Oeuvre de titan
Voici la partie gauche de Bassin aux nymphéas avec iris de Claude Monet, un tableau monumental de 6 mètres de large par 2 mètres de haut qui se trouve à la Kunsthaus de Zurich, en Suisse.
Un immense Monet de deux mètres de haut, cela rappelle ceux de l’Orangerie, et pour cause. Non content de couvrir 182 mètres carrés de toile pour décorer les cimaises du musée parisien, Monet a peint beaucoup plus de panneaux qu’il n’en fallait.
Il voulait pouvoir choisir ceux qui s’intégreraient le mieux à la composition d’ensemble. Ce n’était pas une mince affaire, c’était une donation faite à la France, son testament pictural !
Monet se met à cette oeuvre de titan à 76 ans, quand il fait construire un atelier adapté à des toiles de grandes dimensions. Il sait que c’est « au-delà de ses forces de vieillard ». Il souffre de la cataracte, il voit de plus en plus flou, des couleurs faussées.
Et pourtant il s’acharne à peindre. Debout face à la toile, il lutte. Il sent la mort qui approche, mais tant qu’il peint, il vit. Une joie l’anime, la joie de créer.
Dans sa fièvre de travail Monet a produit 77 mètres linéaires de tableaux supplémentaires, soit 154 mètres carrés « de trop ».
Ces oeuvres écartées sont bien sûr de la même qualité que les Nymphéas de l’Orangerie. Leurs dimensions hors normes leur ont valu d’être acquises davantage par les musées que par les particuliers.
Alors qu’un Monet sur deux est en collection privée, on peut admirer preque tous ces Bassins en collections publiques à New-York (24,75 mètres linéaires de Grandes Décorations de Monet), à Zürich (10,25m), à Bâle (9m), à Pittsburgh (6m), à Cleveland, Ohio, à Saint-Louis, Missouri, à Kansas City, Missouri et à Londres (chacun 4,25m). Sans oublier les 91 mètres de l’Orangerie à Paris.
Le Bassin aux Nymphéas
Il y a des toiles qui vous estomaquent. « Cela vous fait de l’effet », disait Monet. C’est le but recherché par les artistes dans les grands formats, mais les dimensions monumentales ne suffisent pas. Il faut aussi une présence de l’oeuvre, quelque chose qui ne peut se dire, une vibration qui vient résonner en vous.
A la Tate Gallery de Londres, cette peinture immense (2m x 4,25m) est de celles qui vous cueillent par surprise. Elle a l’air presque anodine réduite à un petit format.
Avez-vous remarqué ? Quand on vient de visiter un musée et qu’on regarde les cartes postales tirées des oeuvres, on est presque toujours déçu. La reproduction fait pâle figure quand on a encore en tête l’émerveillement produit par l’original.
Monet peint la surface de son bassin de Giverny, captivé par les jeux de la lumière et des reflets. Quel moment de la journée est-ce, quelle saison ? On a du mal à le dire. Le peintre surfe à la limite du figuratif et de l’abstraction. En communion avec la nature, il essaie de provoquer chez le spectateur la même impression d’immersion dans le motif.
Toute référence directe à la berge écartée, nous flottons entre ciel et eau dans des harmonies de pure couleur, des teintes subtiles de mauve et vieux rose auxquelles répondent des verts tilleul et moutarde, des éclats d’or fondu.
La forme est dissoute, à peine devine-t-on quelques nénuphars en suspension, quelques branches de saule reflétées, simples prétextes à des déclinaisons colorées.
On ignore à quelle date Monet a peint ce Bassin aux Nymphéas, certainement après 1916 quand il dispose de son troisième atelier. Monet l’a-t-il peint sans savoir ce qu’il allait en faire, comme les autres toiles monumentales exécutées pendant la guerre, ou après la victoire dans le but de l’intégrer à son don à l’Etat ?
Quoi qu’il en soit, il ne retiendra pas ce panneau dans la composition finale pour le musée de l’Orangerie à Paris.
La National Gallery de Londres en fait l’acquisition en 1963.
Aquarelle
L’aquarelliste et le vieux moulin, Patrice Levoin
Patrice Levoin, un artiste peintre installé dans la région bordelaise, est originaire de Vernon.
C’est ainsi qu’il s’est promené sur givernews.com et qu’il m’envoie aujourd’hui deux de ses vues du vieux moulin.
C’est vraiment extraordinaire, la peinture. Voilà le même site peint par le même artiste dans le même médium, et pourtant on a peine à croire à la parenté de ces deux aquarelles : quel écart entre ces deux Vieux Moulins !
Sensibilité, humeur et technique façonnent l’oeuvre au même titre que la lumière du jour.
Vernon le vieux moulin, Patrice Levoin
Success Story
Bon nombre des estampes japonaises de Monet sont revenues sur les murs de sa maison. Le raccrochage s’est fait progressivement au cours de l’été, avec surtout des triptyques et des estampes de grand format.
C’est un art fascinant que celui des estampes, mais il n’est pas facile à percer. A la boutique de la Fondation Monet, j’ai trouvé un livre qui je l’espérais me permettrait d’en savoir plus : « L’Estampe Japonaise » de Gabriele Fahr-Becker, éditions Taschen.
L’intérêt de l’ouvrage tient surtout à ses reproductions pleine page de très nombreuses gravures. Le texte est émaillé de mots japonais, parfois à tel point qu’il en devient fastidieux :
(P. 44) Cette estampe nous montre Danjuro II dans le rôle de Soga no Goro du kyogen intitulé « Yuzuriha nemoto Soga » représenté au théâtre Nakamura la 12ème anée de l’ère Kyoho (1727). »
Je ne sais pas si j’arriverai à en tirer quelque chose. Mais un petit texte imprimé sur le rabat de la couverture et sans rapport direct avec le contenu du livre m’a beaucoup fait rêver.
« L’Estampe Japonaise » a été publié en 2005, l’année des 25 ans de la maison d’édition. Taschen en profite pour raconter sa success story.
Écrire sa propre légende est un exercice qui répond indéniablement à des règles implicites. Cela m’a fait penser à l’histoire de Daniel Terra, le fondateur du Musée américain de Giverny, ou encore à Claude Monet revenant sur son passé alors qu’il avait atteint la gloire.
Il y a ce que l’on dit, ce que l’on occulte, un mélange d’apparente sincérité et d’omissions calculées, le tout forcément teinté d’humour et d’auto-dérision pour se faire pardonner d’avoir réussi.
Au départ le héros est quelqu’un comme tout le monde ou presque. En lui sommeille le génie mais personne ne le sait encore, peut-être même pas lui :
La grande aventure TASCHEN débute en 1980, quand Benedikt Taschen, alors âgé de 18 ans, ouvre une boutique en Allemagne, dans sa Cologne natale, pour écouler son immense collection de bandes dessinées.
Le héros est jeune, c’est préférable mais cela ne suffit pas, j’en connais d’autres qui avaient 18 ans en 1980 et n’ont pas fait fortune pour autant. Tous les ados caricaturistes ne sont pas devenus des Monet non plus.
Le héros a un côté dilettante et mono-maniaque qui a de quoi exaspérer son entourage. Comment réagissaient papa et maman Taschen face à leur fils toujours plongé dans ses sempiternelles BD ? Et d’abord, comment se les procurait-il ?
Personne n’est assez stupide pour croire qu’on devient riche en vendant d’occasion ce que l’on a acheté neuf, même si cet épisode dénote du soin et de l’organisation. Le déclic se produit un peu plus tard, en 1984, quand
il rachète 40 000 invendus d’un ouvrage en anglais sur Magritte et les revend à une fraction du prix original.
Pouce ! Je voudrais comprendre ce ressort essentiel, comment on passe de la boutique au business international. Où B. Taschen a-t-il trouvé ce stock impressionnant au prix du pilon ? Et les fonds nécessaires à cet investissement important ? Comment a-t-il écoulé ensuite tous ces Magritte en anglais ? On ne le saura pas. Ce que le rédacteur veut mettre en avant, c’est l’audace, le flair, l’esprit d’entreprise extraordinaires de cet autodidacte. Monet aussi était rebelle aux études…
Ensuite, l’histoire de Taschen devient moins surprenante. Il juge que
les livres d’art sont trop chers et difficiles à trouver.
Il fait le pari de l’édition de masse à prix démocratisés, en commençant par les artistes les plus populaires, Picasso et van Gogh. Il n’est pas très étonnant que de tels produits aient marché. Mais encore une fois tout un savoir-faire d’éditeur et de distributeur est présenté comme allant de soi. Pourtant il y a tant d’embûches sur la route d’une entreprise, tant d’occasions de la faire capoter que le succès suppose d’avoir su faire à chaque fois les bons choix.
Quant à la gloire en art, elle est encore plus incertaine puisqu’elle doit tout à la reconnaissance de la part de ses contemporains.
Le génie n’a rien à voir avec elle, il peut éclater a posteriori ou demeurer incompris, comme un fleur merveilleuse qui s’est épanouie pour personne.
Première découverte préhistorique
N’importe quel enfant d’aujourd’hui sait vous parler des hommes préhistoriques. Pas moyen de coller un écolier sur leur façon de se vêtir de peaux de bêtes, de tailler des pointes de lance dans la pierre, de faire du feu avec des silex et de chasser le mammouth.
Ce savoir nous paraît si évident qu’on en oublierait que cela n’a pas toujours été le cas. Au 17e siècle, par exemple, on ignorait tout de la préhistoire. Le passé le plus ancien remontait à l’Antiquité et, chez nous, aux Gaulois.
Cette « naïveté » fait toute la saveur du récit de la première découverte archéologique relatée au monde, en 1685. Elle s’est passée tout près d’ici, dans un village de la vallée d’Eure qui s’appelle Cocherel et qui s’est aussi rendu célèbre pour d’autres raisons.
Le seigneur de l’endroit avait besoin de pierres de taille, or tous les tailleurs étaient réquisitionnés sur le chantier du château de Maintenon. Il a voulu réemployer de belles pierres qui se trouvaient dans un de ses champs. Il ignorait qu’elles fermaient une tombe, encore plus que celle-ci datait du néolithique.
On a dépêché sur place le juge et le curé ainsi que quelques paysans. La question importante était de savoir s’il s’agissait d’une sépulture chrétienne ou non. Ayant remarqué par leurs observations que les défunts étaient idolâtres, les notables locaux en ont conclu qu’on pouvait sans scrupule profaner le tombeau.
Le texte décrit minutieusement cette toute première découverte archéologique. C’est tout à fait étrange de se mettre dans la peau de ces hommes du 17e, avec leurs préoccupations, leur logique et leur langue.
Ce récit est si évocateur que j’ai cherché à retrouver l’emplacement du cimetière préhistorique, qui selon Théodore Michel existait encore au milieu du 19e siècle. A mon grand désappointement, je n’ai pas pu le localiser.
Première gelée
Manque de chance, il a gelé cette année à la fin octobre. Le plus souvent les gelées nocturnes ne se produisent pas avant la Toussaint. Mais trois nuits trop froides ont dévasté le jardin de Monet dix jours avant la fermeture.
Je n’étais pas très fière de montrer à mes clients le clos normand en piteux état, même si personne n’y est pour rien, cela n’a tout de même rien à voir avec le spectacle enchanteur qu’il offre d’habitude. Mais il restait le bassin et sa douce mélancolie, il restait la maison de Monet toujours aussi belle.
Et puis j’ai pris l’appareil photo et je me suis approchée des dahlias roussis, des asters ébouriffés, des roses d’Inde flétries, des rudbéckias desséchés, des capucines anéanties.
Ils avaient des allures curieuses, leurs pétales plaqués comme s’ils sortaient de la douche, ou encore entortillés en écharpes, leurs jupes froissées et pendantes…
Ils semblaient exténués par une longue bataille contre le gel, où seules demeuraient victorieuses les dernières roses de la saison.
Ils m’attendrissaient comme le doux visage de ma grand-mère tout sillonné des marques du temps.
Automne à Giverny
Voilà à quoi ressemblait l’étang du jardin de Claude Monet fin octobre à la veille de la fermeture.
Les plantes n’ont pas toutes les mêmes réactions face à l’arrivée de la fraîcheur et à la baisse de la luminosité. Chacune a son rythme pour piger que c’est l’automne.
Le liquidambar répond tout feu tout flamme ; les rosiers rosissent ; les saules pleureurs poursuivent leurs lamentations ; la glycine se sent encore pleine de verdeur.
Et le petit chemin chemine de pont en pont, à la jonction des végétaux et de leurs reflets.
Fleurir une tombe
On fleurit les tombes à la Toussaint. Pourquoi ? C’est une question qu’on ne se pose même pas. On pourrait aussi bien, je ne sais pas, les couvrir de feuillages, de cendres, de sucre, de papier doré, allumer des bougies, y déposer des photos… Non. C’est à la grâce et à la fragilité des fleurs qu’incombe la tâche d’honorer nos morts.
En novembre le choix n’est pas immense, ce sont les variétés de fin de saison les plus résistantes qui tiennent la vedette. Les bruyères et tous les chrysanthèmes, jaunes, violets, mordorés, qui rivalisent d’énormité grâce au talent des obtenteurs.
On arrive au cimetière avec sous le bras les potées qui ont poussé fort à propos à l’entrée des supermarchés fin octobre. On se sent un peu embarrassé.
On retrouve la tombe avec une efficacité proportionnelle à la taille du cimetière et à la constance des visites. On pose le pot de fleurs devant, et puis… rien. On se concentre pour évoquer mentalement le disparu, on se sent un peu gauche. On s’en va.
C’est un peu court comme rituel. Il faudrait des gestes plus lents, moins furtifs pour se donner le temps du souvenir.
J’ai été saisie par cette sépulture couverte d’un somptueux manteau de fleurs. Je me suis sentie proche de cette personne aimante qui a patiemment détaché les têtes des fleurs pour les arranger sur la dalle funèbre de Robert Leclerc, décédé il y a seize ans. Le deuil sans doute s’est estompé, il reste le cadeau de ce temps passé à répandre des pétales au-dessus de la dernière demeure de la personne aimée, cette offrande de beauté éphémère.
Si on a choisi les fleurs, c’est peut-être parce qu’elles fanent et qu’elles symbolisent la brièveté de la vie.
C’est peut-être aussi parce que dans chaque fleur il y a fêlure, comme celle que laisse en nous le départ de ceux qui nous ont été chers.
Regagner ses pénates
Je suis rentrée au bercail. J’ai regagné mes pénates.
Il y a des mots qu’on n’a pas souvent l’occasion de placer dans la conversation. Dans quelle autre circonstance parler de bercail ou de pénates ? Voilà des noms vieillis qui survivent momifiés dans des expressions immuables, ces façons de parler qui sont le sel de la langue, qui élargissent et imagent le lexique, qui nous offrent des ressources prêtes à l’emploi pour exprimer ici une action bien courante et banale, celle de rentrer chez soi.
Retourner au bercail, la métaphore est mignonne qui fait de nous des brebis rejoignant leur bergerie. Cela sent bon la ruralité d’une France toute vouée naguère à l’élevage et à l’agriculture.
Pour les pénates, la référence est plus lointaine dans le passé. L’expression apparaît au 17ème siècle en pleine vogue de l’antiquité romaine. On se souvient alors que les pénates étaient des dieux domestiques protecteurs du foyer chez les anciens Romains. Par extension, le mot s’est appliqué ensuite au domicile.
Le Robert qualifie les deux expressions de plaisantes. Je ne sais pas si cela vous arrache un quart de sourire intérieur, leur humour d’origine s’est bien émoussé au cours des siècles.
S’il en reste quelque chose dans l’idée de retrouver ses pénates, cela tiendrait plutôt à des assonances dues au hasard. Derrière le mot du langage soutenu pénates s’en profilent deux autres qui font curieusement sens, peinard et savates. Ils résument jusque dans le relâchement du niveau de langue l’idée de détente qu’on associe au fait de rentrer à la maison.
A l’extérieur, nous étions dans un rôle social, nous contrôlions notre langage, nos actions. Nous portions des chaussures adaptées au travail ou à la marche. Après tant de contraintes, de tension, nous voilà heureux de nous laisser aller à l’abri des regards dans un environnement familier, de nous défaire des souliers qui serrent pour enfiler nos chaussons imprésentables mais si confortables.
Peinards, en savates.
Bouquet
Cette devanture de fleuriste en guise de bouquet virtuel pour vous, chère lectrice, cher lecteur.
Je vais prendre une pause du blog, accaparée par un mariage pas banal.
Dans l’hypothèse où mes petites notes vous manqueraient, n’hésitez pas à taper dans les conserves, les étagères sont bien garnies : 568 billets qui ne demandent qu’à être sortis du placard, il suffit de chercher à droite de l’écran la liste des archives.
Bonnes vacances à vous si vous en prenez, bon courage sinon.
Prochain billet vers la mi-novembre. Ce n’est pas le bouquet final non plus.
Sous le pont
Baissez la tête, on va passer sous le pont… Un des agréments du pont japonais que Monet a fait installer dans son jardin, c’est de donner du piment à la promenade en barque.
Malgré sa belle taille pour un bassin artificiel, on fait le tour de l’étang aux Nymphéas en quelques coups de rame. D’où l’intérêt de se glisser sous le pont pour découvrir le petit bras qui se cache derrière et qui conduit au Ru.
Par son aspect décoratif et exotique le pont japonais de Monet est une fabrique. Mais il est plus que cela, dans cet univers de reflets où le ciel, l’eau et le végétal se mêlent.
Il est la passerelle qui relie la terre ferme et l’île.
Il permet de marcher au-dessus de l’eau, au-dessus des reflets, de se trouver physiquement en un point improbable à un mètre de la surface, dans l’air donc, pour mieux brouiller encore les repères.
Sur le pont, il arrive qu’on ressente un vertige simplement en fixant les reflets des arbres et du ciel.
Voyages
C’est une question qui revient souvent : Monet s’est-il rendu au Japon ? Quand on voit son jardin, son impressionnante collection d’estampes japonaises, ses meubles façon bambou, jusqu’à ses assiettes aux motifs de cerisiers en fleurs, on imagine que cette destination devait l’attirer beaucoup.
Eh bien non, Monet n’a jamais visité le pays du soleil levant. Son voyage le plus lointain l’a conduit en Norvège. Là, il lui a semblé retrouver le Mont Fuji de ses estampes dans la silhouette enneigée du mont Kolkaas. « On dirait le Japon », écrit-il à sa famille…
On aurait pu penser que son enfance havraise lui aurait donné le virus du voyage. Mais Monet, qui a beaucoup peint les bateaux, en a rarement pris pour voyager. Il préférait le train.
Il me semble que s’il s’est abstenu d’aller en Extrême-Orient, c’est qu’il ne ressentait pas l’appel du large. Il a fait peu de voyages d’agrément, celui en Espagne en voiture est organisé avant tout pour distraire Alice.
Monet a pourtant passé beaucoup de temps loin de chez lui. Chaque hiver ou presque il partait en campagne de peinture pour plusieurs mois, à la mer, au bord d’une rivière ou en ville, à Rouen ou à Londres.
Son ami Georges Clemenceau a davantage bourlingué, mais sans atteindre le Japon lui non plus. Son voyage en Inde en décembre 1920 est l’occasion d’une lettre à Monet sur son ton enjoué habituel :
Non il ne sera pas dit que je serai venu à Bénarès prendre le plus prodigieux bain de lumière et que je n’aurai pas trouvé un mot à dire à l’homme qui s’appelle Claude Monet.
Imaginez-vous, mon vieux frère, que vous voyiez Bénarès quand vous faisiez le Vétheuil refusé par Faure. Un grand fleuve bien clair avec une grande courbe de palais blancs qui vont s’estompant dans une poudre d’aurore. C’est une splendeur de simplicité claire qui du fleuve au ciel enveloppe toute la vie des choses. Tout de même si j’étais Claude Monet je ne voudrais pas mourir sans avoir vu ça.
Ajoutons qu’une humanité folle de couleur expressive anime tout cela. Je ne veux pas aller en Paradis si je n’y retrouve pas Bénarès, et les fleurs, et le culte insensé et pourtant explicable de ces bonnes vaches sacrées qui venaient ce matin me manger les colliers fleuris dont on m’avait enguirlandé. Et tout. Croyez-moi fichez l’ange bleu dans une malle si elle récalcitre et arrivez-moi tous les deux. Dépêchez-vous. Je pars demain matin. Java est merveilleux, Ceylan est admirable. Mais rien ne tient devant Bénarès.
Quel dynamisme à 79 ans ! Pour ce grand voyage en Asie du Sud Est, Clemenceau s’est embarqué en septembre 1920, il n’est revenu qu’en mars de l’année suivante. Il n’est pas dupe de ce qu’il écrit, Monet et Blanche ne risquent pas d’arriver tous les deux, mais on sent tout son désir de partager avec le peintre les paysages qui l’éblouissent.
Toile d’araignée
Un matin de brume automnale dans les jardins de Monet : est-ce l’approche d’Halloween ? Les araignées ont enguirlandé tous les buissons, tous les branchages, à la manière de Christo et Jeanne-Claude.
Les araignées qui ont tissé avec patience toutes ces toiles pensaient jouer un tour aux insectes. Au final ce sont elles qui ont été bien attrapées par le brouillard. Il s’est déposé en milliers de gouttelettes tout au long des fils arachnéens. Les voilà surlignés de perles aux reflets argentés, eux qui avaient l’ambition de passer inaperçus… Les insectes se laisseront-ils encore prendre ?
La masse des gouttelettes a donné une pesanteur nouvelle à la toile d’araignée. Elle pend comme un tissu. Le frêne l’a attrapée du bout des doigts et s’apprête à faire la révérence.
Porte de cave
La plupart des maisons de Giverny possèdent une cave. Cela vient peut-être du passé viticole du village, même si ce n’est pas le seul usage d’une cave, loin s’en faut.
Les caves sont souvent des constructions en pierres de taille très soignées, voûtées, assez hautes pour qu’on s’y tienne debout. La maison de Monet a la sienne, de même que sa voisine la maison du Hameau.
C’est dans cette demeure fréquentée il y a un siècle par plusieurs peintres de la colonie américaine que se trouve cette curieuse porte de cave.
Le haut de la porte qui s’inscrit dans l’arrondi de la voûte se rabat, ce qui permet selon les besoins d’aérer ou de fermer en cas de gros écarts de température.
Vous aurez remarqué au passage le délicat bleu pâle qui orne toutes les huisseries, et que l’on retrouve dans certaines peintures de Frieseke exécutées dans ce jardin.
Vigne vierge
A Giverny, la maison de Claude Monet et ses voisines sont couvertes de vigne vierge. En ce moment ce manteau vient de virer au rouge, ce qui leur donne quelque chose du Père Noël.
Il y en a de toutes sortes, des vignes vierges vraies et fausses, à crampons, à vrilles, soigneusement taillées ou un peu envahissantes.
La vigne vierge fait aux maisons le pelage des caniches, avec toilettage obligatoire plusieurs fois par an. Mais quel luxe de leur offrir cette flamboyante parure végétale !
Le palais de la vogue
Souvent les noms d’anciens commerces depuis longtemps disparus fleurissent encore aux façades. Personne ne s’est soucié de les effacer. Ils ont perdu leur fonction de communication, ils annoncent dans le vide la présence de la boutique, décalés par rapport à l’époque. C’est précisément ce décalage qui les rend souvent touchants, amusants.
Il y a des modes dans la calligraphie, des types même de commerces qui n’existent plus, des façons de parler et de nommer qui n’ont plus cours… Prenez par exemple ce « palais de la vogue » qui s’étale à Vernon sur un immeuble datant visiblement de la Reconstruction d’après-guerre, vers les années cinquante. Ce n’est pas si vieux, la graphie rigoureuse n’est pas particulièrement vieillotte, et pourtant, quel nom suranné ! Imaginez-le deux secondes sur la devanture d’une boutique qui viendrait d’ouvrir… Effet rétro garanti.
C’est une question de vocabulaire et de figures de styles. Avec palais, on est dans l’hyperbole. L’exagération a pour but de grossir artificiellement la surface de vente, le choix proposé, la qualité de la marchandise.
Tout le monde aime les hyperboles, on en emploie tous les jours, il suffit de se laisser aller à l’enthousiasme ou à l’emportement, c’est hyper trop méga génial pour exprimer les émotions.
Mais à force, ça s’use. Assez vite même. Est-ce pour cela que le mot palais a pris ce côté désuet ? On ne saurait plus l’appliquer à rien aujourd’hui, hormis au sens propre à une demeure princière urbaine. Il fait sourire sur les restaurants chinois.
L’usage de vogue a bien plongé lui aussi, peut-être parce que ce qu’il désigne est par essence bref et fluctuant : c’est ce qui est apprécié momentanément du public.
La vogue, c’était les vêtements en vogue. Au contraire de l’hyperbole, la synecdoque est une figure de style bien discrète. Prendre la partie pour le tout ou inversement passe très facilement inaperçu.
Dans son sens de nouveautés on a remplacé vogue par mode, tendance…
Une petite dernière ? L’alliance des deux mots palais et vogue tient de l’oxymore involontaire, les deux mots s’opposent par le sens. D’un côté le faste empesé d’un palais, de l’autre la futilité des longueurs de jupons…
Fermer les volets
On trouve encore chez les quincailliers du bâtiment ces jolies petites demoiselles qui servent à coincer les persiennes pour les empêcher de battre au vent pendant la journée. Le nom exact de ce bitonniau pour fermer les volets est « arrêt tête de bergère ».
La demoiselle porte une sorte de chapeau plat sur l’oreille. C’est toujours la même, comme s’il en était sorti des bataillons du même moule. Malgré sa banalité la belle garde le charme des petits détails discrets qui agrémentent la vie quotidienne. Elle donne une toute petite étincelle de poésie à ces gestes mille fois répétés, ouvrir et fermer les volets.
Soulever la tête de la demoiselle pour la faire plonger dans le vide ou la caler en place ne prend qu’un instant quand on y est habitué, mais l’objet peut déconcerter ceux qui le découvrent pour la première fois.
Il semble que ce type d’arrêt à volet est assez typiquement français. La persienne et le contrevent plein ne sont d’ailleurs pas en usage partout sur la planète et cela fait partie des détails dont les guides de voyages ne parlent jamais et que les étrangers découvrent en arrivant. Cela peut paraître idiot de leur en expliquer le fonctionnement, mais pas inutile pour leur éviter de batailler.
Le voyage se fait aussi à travers les gestes, de la courbette du salut japonais au maniement des baguettes. Et vous, quel geste propre à une autre culture avez-vous ramené de vos vacances ?
Héron
Les hérons affectionnent les prés près du confluent de l’Epte et de la Seine, entre Vernon et Giverny. J’en ai compté trois qui arpentaient avec solennité la prairie au milieu des vaches. Ils se souciaient des bovins comme d’une guigne et ceux-ci le leur rendaient bien. Rien de commun entre le régime des hérons, poissons, grenouilles, souris, insectes, et ce qui intéresse une vache, la bonne herbe verte. Le partage des lieux se fait donc sans anicroche. Alors que l’intrusion d’un chevreuil met les bovidés d’ordinaire si placides en émoi, ils piquent des deux pour courser la pauvre bête égarée qui détale sans demander son reste.
Le héron a une élégance naturelle due à sa silhouette fine et sa démarche sophistiquée. L’impression de classe dure tant qu’il n’ouvre pas le bec, car son cri n’a rien d’harmonieux. Pourquoi la nature a-t-elle mis un croassement aussi rauque dans la gorge d’un oiseau aussi racé ? Nul ne saurait être parfait, il faut laisser des charmes au rossignol.
Le Pont d’Argenteuil
Claude Monet, Le Pont d’Argenteuil, 1874
Voilà ce tableau de Monet soudainement propulsé dans l’actualité internationale. Un geste de vandalisme lui a fait défrayer la chronique pendant huit jours. Heureusement un clou chasse l’autre, et si l’actualité est une grande dévoreuse d’évènements, elle les oublie presque aussitôt. Cela devient déjà difficile de retrouver dans les moteurs l’info relative à l’intrusion au musée d’Orsay dans la nuit du 6 au 7 octobre dernier.
Pourquoi s’en prendre à un tableau ? Sans doute parce que les oeuvres de Monet sont devenues des icônes, et que leur prix vertigineux les rend follement attractives pour qui veut s’offrir un geste iconoclaste. Des actes de cette nature restent heureusement très rares. Ce n’est pas tellement cela que les chefs-d’oeuvres ont à craindre, mais le contact ordinaire du public, hélas ! qui, totalement inconscient des dommages qu’il cause, met les doigts dessus, leur donne des coups de stylo ou de feutre, les accroche de l’épaule ou du sac…
Monet peint le Pont d’Argenteuil en 1874, l’année qui voit Impression Soleil Levant faire scandale. Il représente le pont routier, pourvu d’arches et de piles oblongues (tandis que le pont de chemin de fer qui figure sur d’autres toiles est fait de piles rondes comme des colonnes et sans arches).
Le pont routier a été détruit pendant la guerre de 1870 et vient d’être refait. La reconstruction du pont est le motif de la première toile de Monet à Argenteuil.
Monet choisit un angle en direction de la promenade, vue depuis la berge du Petit-Genevilliers. Au milieu des arbres apparaît l’ancienne maison du passeur. A l’époque de Monet elle est devenue une guinguette. Argenteuil est une destination prisée le dimanche et aux beaux jours, les Parisiens viennent s’y détendre au bord de l’eau : il leur suffit de faire une demi-heure de train au départ de la gare Saint-Lazare. L’attraction principale, ce sont les régates que se livrent des voiliers semblables à ceux du tableau.
Monet a loué une maison à Argenteuil pour être au plus près de ses motifs, attiré par les jeux de l’eau et de la lumière, et par ces ponts modernes qui structurent le paysage.
Le Pont d’Argenteuil frappe par la lumière dorée qui l’inonde, l’aspect paisible de ce paysage péri-urbain vide de tout personnage, l’équilibre des masses sombres et des masses claires, et le jeu des lignes de fuite diagonales rythmées par les verticales du pont et des mâts.
Hommage à Monet
Saviez-vous que Monet était un « Serial Painter » ? L’artiste haut-normand Gérard Crépel l’a représenté debout devant la cathédrale de Rouen, un monument que Monet a immortalisé dans une série célèbre. Dans son poing serré, il tient un couteau de peintre qui dégouline de peinture rouge. Sur son ventre bedonnant, un maillot blanc porte l’inscription M THE SERIAL PAINTER. « C’est un maître… raison de plus pour le traiter légèrement », commente l’artiste.
Une exposition d’art contemporain en hommage à Claude Monet se tient jusqu’au 28 octobre à la Cave d’Arts de Louviers (rue du Quai, tout près de l’église) : occasion unique de découvrir quel regard les plasticiens d’aujourd’hui portent sur leur illustre prédécesseur.
Ils ont été 25 à se prêter au jeu à travers leurs dessins, peintures, sculptures, gravures, photos et vidéos.
L’intérêt de l’art contemporain est qu’il ne se résume pas à quelque chose d’agréable à contempler (ce qu’il peut être aussi, évidemment) mais qu’il induit une réflexion. C’est le spectateur qui finit l’oeuvre par le regard qu’il lui consacre.
Chaque artiste a choisi un angle, une approche. Pour l’un c’est le jeu des couleurs, pour l’autre la solitude de l’artiste incompris, pour le troisième c’est son jardin… On navigue d’une toile à l’autre en cherchant le lien avec Monet, la réflexion sur le métier de peintre. Quelquefois il se dérobe au premier abord pour mieux se livrer ensuite.
Quand nous avons changé de monnaie pour passer à l’euro, les billets en francs ont été détruits par la Banque de France. Ils étaient pleins de couleurs, vous rappelez-vous ? Bernadette Delrieu a demandé l’autorisation de récupérer les minuscules fragments qui sont sortis des déchiqueteuses. Elle les a patiemment collés en petits tableaux, les utilisant comme des traits de crayon. La série qui en est résultée évoque les reflets du bassin, les herbes, les saules… Elle interroge sur la valeur de l’art. Les billets démonétisés ont perdu leur valeur pour redevenir du papier coloré. L’artiste leur rend de la valeur en les transformant en oeuvre d’art. Derrière chaque coup de pinceau de Monet se cache aussi une valeur liée à la cote du peintre. Monet, monnaie, money…
Impossible d’évoquer toutes les interprétations, tous les détournements opérés par les 25 artistes. C’est décapant, émouvant, interpellant… Un grand souffle de jeunesse et de nouveauté inspiré par le maître de la lumière.
Maison du Parlement
Comment ça marche, la mémoire collective ? Qu’est-ce qui fait qu’on croit savoir mais que parfois on colporte une erreur ? A Louviers, cette maison de la rue des Grands-Carreaux est dite du Parlement. Mais aux dernières nouvelles le Parlement ne logeait pas là mais à côté, dans la maison du bailli de Louviers rue Tatin.
Pourquoi a-t-on préféré croire que c’était celle-ci qui avait reçu le Parlement de Rouen en exil en 1562 plutôt que l’autre ? Avait-elle plus le look de l’emploi, avec ses décors gothiques ? Allez savoir.
C’est une année bien sombre, 1562 ; celle de la première Guerre de Religion. En mai, la ville de Rouen tombe aux mains des protestants de Montgomery.
Vous avez déjà entendu ce nom là quelque part ? Petit anachronisme, Bernard Montgomery est un général de l’armée britannique qui a participé à la Libération en 1944, en particulier à Vernon. Il serait apparenté au Gabriel de Montgomery qui a pris Rouen quatre siècles plus tôt.
Le Parlement, c’est-à-dire la cour de justice (on l’appelait auparavant l’Echiquier) se réfugie à Louviers, une ville sûre qui appartient à l’archevêque de Rouen. De là le Parlement veut organiser la reconquête. Une seule idée en tête, tout rétablir en l’état antérieur. Comment y arriver ? Le Parlement opte pour la répression la plus dure qui soit.
Ils sont vingt et un conseillers, deux avocats du roi et des greffiers réunis sous l’autorité d’un président. Ils n’y vont pas par quatre chemins, au point de choquer l’ambassadeur d’Espagne qui se trouve là au début octobre. En trois jours celui-ci voit » trois fois pendre soixante huguenots et un ministre (c’est-à-dire un prêtre) qui avait été maître d’école, en latin, de la plupart des conseillers. » Belle reconnaissance !
Le Parlement va (heureusement ?) bientôt pouvoir regagner Rouen : la ville est reprise le 26 octobre par les troupes royales fortes de 30 000 hommes qui la pillent.
A Louviers, la maison dite du Parlement a peu à peu usurpé la place de celle du bailli. Elle vient d’être rénovée par la ville qui s’est réservé pour un usage associatif le premier étage décoré de boiseries et de poutres peintes.
Minet à Monet
Les jardins de Monet sont le domaine d’un chat. Elégante dans sa fourrure noire rehaussée d’une petite tache blanche au col, Fouinette est ici chez elle.
Pourquoi Fouinette ? Parce qu’elle avait la manie d’aller fouiner partout quand elle était plus jeune, le moindre tuyau, la machine à laver, les tiroirs, il fallait qu’elle aille voir dedans. Aujourd’hui elle est moins possédée du démon de la curiosité, elle a dix-neuf ans. Un âge hyper vénérable pour un chat mais Fouinette oublie parfois qu’elle est si vieille, elle continue à vouloir sauter d’une chaise à l’autre, et quelquefois elle rate son coup, aïe !
La plupart du temps toutefois la minette de chez Monet prend la vie du côté chat, à somnoler sur son coussin près du radiateur. Quand elle sort dans les jardins il lui arrive de rester pensive sur le perron à poursuivre son rêve, son regard d’or perdu dans le vague.
Il faut dire que la vieille chatte souffre de la même déficience visuelle que Monet : elle a la cataracte.
Mortemer
Croyez-vous aux fantômes ? A une quarantaine de kilomètres de Vernon, l’abbaye de Mortemer joue la carte des légendes qui courent sur ses vieilles pierres pour attirer les promeneurs.
Cela ne suffit pas, la sérénité de ce petit vallon du Fouillebroc, la nostalgie des ruines de l’abbatiale dont les quelques ogives et pans de murs encore debout font regretter la splendeur passée, le pigeonnier qui défie le temps, les étangs poissonneux, le chemin botanique sous les grands arbres, les beaux bâtiments classiques encore tout meublés… Il faut du frisson.
On descend dans les caves où une voix off vous conte des histoires de morts tragiques, de revenants, de louves qui n’en sont pas, de moines égorgés au milieu des tonneaux. Est-ce vraiment l’esprit du lieu ?
J’aurais aimé davantage d’explications sur la vie de cette communauté religieuse qui compta à ses plus belles heures deux cents membres. Les histoires de dame blanche m’indiffèrent, mais non la spiritualité qui a rayonné à partir de ce vallon perdu. En fait de frisson, c’est plutôt le tour en petit train, compris dans la visite qui le donne : il ne fait pas chaud le long des étangs quand le soir tombe…
L’allée des clématites
Une allée très structurée du jardin de Monet à Giverny : des supports métalliques servent à conduire des clématites et des roses, dont il ne reste que le feuillage, tandis que des ipomées garnissent le bas des poteaux.
De chaque côté de l’allée s’ouvrent de petits massifs parfumés garnis d’une profusion de plantes fleuries, qui donnent une impression de luxuriance en cette saison.
Le jardin ici ne se limite pas au plan horizontal, on le parcourt en volume.
Douceurs d’automne
Depuis le pont japonais du jardin de Monet, la grande allée qui s’étend devant sa maison apparaît de l’autre côté de la route, dans l’exacte continuité du pont.
Les fleurs des glycines qui recouvrent la passerelle ont fait place à des gousses de graines. L’une d’entre elles pend comme le battant d’une invisible cloche.
Une visiteuse m’a confié qu’elle aimait bien le toucher duveteux des gousses de glycine. L’automne est prodigue de ces douceurs tactiles, la peau des coings, les épis légers des graminées, l’intérieur des bogues de marrons… La finesse de ces velours étonne le bout des doigts.
Jusqu’à l’air qui se fait ouateux dans la brume matinale, léger et doux dans l’après-midi, pour nous laisser rêver au bord de la saison…
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