichés. De même qu’on n’a souvent aucun doute, hélas ! sur la médiocrité de certaines vues.
Et puis il y a les photos pas trop mal. On la garde ou pas ?
Cela dépend de ce qu’elle inspire. Comme les êtres humains, les photos sont plus ou moins belles et racontent des histoires plus ou moins intéressantes.
Et comme les être humains, elles peuvent avoir des défauts qui les rendent attachantes.
J’avais d’abord éliminé celle-ci. Elle a quelque chose qui me dérange parce que je sais que la barque de Monet est d’un vert vif et non presque noire, et que le saule devrait être plus vert lui aussi.
Et puis, prise de remords, je l’ai exhumée de la poubelle. Elle a quelque chose qui me retient, le contraste du chaud et du froid, du lisse et du brouillé, du rectiligne et de l’arrondi, et ce reflet qui fait comme un livre ouvert…
Et je repense à la leçon de Monet qui disait qu’il fallait peindre exactement ce que l’on perçoit en oubliant ce que l’on sait des objets.
C’est ainsi que chez lui les ombres sont violettes, et que la neige est rose, jaune, grise… mais jamais blanche. Il n’aurait pas cherché à peindre une barque verte.

Christian Avril

peintre à Giverny Il s’appelle Christian Avril, c’est son vrai nom. Comme les hirondelles, chaque printemps ramène monsieur Avril à Giverny.
Depuis quinze ans qu’il plante son chevalet près de la Fondation Claude Monet, il a fini par faire partie du décor, le seul peintre de Giverny à exercer ses talents dans la rue, sous le regard des passants.
Christian Avril peint comme il respire, avec naturel. Tout autour de lui sont accrochées ses toiles, surtout des petits formats, et l’on y reconnaît avec amusement chaque détail de la rue, les roses trémières devant le portail d’en face, le panneau indicateur, la boîte aux lettres jaune au milieu des roses, jusqu’aux touristes qui flânent.
C’est comme un jeu, l’oeil regarde la toile et cherche aussitôt le motif aux alentours, puis revient à la toile. La rue Claude Monet qui pouvait paraître banale devient poétique quand elle est transfigurée par la peinture.
Rue Claude Monet, Christian AvrilC’est une chose précieuse d’avoir un peintre pour animer la rue du village. On ne se lasse pas de regarder comment un tableautin se fait, touche après touche. Pour les enfants, pour tous ceux qui ne savent pas peindre, la naissance de l’image a quelque chose de magique.
Les instituteurs nomment le chevalet, la palette. Les étrangers se prennent en photo à côté du peintre et de son petit chien.
Après avoir admiré toutes les fleurs du jardin de Monet, vu au musée d’art américain des oeuvres d’artistes qui ne sont plus, poussé la porte de galeries aux toiles abouties, dont le format et le prix peuvent sembler intimidants, cela fait plaisir d’assister en direct à la naissance d’une oeuvre qui tiendra facilement dans les bagages, dont l’achat ne mettra pas en péril le budget des vacances, et qui fera un bien joli souvenir de Giverny.

Erythrine

erythrine crista galliSi vous deviez trouver un nom à cette plante, comment la nommeriez-vous ? Ceux qui se sont posé la question avant nous l’ont baptisée Erythrine crista galli, nom botanique où Erythrine dérive du mot grec qui veut dire rouge, et crista galli signifie crête de coq.
Rouge c’est rouge ! La plante porte aussi le joli nom d’arbre corail. D’autres comparent ses fleurs à des… pinces de homard. Bien vu !
L’Erythrine est originaire d’Amérique du Sud où elle est capable de faire de grands arbres de six à dix mètres de haut.
Chez nous la belle est plus modeste. Gilbert Vahé, le chef-jardinier de la Fondation Monet, la cultive en pot et la garde à l’ombre. Je présume qu’elle ira faire un tour en serre cet hiver, même si elle supporte un peu de gel.
L’Erythrine a un côté inattendu et spectaculaire qui attire sur elle tous les regards. Les visiteurs s’aprochent, se penchent pour déchiffrer l’étiquette… et repartent en faisant la grimace. Erythrine crista galli rouge écarlate ! Dur à lire et encore plus à retenir ! On pourrait pas faire plus simple comme petit nom ?

Ingrid libre !

Affiche Ingrid Betancourt à VernonQuelques heures à peine après l’annonce de la libération d’Ingrid Bétancourt en Colombie, une nouvelle affiche flotte déjà sur la façade de la mairie de Vernon.
Depuis des mois, c’était l’image poignante de l’otage au regard abattu qui interpellait les passants.
Avec une réactivité extraordinaire, voici le sourire d’Ingrid. La ville de Vernon a coiffé sur le poteau la municipalité de Paris, qui s’est contentée de rajouter le mot « libre ».
Mais le message reste toujours aussi sibyllin pour qui n’est pas au courant des affaires franco-colombiennes. Les touristes étrangers s’interrogeaient sur la première affiche. La nouvelle, plus souriante, va les laisser guère moins perplexes.

Record, encore

Claude Monet, Bassin aux Nymphéas, 200 x 100 cm, 1919, collection particulièreClaude Monet, Bassin aux Nymphéas, 200 x 100 cm, 1919, collection particulière

Le dernier record de vente d’un Monet en enchères publiques datait du mois de mai. Il n’aura pas tenu longtemps. La convoitise suscitée par un très beau Bassin aux Nymphéas de deux mètres carrés mis en vente le 24 juin dernier a permis à la cote de Monet d’être réévaluée à la hausse.
41 millions de livres, 80,5 millions de dollars, le montant en euros se situe quelque part entre les deux, à 51,7 millions d’euros exactement.
200 % de mieux directement, si l’on compare avec le record établi en mai par le Pont de chemin de fer à Argenteuil, une oeuvre de jeunesse pleine de lumière datée de 1873.
Claude Monet, le Pont de chemin de fer à Argenteuil, 1873, collection particulière On lit partout que l’acheteur des Nymphéas serait un Russe. J’imagine quelque nouveau magnat du pétrole ou du gaz ou du sucre en poudre, avide de s’approprier les signes extérieurs de notabilité occidentale.
J’ai beau avoir une immense admiration pour Monet, des sommes pareilles, je trouve ça indécent. A l’heure où chacun se demande comment il va faire pour remplir son chariot au supermarché, il en est qui exhibent sans pudeur leurs millions dans les ventes aux enchères.
C’est le moyen qu’ils ont trouvé pour savoir qui a la plus grosse, de bourse.

Claude Monet, le Pont de chemin de fer à Argenteuil, 1873, collection particulière

Philippe Delerm

Philippe Delerm, Traces, Editions FayardLe dernier Delerm est une merveille. Il s’appelle Traces. Delerm s’attache à des traces de ce qui a été, des affiches, des graffiti, des pierres tombales, des noms de rues, des bateaux abandonnés… De sa langue précise, précieuse, il décortique les signes. Il a l’entêtement d’un Proust à analyser le sens de ce qui s’offre et se dérobe en même temps.
On déambule dans un Paris où le passé s’effrite, des boucheries chevalines transformées en boutiques chics, des marchands de livres d’occasion annotés par leur ancien propriétaire, des ruelles pavées où courent encore des rails devenus inutiles… On lève les yeux vers le panache laissé par un avion. On s’arrête pour déjeuner dans un bistro où la table a bien vécu.

Philippe Delerm est Eurois. Je ne sais si cette proximité géographique est pour quelque chose dans les affinités particulières que j’ai pour cet auteur. Je me souviens du temps d’avant La première gorgée de bière, quand il écrivait dans le magazine de l’Eure Inter. Il décrivait des balades dans le département, qui sont devenues après coup Les chemins nous inventent.
Le saisissement de découvrir cette prose si incroyablement littéraire et poétique, une pépite au milieu du magazine. Sa petite photo en vignette, où il avait la barbe bien sombre encore.
C’est dans ce contexte-là que Philippe Delerm a écrit un très beau texte sur Giverny. Comme dans Traces, il est illustré de photos esthétiques, émouvantes, prises par sa femme Martine Delerm.
C’est tellement beau et tellement juste, il y a une dizaine d’années j’ai écrit à Philippe et Martine Delerm pour leur demander l’autorisation de publier ce texte sur internet.
J’ignorais leur adresse complète, je ne connaissais que leur commune de résidence. Visiblement la lettre leur est parvenue puisque j’ai reçu en réponse l’autorisation demandée. Malicieusement, Delerm avait omis le nom de la rue lui aussi. La lettre m’est arrivée quand même, bien que je sois une parfaite inconnue dans une commune nettement plus peuplée, merci la Poste.

Cela m’a amusée de trouver dans Traces un chapitre sur les lettres autographes.

Bien sûr, c’est de Baudelaire, de Vigny, de Picasso, de Monet, d’Apollinaire. Ce n’est pas pour autant du Baudelaire, du Vigny. C’est même plutôt le contraire : l’aveu d’une normalité qui ne les a pas empêchés d’enfermer ailleurs, dans un autre cadre, un autre espace, la seule chose qui ait du prix : leur différence.

Je regarde la petite lettre autographe que je possède de Philippe Delerm, et je me dis que c’est tout-à-fait ça, de Delerm mais pas du Delerm.
N’empêche, dans ce chapitre de Traces, on trouve deux occurences du nom de Monet.

Erable du Japon

Erable du Japon à Giverny

Le parasol ample

une dentelle rouge pourpre s’étend

érable japonais

Anaëlle

La barque de Monet

La barque de Monet à Giverny

Barque sous les bambous

bourdonnement des moustiques

la rivière s’’agite

Lirann

Tulipe rose enfance

Parterre de myosotis

la tulipe rose enfance

baigne dans le bleu océan

Maxime K.

Reflet de myosotis

Reflet de myosotis à Giverny

Sur l’eau transparente

des myosotis penchés

miroir bleuté

Emma

Structure

Structure du jardin de Monet à Giverny

Devant la maison

un jardin strictement rangé

calendrier de fleurs

Paul

Larmes de saule

Saule pleureur à Giverny

Tristesse ruisselante

Comme larmes d’enfant filandreuses

le saule pleureur

Gabriel

Le saule pleureur

perd ses branches en larmes

un enfant pleure

Romain

Pièces d’or

Gingko Biloba, l'arbre aux écus

Au bout de l’allée

le soleil brille sur un arbre

reflet de pièces d’or

Loann

Un monde flottant

feuilles de nénuphar L’étang de Monet

sur l’eau sinueuse et pure

ronde de nymphéas
Niels

Coeurs fleuris humides

ondulent en harmonie

nénuphars flottants
Gabriel

Nénuphar en fleur

sur l’eau chaude du printemps

un lit de pétales roses
Louise


Haïku

Glycine à GivernyQuoi de mieux que des haïkus, ces courts poèmes japonais de dix-sept syllabes, pour évoquer le jardin de Monet à Giverny ?
Le maître de l’impressionnisme a donné une touche japonisante à son jardin d’eau en y introduisant glycines, pivoines et bambous.
Mais puisque son jardin reste malgré tout très français, l’idéal est d’écrire les haïkus dans cette langue !
Les enfants de Mareil Marly dont je vous parlais hier ont peint et composé des vers, ils ont aussi imaginé de merveilleux haïkus.
Ils méritent une belle image, je vous propose de les découvrir dans les prochains jours illustrés de photos prises à Giverny.
Voici ceux de Lucas et Pierre qui évoquent la glycine. Si les rêves avaient une couleur…

Le pont japonais
grappe de glycine envoûtante
cascade violet-rêve

Lucas

Agrippée au pont
la glycine violet-rêve
odeur reposante

Pierre

Au jardin du peintre

fresque au jardin du peintreL’oeuvre de Monet, peintures et jardins, est un support pédagogique très riche pour les enseignants. A l’école les Violettes de Mareil Marly, dans les Yvelines, la classe de CM1-CM2 a travaillé toute cette année scolaire sur le thème du jardin.
Voici la fresque que les enfants ont réalisée à l’éponge et au pinceau après leurs visites à Giverny et à l’Orangerie. La porte du préau donne l’échelle. Quelle belle harmonie de couleurs !
Le projet ne s’arrêtait pas à ce travail d’arts plastiques de grande ampleur. L’originalité a été de l’associer à un atelier d’écriture. Lors de leur visite à Giverny, les enfants ont noté des mots, des sensations, des couleurs, des odeurs, puis ils en ont fait des poèmes.
Comme je ne pouvais pas les publier tous, j’ai gardé un vers de chacun, et seulement trois de leurs conclusions.
En les lisant j’ai eu l’impression de me promener avec les enfants dans les jardins quand ils ont leur parure de printemps, à la mi-mai. Ils ont su retranscrire avec justesse ce qu’ils ont ressenti. C’est une poésie impressionniste, faite de petites touches de couleur pure.

Au jardin du peintre

Au jardin du peintre,
Il y a la bambouseraie aux mille bambous tout droits comme des soldats au garde-à-vous
Il y a le saule pleureur, il pleure de ses larmes naturelles
Il y a le myosotis mousseux, il sert de tapis aux tulipes majestueuses
Il y a le rhododendron rose fuchsia, il coud son écharpe dentelée
Il y a l’érable du Japon, il se prend pour un parasol
Il y a la treille de glycines, elle survole le pont japonais
Il y a la tulipe perroquet, elle se tient droite comme le peuplier, ses dentelles blanches dansent sur le col de sa robe
Il y a la pensée orange coucher de soleil, elle est au bord de l’eau
Il y a le nymphéa en forme de cœur
Il y a la tulipe rouge rubis, elle brille au bord de l’eau
Il y a le paulownia grandiose, il nous fait de l’ombre
Il y a le moineau accroché sur sa feuille
Il y a la giroflée d’un orange poli
Il y a la maison de Monet à l’allure dominante
Il y a le poisson immense passant sous le pont
Il y a l’odeur envahissante des fleurs
Il y a la pâquerette double, elle dresse ses pétales doux
Il y a l’azalée violet rêvé,
Il y a le bambou droit comme un trait tracé à la règle
Il y a le vent et son souffle léger et agréable, il fait résonner le chant aigu des oiseaux
Il y a la pelouse verte aux reflets bleutés
Il y a le grand hêtre pourpre
Il y a l’allium vert fluide
Il y a l’oranger du Mexique avec ses feuilles vert lumineux
Il y a le pont japonais courbé au dessus de l’eau

Mais, il y a surtout le peintre qui donne vie à sa peinture.
Mais, il y a surtout un maître pinceau derrière tout ça !
Mais, il y a surtout la magie d’un travail exceptionnellement incroyable.

Agapanthe

Agapanthe et rosesAimez-vous les agapanthes ? C’est la question que je ne peux m’empêcher de poser ces temps-ci à tous les visiteurs que je guide dans les jardins de Monet, histoire de leur rappeler discrètement le nom de la fleur et d’attirer leur attention sur ce massif spectaculaire.
En ce moment les agapanthes du jardin d’eau sont magnifiques. Leurs têtes bleues s’élèvent haut, à plus d’un mètre du sol, mais loin d’être altières elles se penchent pour faire la causette aux roses.
L’harmonie entre ce bleu et ce rose d’une égale douceur est à tomber par terre.
L’agapanthe sous nos climats n’est pas une fleur banale. Elle a quelque chose de sophistiqué qui fait qu’on la remarque, avec sa façon de monter monter pour finir par exploser en un petit feu d’artifice. Oh la belle bleue !
Claude Monet, Nymphéas et agapanthes, 1914-1917, 140x120cm, musée Marmottan, ParisSi l’agapanthe joue les stars chez nous, il n’en va pas ainsi partout. Chaque fois que j’ai des clients australiens ou néo-zélandais, ils me le confirment : là-bas les agapanthes poussent comme du chiendent. « On les considère comme des mauvaises herbes ! »
Elles envahissent les talus, les bords de route, les terrains les plus ingrats. L’agapanthe est la valériane des terres australes, semble-t-il.
Je me demande quel effet cela doit faire de se balader de l’autre côté de la planète, et qu’on vous montre fièrement, disons, un massif de pissenlits ?

Claude Monet, Nymphéas et agapanthes, 1914-1917, 140 x 120 cm, musée Marmottan, Paris

Derrière le buisson

buisson à Giverny Comment ça se traduirait, Bush, en français ? Buisson, sans doute, ou encore broussailles, taillis, fourré. Il y a aussi cette expression géniale de hair bush, une tignasse. J’espère que cette photo prise dans un angle du jardin fleuri de Monet est assez évocatrice d’un bush. Ce qui est sûr, c’est que Monet ne cherchait pas à faire un jardin bien peigné.

J’aurais pu vous parler plus tôt de la visite de la First Lady à Giverny. Mais pour une fois que mon petit sujet de blog rejoint l’actualité journalistique, ça coince, plus envie de parler de news, malgré ce titre de Giverny News choisi il y a très longtemps.
Samedi dernier j’ai croisé à Vernon tout un cortège de voitures officielles emmenées par des motards, et il m’a fait perdre le feu vert. Mon sentiment égalitaire s’agace de ce genre de choses. Les VIP sont-ils vraiment si pressés ?
Qu’est-ce que c’est que ces huiles, me suis-je demandé. Ils vont sûrement à Giverny.
Une heure et demi plus tard, le cortège est repassé dans l’autre sens, alors que je me rendais à mon tour à la Fondation Monet. C’est là que j’ai appris l’identité de la personnalité. Madame Bush soi-même ! Elle est venue (presque) toute seule, elle faisait du tourisme pendant que son petit mari faisait de la politique à Paris, chacun son truc.
Personne ne la reconnaît en France, elle pourrait profiter de cette impression grisante d’incognito, mais c’est bien trop dangereux puisque ses ennemis éventuels la connaissent, eux, quel que soit l’endroit où elle se trouve.
C’est le poids de la haine, tout ce déploiement de force. Laura Bush ne se déplace pas sans une bonne escorte. Ses gardes du corps sont essentiellement des femmes, d’ailleurs.
Madame Bush est efficace. En une heure et demie, elle a réussi à voir à la fois le musée d’art américain et le musée Monet. Elle s’est beaucoup intéressée aux expositions de peintures présentées dans le premier, car elle a retrouvé des noms d’artistes qu’elle connaissait pour avoir déjà vu des toiles d’eux à la Maison Blanche. Ça doit faire un peu le même effet qu’à la brocante quand on reconnaît le service à thé de sa grand-mère, j’imagine.
Après 45 minutes devant les tableaux, Madame Bush n’a pas traîné chez Monet. Dans la maison, elle a zappé les chambres à l’étage, elle n’a vu que le rez-de-chaussée. Tant pis pour la vue sur le jardin.
Et pas le temps d’aller regarder de près ce qui se cache derrière les buissons.

Reflets roses

Reflets rosesL’embarcadère aux roses se reflète dans l’étang de Claude Monet à Giverny.
Quand la surface est tendue comme un miroir, qu’elle renvoie l’image de la berge ensoleillée, on se perdrait comme Monet dans la contemplation infinie des reflets.
Il y a quelque chose de fascinant dans ce monde à l’envers. Le changement de repère spatial, bien sûr, rappelé par la présence des nymphéas, mais aussi l’aspect virtuel des choses. Les reflets proposent une apparence qu’on peut comparer à chaque instant avec l’original, la réalité tangible.
Le miroir de l’eau est le point de contact entre le réel et le virtuel.
La peinture est venue, puis la photo, le cinéma, la télé, le net, et nous voilà aujourd’hui entourés de représentations dont les originaux se trouvent inaccessibles dans l’espace ou dans le temps.
C’est notre mythe de la caverne à nous, cette façon de vivre de plus en plus dans la virtualité, dans la communication assistée par l’électronique.
Mais ce matin, quand j’ai pris cette photo, les reflets s’étendaient vraiment devant mes yeux. Étaient-ils réels ou virtuels ?
Ouh là là ! J’arrête avant la migraine ! Déjà qu’il faut se tordre le cou pour voir la photo à l’endroit !

Jean Cossart

portail Nord de la cathédrale d'EvreuxSuivez la flèche ! Tel est le message du magnifique portail Nord de la cathédrale d’Evreux.
Les gâbles droits ou curvilignes s’enchaînent pour guider le regard vers le haut.
Les yeux se lèvent, glissent toujours plus haut sur la façade, jusqu’à la grande flèche de la cathédrale qui pointe en direction du ciel.
L’auteur de cette merveille est connu. Il se nomme Jean Cossart.
Cossart oeuvre en tant que maître maçon à Evreux au début du 16ème siècle. C’est l’apogée de l’art gothique flamboyant, quand il devient dentelle de pierre d’une finesse inégalée.
« Les traceries envahissent tous les espaces libres jusqu’au pignon qui ressemble à une vaste broderie, » décrit Jacques Beaudoin (in La sculpture flamboyante, Normandie-Ile de France).
Lorsque Jean Cossart meurt en 1517, le bras nord du transept est presque achevé. Il ne reste qu’à garnir la rose de vitraux. En hommage au maître-maçon, son effigie apparaît dans la rose du jugement dernier, du côté des élus comme il se doit.

Couleur changeante

rosier grimpant jaune et blancCe rosier grimpant aux jolies petites fleurs simples se trouve dans le jardin d’eau de Monet, près du « lac », comme disent les enfants.
Le mélange du blanc et du jaune est d’un effet très heureux, très frais.
Ce rosier a la particularité d’avoir des fleurs qui changent de couleur.
Les boutons floraux sont jaunes, de même que la fleur quand elle vient de s’ouvrir le matin, un ravissant jaune paille entourant un coeur aux riches étamines d’or.
Mais si on revient l’après-midi, surprise ! Toutes les fleurs sont blanches !
On dirait qu’elles pâlissent au soleil, comme si la lumière les décolorait.
Avec le temps les pétales changent encore, ils se couvrent de taches roses.
Le plus étonnant est de pouvoir observer presque à vue d’oeil la transformation de la fleur.
Las ! Voyez comme en peu d’espace, elle a dessus la place ses beautés laissé choir !

Support à rosier

Support à rosierDans les jardins de Monet à Giverny on utilise encore toutes sortes de supports métalliques pour les rosiers grimpants. Ils ont été dessinés il y a plus d’un siècle par Georges Truffaut.
Ce célèbre pépiniériste était un grand ami de Claude Monet. Il a imaginé des trépieds comme celui-ci, sur lesquels on enroule les branches des rosiers – une opération qui demande un réel savoir-faire – mais aussi d’autres modèles comme les classiques arceaux qui se répètent pour former une pergola.
Des parapluies d’environ deux mètres de haut sont destinés à conduire des rosiers en arbre. Les roses partent du centre et retombent en pluie vers les côtés.
Le modèle de support le plus étrange et le plus élevé est une tour qui se termine comme un jet d’eau, recouverte de petites roses roses.
Les rosiers grimpants ne sont pas réservés au clos fleuri. Au bord du bassin, au niveau de l’embarcadère, les arceaux sont disposés en croix. On se croirait dans le transept d’une église, entouré de tous côtés par des arcades.