La résurrection des cloches

Clocher d'EvreuxLes cloches sonnent à toutes volées ce matin dans la joie de Pâques. A Evreux, pourtant, elles se sont tues longtemps.
Les Ebroïciens qui ont connu la guerre ont gardé des images terribles des bombardements de juin 1940 qui ont détruit une bonne partie du centre ville. L’incendie a suivi les bombes. La cathédrale a fini par être atteinte par le brasier le 11 juin.
La charpente de la flèche s’est embrasée comme un feu de la Saint-Jean. Le plomb qui la recouvrait a fondu. Sombres journées où les gargouilles crachaient du plomb…
La fournaise était telle que les cloches ont fondu elles aussi. Elles se trouvaient dans les deux tours de la façade occidentale.
Les cloches étaient faites en bronze, un métal réquisitionné pour en faire des obus. Mais une partie du bronze fondu a pu être dissimulé à l’occupant en le cachant dans le calorifère de la cathédrale.
La paix revenue, ce métal a servi à fabriquer de nouvelles cloches. Elles sont arrivées de Villedieu les Poëles un beau matin du printemps 1968, une époque où les feux de l’actualité étaient braqués ailleurs. Leur mise en place dans le clocher reconstruit a été un peu laborieuse, car elles étaient trop larges pour entrer dans la tour. Mais elles ont fini par regagner leur place et se sont remises à rythmer la vie des Ebroïciens, près de trente ans plus tard.

Mahonia

MahoniaLe truc mnémotechnique vaut ce qu’il vaut : les mahonias sont en fleur en même temps que les magnolias ces jours-ci.
Mais si à peine ouvertes les grandes fleurs blanches ou roses des magnolias tombent à la moindre goutte ou au moindre souffle, le mahonia résiste.
Rien ne l’abat. Il commence sa floraison au coeur de l’hiver et la poursuit jusqu’à ce que le printemps soit bien installé. C’est dire s’il laisse toutes leurs chances aux abeilles de venir le visiter, elles qui n’ont pas grand chose à se mettre sous la trompe en ce début de saison.
Pour être sûr de son coup, le mahonia multiplie les armes de séduction massive. Il déploie de vrais bouquets de petites fleurettes jaune citron, bien visibles contre le vert de son feuillage. Surtout, il sent très bon, un parfum puissant qui tranche avec les effluves plus suaves des bulbes de printemps.
Et puis, voilà que le mahonia se ravise. Comme une fille trop jolie obligée de tenir à distance d’innombrables prétendants, le mahonia se hérisse de piquants. Ses feuilles rappellent celles du houx, en un peu moins acéré tout de même.
Je crois que par cette armure il espère décourager les mâchoires pleines de dents qui rôdent aux alentours, et qui n’ont pas grand chose à croquer à l’époque où le mahonia se signale si vivement à leur attention.

Calvaire

calvaireA la collégiale de Vernon, un grand calvaire domine la nef. Il fait face aux fidèles sur l’arc triomphal, baigné par la lumière colorée des fenêtres hautes.
L’oeuvre porte la date de 1664. On la doit à Jean Drouilly, un sculpteur d’origine vernonnaise qui a beaucoup travaillé pour le Roi Soleil à Versailles.
Le Christ représenté en homme vigoureux tourne la tête vers Marie, qui exprime son amour et sa douleur en portant la main à son coeur. De l’autre côté se tient comme toujours l’apôtre Jean, le disciple que Jésus aimait, reconnaissable à ses cheveux longs. Les mains jointes, il paraît espérer quelque miracle qui ferait descendre Jésus de la croix. Les regards de Marie et de Jean dessinent un triangle qui les relie à Jésus, alors que leurs corps se détournent de cette scène effroyable.

Cène de sable

La Sainte Cène, sculpture de sable, Christian Avril, GivernyLe sujet est de circonstance aujourd’hui. Deux artistes de Giverny, Christian Avril et Jean-Pierre Porcher ont sculpté une représentation monumentale du dernier repas du Christ et de ses disciples. Les personnages de la Cène, grandeur nature, sont façonnés dans du sable.
C’est tout à fait saisissant de se trouver face à face en taille réelle avec cette scène si souvent représentée sur les tableaux, donc en réduction. La sculpture éphémère se trouve dans la cour du 75 rue Claude Monet à Giverny, elle est visible de la rue, et si l’on a envie de s’approcher l’entrée est libre.
Christian Avril parle avec humour du choix du sujet, un « hommage à une bande de hippies : Jésus et ses potes ». Nul doute qu’il se retrouve un peu dans le caractère atypique que pouvaient avoir les tous premiers chrétiens. C’est une façon de voir les choses pour un artiste qui a Christ dans son prénom !
Chris Avril sculpte le sable depuis des années chaque été sur les plages de la Méditerranée, Jean-Pierre Porcher s’y est mis avec plaisir.
Les deux sculpteurs ont pris quelques libertés avec la Cène de Léonard de Vinci. Judas, le visage fermé, serre ses sous. L’apôtre qui tend le doigt vers le ciel a plutôt l’air de, disons, commettre une incivilité sacrilège.
Et puis, un petit chien est tapi sous la nappe. C’est le propre chien de Chris mort cet hiver, qu’il représentait souvent sur ses tableaux des rues de Giverny.
Il a fallu trente tonnes de sable de la Seine bien compacté pour donner corps à la Cène. Il a fallu aussi un concours de circonstances un peu triste.
Chris Avril avait l’habitude de peindre dans la rue tout près de la maison de Monet, et d’accrocher ses toiles à vendre à une clôture. Il paraît que ça fait désordre, que d’autres peintres pourraient suivre son exemple. Où irait-on si on se retrouvait soudain avec Giverny transformé en place du Tertre ? On en frissonne d’avance.
Toujours est-il que Chris Avril n’a plus le droit de s’installer dans la rue comme il le faisait depuis longtemps. Jean-Pierre Porcher s’en est ému et lui a offert l’hospitalité devant sa maison, transformant sa cour en plage. Parce qu’une question dérangeante le taraude : où va-t-on quand on ne veut plus de vous dans la rue ?

Splendeurs éphémères

Cerisier du JaponLes cerisiers du Japon finissent de fleurir à Giverny, donnant un air japonais au parking du musée.
Il neige des pétales roses qui tourbillonnent avec hésitation dans la brise du matin.
Les voitures stationnées quelques heures sous les branches se couvrent de confettis soyeux qui s’envolent dès qu’elles repartent, glissant le long du pare-brise à la manière de gerbes d’étincelles. Si on a l’imagination camarguaise on pense à un envol de flamants roses.
La floraison des cerisiers ne dure que le temps de s’en émerveiller. A peine a-t-on fait Oh! devant le spectaculaire alignement de dizaines de cerisiers arborant leurs houppettes roses devant le vert de la forêt, que déjà la magie s’en échappe, fane, s’égrène au vent.
Est-ce long, est-ce court, ces quelques jours à l’apogée de la floraison ?
Le processus de défleurissement est aussi lent que celui de l’ouverture des fleurs. A la fois visible d’un jour à l’autre, mais pas assez rapide pour qu’on en prenne conscience en temps réel. Seule la chute des pétales alerte d’une fin prochaine, matérialise le vieillissement à la façon du tic-tac d’une pendule. Bientôt tous les pétales seront tombés, comme un sablier qui se vide.
La beauté du vivant questionne notre rapport au temps, en métaphore de la jeunesse. Mais si l’être humain peut ressentir de l’angoisse à voir filer les années, la nature semble dénuée de toute crainte de cet ordre. C’est comme si les plantes savaient bien qu’il faut que les fleurs fanent pour donner des fruits, et que les feuilles tombent pour laisser naître de nouveaux bourgeons.

Narcisses et tulipes

GivernyCette année les premières tulipes sont arrivées à l’heure à leur rendez-vous avec les narcisses.
En général, les narcisses se précipitent pour fleurir dès les premiers jours un peu tièdes, tandis que les tulipes attendent sagement le mois d’avril.
Mais cet hiver la température est descendue à un niveau inhabituel, jusqu’à -14°. Le gel a persisté jour et nuit pendant trois semaines. Tout ce froid a calmé les ardeurs des jonquilles et des narcisses. Ouh là là ! se sont-ils dit, ça pince ! Attendons un peu.
Lièvres et tortues ont fini par prendre le même départ, et voilà les narcisses et les jonquilles côte à côte avec les tulipes dans les jardins de Monet, en taches blanches, jaunes et rouges qui réveillent le vert des gazons.
Ces belles plantes à bulbes sont plantées par bouquets dans les pelouses du clos normand. C’est le moment de l’année où l’on se rend compte que Monet avait prévu des carrés d’herbe dans son jardin fleuri, comme une respiration entre les massifs, un gazon bien vert sous les arbres fruitiers et à fleurs.
Bientôt les bordures vont devenir si hautes et si éclatantes qu’on ne remarquera plus les carrés de pelouse. Ce sera le moment de les oublier, quand les longues feuilles du narcisse se dessèchent peu à peu, le temps que le bulbe fasse des réserves pour l’année prochaine.

Le débit de l’eau

Le Ru, GivernyDEVOIR DE VACANCES

Soit un bassin d’une superficie de x m2 et de y cm de profondeur. Ce bassin est alimenté par un captage d’eau souterrain d’un débit de z litres par minute.

1/ Calculer le temps caractéristique de renouvellement de l’eau du bassin. On pourra négliger les infiltrations.

Le jardinier plante des nénuphars, qui apprécient la chaleur et les nitrates (on trouvera en annexe un graphe de l’influence de la température et de la concentration en nitrates sur la croissance des nénuphars). Sachant que l’eau souterraine est à une température T0 très inférieure à la température extérieure, et d’une concentration C en nitrates :

2/ Établir si un apport continu de cette eau a une incidence positive ou négative sur le développement des feuilles de nénuphars.
3/ Déterminer la date d’apparition des premières fleurs en conditions normales de température et de pression.

La richesse en nitrates de l’eau souterraine et la clarté de l’eau du bassin entretenue par son renouvellement permanent favorisent la prolifération des algues.

4/ Représenter le graphe du temps nécessaire à l’entretien du bassin en fonction du débit d’eau souterraine. En déduire s’il sera ou non nécessaire d’embaucher un jardinier supplémentaire.

Pour hâter la floraison, le jardinier décide de stopper l’arrivée d’eau froide et de laisser le bassin se réchauffer. La prolifération des algues se poursuit jusqu’à ce que l’eau de l’étang se trouble à la température T1. Puis le manque de lumière stoppe la croissance des algues.

5/ Combien de jours le jardinier peut-il espérer gagner sur l’apparition des premières fleurs ?

6/ Sachant que le jardin est visité par des touristes qui apprécient l’eau claire et les nénuphars en fleurs, démontrer par l’absurde qu’il est impossible de satisfaire la totalité des touristes. Déterminer le débit que le jardinier doit laisser à l’arrivée d’eau pour obtenir une satisfaction optimale des touristes en fonction des données du problème.

Alchimie lumineuse

jardin de monetNon, le pont de Monet n’a pas été repeint en vert jade cet hiver ! Il est toujours du même vert vif un peu dur. Mais dans la lumière rasante du matin, l’objectif le capte de cette teinte claire un peu bleutée.
L’objectif est-il objectif ? Quelquefois il est en dessous des possibilités de l’oeil humain, il écrase les blancs, les ombres, il voit flou. Mais souvent il se montre supérieur à nos capacités visuelles. Surtout, il n’est pas influencé comme nous par la connaissance préalable des choses, qui nous fait voir le pont vert parce que nous savons qu’il est vert.
Le miracle de l’oeil de Monet, c’est, entre autres facultés visuelles hors du commun, de savoir faire abstraction des images mentales préconçues pour faire l’effort de voir vraiment le motif qui s’offre à lui. Et surprise ! Ses ponts japonais sont de cette même teinte douce et bleutée que leur donne les rayons du soleil.

La lumière bleue

lumière matinale sur le bassin de Monet à GivernyLa lumière qui nous baigne nous paraît toujours aller de soi. Il faut un regard extérieur pour nous faire sentir sa qualité propre. C’est pourquoi j’ai été très heureuse d’avoir l’occasion d’échanger avec un photographe brésilien.
Ce que j’aime avec les photographes, c’est qu’ils ne vous regardent pas comme un ovni quand vous leur demandez, comment trouvez-vous la lumière aujourd’hui ? D’où qu’ils viennent sur la planète ils vous répondent très sérieusement, sans éluder d’un « très belle » qui n’engage à rien.
Donc, pour Fernando Grilli, la lumière de Giverny est très bleue, riche en tons de l’extrémité froide du spectre. « Au Brésil, dit-il, la lumière tire vers le jaune et l’orange. Les couleurs sont franches, tranchées. Le vert est vraiment vert, le rouge vraiment rouge. Ici, elle est beaucoup plus riche en nuances, en tons pastels, toute une gamme fantastique de couleurs intermédiaires. »
Il faisait un grand soleil, cette semaine, juste le temps où l’on se dit, en France, que c’est le moment de faire des photos. Pourtant, l’instant que Fernando a préféré, c’est celui où un nuage a voilé le soleil. « Toute une quantité de nuances sont apparues dans les reflets sur l’étang, c’était extraordinaire. »

Epure

givernyQuel émerveillement de retrouver le jardin de Monet à son ouverture hier matin ! Les rêves de son long sommeil hivernal flottaient encore autour du bassin, tandis que le jardin se réveillait doucement sous les baisers du soleil d’avril.
Le printemps commence tout juste à poindre, en petites touffes colorées de jonquilles et de pensées. Mais beaucoup de plantes, prudentes, attendent que l’air et le sol se réchauffent encore avant de risquer le bout de leurs petites feuilles tendres.
Cet entre-deux qui n’est pas encore le printemps triomphant et déjà plus l’hiver donne au jardin de Monet une atmosphère unique pour quelques jours seulement. Avant l’ouverture des bourgeons, avant que la verdure ne l’emporte et envahisse tout, le jardin s’offre comme une épure. Il a la beauté simple et sublime du nu.

Pré-rentrée

L'étang de Monet, début de printemps Un vent nouveau souffle sur les jardins de Monet. Oh ! Pas une tempête à tout révolutionner, ni même des bourrasques ! Juste une brise légère. Mais le changement de direction il y a un an a apporté quelques changements à la vénérable institution.
Cette année, par exemple, les journalistes ont été conviés à une journée de presse à la veille de l’ouverture demain matin. Une première, dans tous les sens du terme.
Dans son discours de bienvenue, Hugues Gall, l’académicien à la tête du musée s’est présenté comme le patron de la PME Fondation Monet, et plus étonnant encore, s’est comporté comme tel, détaillant les ressources de « l’entreprise », son budget : 6 millions d’euros, le nombre de visiteurs : 410 000 en 2008. Une transparence inconnue jusqu’alors. « On est allé jusqu’à 500 000 avant le 11 septembre, ce qui était sans doute trop », commente-t-il.
Si je me souviens bien, on pouvait ressentir à cette époque comme une inquiétude devant la croissance constante du nombre de visiteurs. Jusqu’où saurait-on absorber l’afflux de touristes dans cet espace limité ? Le coup de frein donné au tourisme américain par les attentats sur les tours jumelles a stabilisé la fréquentation à un niveau moins critique. L’ouverture 7 jours sur 7 devrait toutefois la faire repartir à la hausse, mais étalée sur la semaine.
Les habitués de Giverny noteront dès demain d’autres changements spectaculaires ou discrets. Un velum, c’est-à-dire une grande toile servant à filtrer la luminosité du soleil, masque désormais les verrières du grand atelier. Plus imperceptible, l’arrosage automatique a été refait cet hiver pour un apport d’eau optimisé au pied des plantes, moins consommateur que l’arrosage traditionnel, et qui évite la propagation des maladies. L’électrification du jardin va permettre l’utilisation de matériels de jardinage électriques moins bruyants et non polluants.
Quoi encore ? Ah oui ! La Fondation Monet participera à la Nuit des Musées. Qu’on se le dise, l’entrée sera gratuite le 16 mai de 18h à 21h. Ça aussi, à ma connaissance, c’est du jamais vu.

De Corot à Bonnard

De Corot à Bonnard, musée de Vernon 2009 C’était aujourd’hui le vernissage de la nouvelle exposition du musée de Vernon, « De Corot à Bonnard, chefs d’oeuvre des musées de Douai et de Vernon » à voir jusqu’au 28 juin 2009.
J’aime bien les expos du musée de Vernon, toujours intéressantes, qui proposent de belles découvertes. Mais cette fois, le musée fête ses 25 ans, et c’est carrément le calibre au-dessus. Le sous-titre « chefs d’oeuvre » n’est pas usurpé.
L’exposition s’étend sur presque toutes les salles, selon un parcours logique. On suit l’évolution de la peinture du 19ème siècle, des paysages encore empreints de clacissisme de Corot aux coloris raffinés de Cross le pointilliste, en passant par des portraits, des scènes intimistes, des oeuvres naturalistes…
Et quand on se penche sur les signatures, on lit Monet, Pissarro, Vuillard, Bonnard, Corot, Boudin, Jongkind, Le Sidaner, Blanche Hoschedé-Monet, MacMonnies, Valloton, Daubigny, Denis, Courbet… Un incroyable rassemblement de grands peintres dans un petit musée ! C’est un régal pour les yeux, d’autant que les toiles et les sculptures ne sont guère connues par rapport à celles vues et revues des grands musées.
Si vous avez l’occasion de venir à Giverny, faites le crochet par Vernon pour voir cette expo de grande qualité, vous ne serez pas déçu. Elle n’aura sans doute pas la même couverture médiatique que l’expo Monet qui s’ouvrira le 1er mai à Giverny, raison de plus pour y faire un tour !

Les trois pas

Les trois pas, Olivier Gerval, Château de VascoeuilTrois personnages de métal marchent sur la pelouse les uns derrière les autres, un grand, un moyen et un petit. Tête baissée, ils paraissent perdus dans leurs pensées comme les passants des villes, indifférents à ce qui les entoure.
Vous avez l’impression de les avoir déjà vus quelque part ? C’est que vous avez reconnu la patte d’Olivier Gerval, le plasticien qui a aussi réalisé le groupe People installé près du vieux moulin de Vernon.
Les personnages de People sont plus schématiques, sans bras ni jambes. Ceux des Trois Pas paraissent plus humains, habillés, dotés d’yeux et de mains rondes qui pendent au bout de leurs bras dans le balancement de la marche.
Nous sommes ici au château de Vascoeuil, un lieu culturel exceptionnel situé à une heure de route de Giverny, dans le nord de l’Eure.
Les propriétaires du domaine, M. et Mme Papillard, l’ont acquis assez délabré en 1965, dans le but d’en faire leur maison de campagne. Le gouffre des travaux aurait été insondable pour des particuliers. Mais maître Papillard était l’avocat de grands noms de l’art. C’est Vasarely qui a suggéré de faire de Vascoeuil un espace d’expositions culturelles pour que le château se trouve une autonomie.
Une association est née, et les plus grands artistes contemporains se sont succédé au fin fond de cette campagne, entre les vaches et les pommiers, sur les bords du Crevon qui se jette dans l’Andelle qui se jette dans la Seine : Buffet, Braque, Léger, Cocteau, Dali…
Il n’est donc pas très surprenant que le parc se soit enrichi peu à peu de sculptures et de mosaïques, au point de devenir une galerie en plein air d’une cinquantaine d’oeuvres. Gerval est en bonne compagnie à côté des Volti, Szekely, Chemiakin et autres Hedberg.
Jardin de sculptures, expos de renom (Moreno et Nili Pincas ce printemps), château restauré de façon exemplaire, ce ne sont pas les raisons qui manquent pour venir à Vascoeuil. J’y ajouterai le charme d’un coin de Normandie à la douce ruralité, ouvert vers la grande forêt de Lyons. Et, cerise sur le gâteau : le château de Vascoeuil rouvre le week-end prochain avec une fête du chocolat !

Discrétion assurée

Jardin du Musée des Impressionnismes GivernyCe splendide jardin se trouve à Giverny, mais pas chez Monet : à 200 mètres de la maison du peintre, le jardin du musée des Impressionnismes Giverny fait claquer les couleurs, en hommage au talent des peintres exposés sur ses cimaises.
En France beaucoup de musées sont installés dans des bâtiments anciens reconvertis. L’idée avait été caressée à Giverny, un musée dans la maison du Hameau qui avait vu passer plusieurs membres de la colonie de peintres américains. Mais les locaux se sont révélés trop exigus et inadaptés. L’option de construire a donc été privilégiée par Daniel Terra, le fondateur du Musée d’Art Américain.
La difficulté était de répondre à toutes les contraintes de la muséographie moderne sans abîmer le paysage protégé de Giverny. Comment intégrer du béton dans ces vertes collines ?
Philippe Robert, l’architecte en charge du projet, a fantastiquement relevé le défi. Bâtiments bas, partiellement enterrés, toitures végétalisées, verrières… Rien de massif, d’opaque, d’imposant.
Le paysagiste Mark Rudkin y a mis du sien lui aussi : il a structuré le jardin avec de hautes haies de hêtres ou de thuyas. Vous voyez sur la photo ? Au printemps le mur se distingue encore un peu par transparence, mais bien vite on ne voit plus rien du tout. Le musée disparaît derrière la végétation.

L’intégration au paysage est tellement réussie que c’est presque embêtant. Il faut savoir qu’il y a un musée ici pour le découvrir.
Cela me rappelle une anecdote que m’a racontée Philippe Robert.
– Je suis allée à Giverny, mais je n’ai pas trouvé le musée ! lui avoue une amie.
– C’est le plus grand compliment qu’on puisse me faire. C’est la preuve que j’ai réussi à ce que le musée se fonde dans le paysage !

Réponse courtoise, sans doute, mais pas trace de dépit dans sa voix. Quand on a beaucoup de talent, on peut se permettre d’accepter l’effacement.

Le chant des fleurs

Glycine sur le pont de MonetLa glycine centenaire qui couvre le pont japonais de Claude Monet a fabriqué avec le temps des lianes grosses comme des bras. Elles ont une façon dramatique de ramper et de se tordre autour de la rambarde : ne dirait-on pas un geste de supplique ? C’est Roméo au pied du balcon de Juliette !
Il y a du lyrisme dans les plantes, et singulièrement à Giverny. La partition a été écrite par Monet, les jardiniers l’interprètent avec justesse et sensibilité. Ils s’effacent derrière les divas, les fleurs spectaculaires et solitaires comme les nymphéas qui avancent sur la scène en solistes, drapés dans leur costume somptueux.
Les autres fleurs chantent dans les choeurs. Chacune a son timbre, sa hauteur, qui se fond dans l’harmonie générale.
Et, pour animer ce chant des fleurs, une multitude de valses tourbillonnantes s’offre à qui sait les voir, remous du ruisseau, vol des abeilles et des papillons, feuilles sèches mourant avec grâce dans un dernier vol théâtral…
On comprend que les académiciens aient choisi parmi eux le directeur des Opéras de Paris pour lui confier la direction de cet orchestre de pétales.

La lumière de Giverny

La Seine à Vernon, effet du matinLa lumière de Giverny est-elle différente d’ailleurs ?
Un peu comme un microclimat, il semble bien que oui. On y retrouve les tendances du climat régional agrémentées de quelques petites particularités.
Pour les grandes lignes, on constate une forte variabilité du temps dans cette zone frontalière entre la Normandie et l’Ile de France. Elle se traduit par des changements très fréquents de luminosité, où le soleil joue à cache-cache avec des nuages plus ou moins épais et nombreux.
Les entrées marines venues de la Manche se conjuguent avec l’humidité de la vallée de la Seine. Le fleuve exhale selon l’heure et la température des vapeurs, des brumes, des brouillards qui font un écran devant le soleil, tout en diffusant subtilement son éclat.
Comme l’a bien rendu Monet dans ses Matinées sur la Seine, il flotte aux premières heures de la journée une lumière gris-bleu, rosée, argentée. Puis, quand le soleil est moins rasant, que la brume se dissipe, les couleurs deviennent plus franches.
Le fleuve fait rebondir la lumière dans la vallée. Giverny bénéficie de cet effet dans le lointain, et surtout d’une exposition plein sud qui lui fait profiter de chaque rayon. Pendant la journée le soleil fait le tour du jardin de Monet, l’éclairage vient de la gauche le matin, de la droite le soir. Ce n’est pas pour rien qu’on cultivait de la vigne ici autrefois.

La mode de 1610

Mausolée de Marie Maignart, collégiale de Vernon Marie Maignart avait toutes les vertus. Ce sont toujours les meilleures qui partent, si bien que la belle jeune femme s’est éteinte beaucoup trop tôt, à 23 ans, laissant un mari désespéré et inconsolable.
Je les plains, tous les deux, elle d’avoir succombé à la maladie dans la fleur de sa jeunesse, lui de s’être retrouvé tout seul si vite après la lune de miel. Dans sa grande douleur, ce gentil mari a eu envie de perpétuer le souvenir de sa douce en lui dressant un mausolée. Le monument aura 400 ans l’année prochaine. Il se trouve dans une chapelle nord de la collégiale de Vernon.
On peut, en le contemplant, s’abîmer dans de sombres pensées sur la brièveté de la vie, comme y invite une épitaphe désolée. Mais permettez-moi de prolonger un peu la Journée de la Femme et d’être beaucoup plus frivole : je préfère m’émerveiller de la mode de 1610.
C’est l’année de la mort d’Henri IV, la période charnière de la toute fin de la Renaissance et du début des Temps Modernes. La belle Marie est vêtue comme une dame noble de cette époque, un temps reculé où les femmes n’avaient pas encore de Journée. Loin de rêver à cette victoire de la civilisation, la malheureuse Marie se trimballe un costume fort seyant et non moins malcommode.
C’était toute une histoire de s’habiller en ce temps-là. Songez-y demain matin quand vous aurez réglé l’affaire en deux minutes chrono et que vous vous sentirez d’attaque pour une journée active dans vos vêtements confortables. Si vous viviez à l’époque de Marie Maignart, mesdames, il vous faudrait enfiler moultes couches, les plus redoutables étant le corselet et le vertugadin.
Le corselet, cela sonne gentil avec son double diminutif. Totale hypocrisie ! On serrait cet ancêtre du corset à s’en étouffer, à s’en rentrer les baleines dans le corps.
Toute une journée sans respirer, avec le ventre dans un étau : pas étonnant que Marie n’ait pas résisté.
Si la taille devait être fine, la jupe au contraire devait être renflée. Le vertugadin était au départ un bourrelet porté sur les hanches pour faire bouffer la robe, (artificiel, le bourrelet, en toile remplie de crin, faut-il le préciser !). D’exagération en exagération on en est arrivé au paroxysme du vertugadin « en roue de charrette ». Marie Maignart n’a pas eu de chance, elle était contemporaine de cette mode qui compliquait sérieusement la station assise des dames.
En poésie, la beauté naît de la contrainte. En mode aussi semble-t-il. Car la belle Marie a su merveilleusement tirer parti des diktats de son temps pour qu’en découlent des prodiges d’élégance.
Merveille des manches à crevés, de la fraise à la Médicis encadrant le visage, de la dentelle qui la prolonge, des rangs de perles en sautoir… La coiffure à bandeaux très sophistiquée dégage les oreilles d’où pendent de longues perles. On croit entendre bruire l’étoffe de la jupe froncée.
Les nobles dames d’antan avaient l’art de mettre en scène leur personne, dussent-elles y passer la moitié de leur Journée.

L’allée aux roses

Giverny, Jean-Jacques ChaignaudGiverny est, encore aujourd’hui, une source d’inspiration infinie pour les artistes.
Voici quelle interprétation le peintre Jean-Jacques Chaignaud propose de la Grande Allée au mois de mai, lorsque les arceaux se couvrent de roses épanouies, et que les bordures explosent de couleurs.

J’aime la touche veloutée de ce tableau qui correspond à la douceur du tableau naturel créé par Monet dans son jardin, et l’écran sombre et mystérieux des arbres de l’arrière-plan sur lequel les fleurs pimpantes de l’allée se détachent.
Le jardin de Monet à Giverny Jean-Jacques Chaignaud s’est inspiré d’une photo de l’allée aux roses de Monet publiée ici : je suis heureuse d’avoir un tout petit peu contribué à la création de sa toile.

T’as d’bons yeux tu sais !

Fleurs de noisetierIl y a peu de chances de découvrir spontanément cette fleur si personne ne vous l’a montrée : elle est aussi minuscule qu’inattendue. Et bizarre avec ça ! Un pied velu, et des bras rouge vif qui émergent d’un tout petit bourgeon pour s’ouvrir en éventail à la façon d’une anémone de mer.
Si vous agrandissez la photo, vous reconnaîtrez sans doute de quelle plante il s’agit grâce aux chatons voisins, si caractéristiques du noisetier.
Les écureuils font provision de noisettes pour passer l’hiver, c’est bien connu. Mais le noisetier pourrait en remontrer à l’écureuil en matière de prévoyance. Il a toujours plusieurs saisons d’avance, un peu comme ma grand-mère qui préparait ses cadeaux de Noël dès le mois d’août.
Chez le noisetier, il n’est jamais trop tôt pour bien faire. Dès l’automne, la floraison de l’année suivante est en place.
Les fleurs s’ouvrent en janvier-février, alors que tout n’est que frimas aux alentours. Vous iriez déjeuner sur la terrasse, vous ? Et passer la nuit à la belle étoile ? Il faudrait avoir un grain pour cela, mais le noisetier n’est pas fou. Avec son caractère, évidemment il a tout prévu.
La petite fleur rouge n’a que le bout du nez qui dépasse. Le strict minimum. Tout le reste est bien caché sous la doudoune.
Les parties rouges sont des stigmates, c’est-à-dire l’extrémité du pistil. Grâce à eux la fleur femelle va attraper le pollen de noisetier qui passe. D’où il sort, celui-là ? Des grands chatons qui, leur heure venue, s’ouvrent et laissent le vent les secouer comme un chiffon à poussière.
Le noisetier n’est pas avare en pollen, au point d’en jaunir les alentours. Prévoyant comme il est, il ne faudrait pas qu’on en manque. Un peu comme ma grand-mère qui cuisinait toujours pour douze quand on n’était que quatre.
Tout irait donc pour le mieux. Seulement, le noisetier a aussi l’art de se compliquer l’existence. Par exemple, il a horreur des mariages consanguins. Comment faire pour éviter de s’autopolléniser ?
Le noisetier a trouvé la solution. Les fleurs mâles, les chatons, s’épanouissent avant les femelles. Quand les petits boutons rouges s’ouvrent, cela fait longtemps que les chatons se sont secoués et resecoués et qu’ils n’ont plus rien à offrir à personne.
Bigre ! Et comment vont faire les petites fleurs rouges pour réaliser leur voeu le plus cher, se transformer en noisettes ? Là, il faut qu’elles aient un peu de chance, qu’il y ait dans les environs un noisetier en retard et dont les fleurs mâles puissent les féconder.
Même quand on est très prévoyant, il faut quand même laisser un peu de place au hasard.

Eglise de la Reconstruction

Eglise Saint-Julien, Caen

Eglise Saint-Julien, CaenJe dois l’avouer, j’étais comme tout le monde, a priori je n’aimais pas le béton. Je trouvais cela raide, gris et froid. Mais si je parle de cette aversion au passé, c’est que depuis, pas à pas, j’ai découvert le patrimoine normand de la Reconstruction. Et je me prends à aimer le béton, à y voir de la rigueur plutôt que de la raideur. C’est un matériau d’une grande variété.
La Reconstruction, quelle période fascinante sur le plan architectural ! Elle dure une vingtaine d’années à partir de 1947 environ, vingt ans d’activité intense pour rebâtir tout ce qui a été bombardé ou dynamité, grâce au plan Marshall.
Quand les dommages ne sont pas trop importants, on restaure à l’identique, sinon on reconstruit. Et pas question alors de faire des bâtiments à l’ancienne.
Les idées les plus variées, les plus créatives, les plus innovantes jaillissent des planches à dessin. Les architectes se surmènent et se surpassent. Les destructions leur offrent l’occasion de plancher sur des projets d’envergure, comme la construction de nouvelles églises.
Le recensement des églises de la Reconstruction est en cours, il y en aurait environ 500 en Normandie. Et autant de partis différents, de recherches sur ce que peut être une église.
Eglise Saint-Julien, Caen Certaines donnent dans le régionalisme, au moins à l’extérieur, avec des formes traditionnelles et des toits d’ardoise. Les paroissiens n’y perdent pas leur latin. D’autres se veulent résolument modernes.
C’est le cas de la merveilleuse église Saint-Julien de Caen.
L’architecte qui en est chargé n’est pas n’importe qui. Henry Bernard, premier Grand Prix de Rome, a signé par la suite des réalisations aussi prestigieuses que la maison de la Radio à Paris ou le Palais de l’Europe à Strasbourg. A Caen, il a pour mission après-guerre de faire les plans de l’Université et du quartier qui l’entoure. L’église Saint-Julien y figure. Elle sera moderne, à l’image de cette population jeune qui va la fréquenter.
Henry Bernard invente un édifice religieux inédit, en forme de mandorle ! Un symbole fort : l’église elle-même est désignée comme le moyen de passer du monde terrestre au monde spirituel. Sa seconde idée de génie, c’est d’insérer dans les parois des milliers de pavés de verre coloré, qui font de l’espace intérieur un lieu saisissant de beauté.

Bassin

Bassin de MonetSurprise à la vitrine d’une des nombreuses galeries d’art de Honfleur, un grand tableau d’un étang familier…
Quel est le rapport entre Honfleur et Giverny ? Tous les deux ont un bassin, et tous les deux ont été peints par Monet !

Boîte à oeufs

Boîte à Oeufs de Claude Monet Ma collègue Patricia a un bien joli coup de pinceau. Cet hiver, elle s’est laissé inspirer par les merveilles dont la maison de Monet regorge pour en faire des aquarelles.
Pas besoin de vous dire à quoi sert cette boîte accrochée au mur de la petite pièce qui fait office d’épicerie. Comme un fromage bien connu, c’est écrit dessus. Mais il m’arrive de me trouver là avec des visiteurs très jeunes, ou beaucoup moins fort en français que vous, pour qui l’inscription garde tout son mystère. Et ils ne manquent pas d’imagination pour inventer des usages à cette intrigante petite boîte, qui pourrait selon eux servir à mettre les clés, les épices, les lettres…
Un coup d’oeil sur le côté aide à trouver la réponse. A travers le lattis prévu pour l’aération, on aperçoit des plaquettes de bois percées de trous ronds.
On pouvait ranger 36 oeufs dans cette boîte. Cela paraît beaucoup, mais c’était loin d’être suffisant pour une famille comme celle de Monet, qui comptait 10 personnes et du personnel. Dans la même pièce, une deuxième étagère à oeufs en contenait jusqu’à 80. Soit un total de 116 oeufs !
Cette profusion s’explique par la présence d’un poulailler dans le jardin, et aussi parce qu’on mangeait beaucoup plus d’oeufs au 19ème siècle qu’aujourd’hui.
C’était un vrai trésor… Vous avez vu cette belle serrure ? Les oeufs étaient gardés sous clé, comme le reste de la nourriture. Je ne peux pas affirmer que c’était le cas chez Monet, mais le meuble est prévu pour. Les romanciers contemporains décrivent ces maîtresses de maison aux énormes trousseaux de clés, qui ouvrent et ferment les armoires et les garde-manger au gré des besoins. Marque de pouvoir, marque de richesse… La nourriture était comparativement beaucoup plus chère alors, et les bourgeois qui n’auraient su se passer de leurs domestiques craignaient pourtant de se faire voler.

Collé serré

tulipes et pensées à Giverny On va voir si vous avez l’oeil : combien y a-t-il de tulipes sur cette photo ? Non non, ne comptez pas, c’est triché ! Peut-être que ce sera plus facile en imaginant des personnes. Disons, par exemple : combien y a-t-il de belles plantes dans cette discothèque ? C’est vrai, quand elles sont collées serrées comme ça, c’est difficile à dire, à moins d’avoir un gros entraînement en tant que DJ ou que syndicaliste.
Les journalistes aussi sont amenés à évaluer des rassemblements paisibles ou virulents, et par amour de la vérité il vaut mieux tomber un peu juste. C’est un des aspects approximatifs de mon ancien métier qui ne me mettait pas trop à l’aise. Si donc vous envisagez d’embrasser cette carrière, astreignez-vous à vous entraîner, vous l’étreindrez mieux !
Mais revenons à nos moutons. Je voulais juste vous faire remarquer à quel point les jardiniers plantent serré à Giverny, pour un bel effet de masse colorée, de teintes denses où dansent les têtes des tulipes, hors d’atteinte des sombres pensées.

La femme papillon

Suzuki Harunobu (vers 1725-1770) Beauté sautant dans le vide depuis le balcon du temple Kiyomizu Image de calendrier, 1765Suzuki Harunobu, Beauté sautant dans le vide depuis le balcon du temple Kiyomizu, 1765

L’exposition d’estampes japonaises de la Bibliothèque Nationale de France se termine dimanche, mais son magnifique site internet permet une belle séance de rattrapage. Je ne sais pas vous, mais j’ai eu un coup de coeur pour cette estampe-ci, et pour l’oeuvre d’Harunobu en général.
Cet artiste japonais vivait au 18ème siècle. Il porte un regard tendre sur les femmes qu’il peint graciles, gracieuses, légères. La quintessence de la femme vue par Harunobu, c’est cette estampe où la jeune fille paraît voler au-dessus de l’arbre en fleurs.
Gisèle Lambert, la commissaire de l’exposition, donne cette explication :

Semblable à un oiseau ou plus encore à un papillon, la jeune fille suspendue à son ombrelle vient de sauter dans le vide, du haut de la terrasse du temple Kiyomizu. Si les dieux sont favorables à ses amours, elle arrivera sans mal, comme il se doit, sur le cerisier, au fond du vallon. Selon la légende, le souhait formulé pouvait aussi concerner une guérison.

Vous imaginez ? Vous êtes amoureuse, pour savoir si ça vaut le coup de continuer avec ce garçon il faut que vous alliez sauter à l’élastique avec le risque de vous écraser au fond. Charmant !
Ce qu’il y a de bien avec Harunobu, c’est qu’on n’est pas vraiment inquiet. Elle est tellement mignonne, rien ne peut lui arriver, n’est-ce pas ? Aidée de son parapluie et de son kimono, elle va se poser comme une fleur. D’ailleurs, regardez, elle n’a pas peur.
Est-ce la confiance ou l’inconscience qui la pousse et la soutient ? Elle est l’image même des choix que nous demande la vie. A chaque fois que nous nous engageons pour une orientation professionnelle ou avec un partenaire, nous ne cessons de nous lancer dans le vide, accrochés à des ombrelles dérisoires. Le métier et le conjoint vont prendre une importance extrême. Pourtant même lorsque nous croyons les connaître nous savons si peu d’eux et de nous-mêmes.
Que faire alors ? Sans hésitation, il faut sauter ! On verra bien comment on atterrira. En cette veille de Saint-Valentin, je vous souhaite de toucher terre en douceur sur un lit de mousse. A vos amours !

du MAAG au MIG

Musée des Impressionnismes GivernyUn coin du voile qui entoure encore le Musée des Impressionnismes Giverny vient de se lever à l’occasion d’une première conférence de presse. L’exposition inaugurale de la nouvelle structure qui remplace le musée d’Art Américain Giverny « sera entièrement consacrée au jardin de Giverny », bonne nouvelle !
Elle s’intitule « Le jardin de Monet à Giverny : L’invention d’un paysage », et aura lieu du 1er mai au 15 août.
L’expo devrait au final comporter « une vingtaine d’oeuvres peintes, une trentaine de photographies et autant de documents. » Le nombre des Monet est donc revu à la baisse, d’autant que d’autres artistes pourraient entrer dans la thématique du jardin de Monet, par exemple sa belle-fille Blanche Hoschedé ou encore l’ami de celle-ci John Leslie Breck. Orsay prêterait quatre oeuvres, vraisemblablement les quatre dans ses collections qui représentent le jardin de l’artiste : le grand Nymphéas bleus, le Pont japonais, l’allée aux iris, et un saule. D’où viendront les autres ? Pour l’instant rien n’est encore confirmé.
L’exposition sera divisée en trois parties :
L’invention d’un paysage (1883?1904)
Monet peintre du XXe siècle (1899?1926)
L’élaboration d’une image (1905?1926)
Les photos d’époque prises par les amis de Monet, Guitry, Clémentel et d’autres, seront très intéressantes à comparer avec les tableaux et avec le jardin actuel. On pourra mesurer ressemblances et différences. Car depuis le temps de Monet, son jardin a été « réinventé » par et pour le public d’aujourd’hui.
Sur le plan pratique, le musée appliquera son tarif habituel, soit un modique 5,50 euros le billet, rien à voir avec certains prix d’expos qui font faire gloups. Il sera ouvert de 10h à 18h tous les jours (y compris les lundis) du 1er mai au 13 juillet inclus, ensuite le MIG sera fermé le lundi.

Cher lecteur, ces textes et ces photos ne sont pas libres de droits.
Merci de respecter mon travail en ne les copiant pas sans mon accord.
Ariane.

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