Perilla nankinensis

Perilla nankinensis, périlleLa pérille de nankin est une plante condimentaire qui nous vient tout droit du Japon. Elle est à la cuisine nippone ce que le persil est à la nôtre, mais ce sont plutôt ses qualités décoratives qui l’ont fait adopter depuis peu par les jardiniers européens dans les massifs.
Au potager du château de la Roche-Guyon, elle est plantée si serrée qu’elle forme une masse dense verte et pourpre.
Ses feuilles finement dentées et sa taille rappellent l’ortie, tandis que sa couleur évoque les salades rouges. Au Japon, on consomme les feuilles crues ou séchées, en tempura, avec du tofu, des sushis… On utilise aussi les graines et l’huile qui en est extraite.
Le week-end prochain (du 8 au 10 septembre 2006), on pourra en cueillir et y goûter à l’occasion de la « Fête du jardin gourmand dans le verger-potager du château de La Roche-Guyon ». Les massifs de sauge sclarée, de cerfeuil musqué, de pérille de nankin et d’agastache vont venir parfumer des salades à accompagner d’un petit vin d’aspérule. La jardinière Noémie Vialard vous donnera les recettes et de bons conseils pour cultiver les aromatiques en pot.
Le potager du château de la Roche-Guyon est ouvert tous les jours de 10 h à 17 h jusqu’au 5 novembre.

La Roche-Guyon

Le village de La Roche-GuyonA cinq minutes de Giverny en direction de l’Ile de France, se trouve La Roche-Guyon, l’un des « Plus beaux villages de France ».
Le bourg est joliment niché le long de la Seine, au pied d’une colline boisée. Ses maisons anciennes s’alignent le long de rues aux noms évocateurs et de ruelles bordées de jardins. Le village a séduit des peintres tels que Georges Braque, Paul Cézanne, Auguste Renoir, Camille Pissarro, et bien sûr Claude Monet du temps où il habitait à Vétheuil.
La Roche-Guyon concentre de nombreux centres d’intérêt touristiques, à commencer par le château. Malgré les apparences, le donjon médiéval et la demeure classique qui s’élève à ses pieds font partie du même ensemble. Un escalier secret taillé dans l’épaisseur de la falaise relie la tour au château seigneurial.
Devant le logis, un vaste potager en accès libre s’étend jusqu’au fleuve. Il a été restitué dans son aspect du 18e siècle. Ses trente-deux parcelles triangulaires sont bordées d’arbres fruitiers, poiriers, pommiers, pruniers et pêchers. Les plates-bandes colorées mêlent des légumes décoratifs, des fleurs et des graminées. D’autres sont cette année consacrées aux plantes condimentaires ; sous le soleil, elles répandent de savoureux parfums.

Le souvenir de Camille

tombe de Camille Doncieux, épouse de Claude Monet, à Vétheuil5 septembre 1879 : Camille Doncieux s’éteint à Vétheuil, après un long combat contre la maladie. L’épouse de Claude Monet, celle qui a posé si souvent pour lui et ses amis peintres, Manet, Renoir, meurt toute jeune, à 32 ans. Elle laisse deux petits garçons, Jean, douze ans, et Michel, encore bébé.
On peut toujours voir sa tombe au cimetière de Vétheuil, tout près de l’église, à flanc de colline. Passée la  porte en pierre, il suffit d’aller tout droit vers les pins et la vue sur la Seine qui donnent à l’endroit un air de cimetière marin.
La tombe de Camille Doncieux fait le coin tout au fond à gauche. C’est l’une des plus anciennes, entourée d’autres plus récentes.
Camille repose entre le souvenir et l’oubli, derrière les grilles ouvragées qui lui font une sorte de lit-cage.
Monet l’aimait. Il l’avait choisie malgré l’hostilité de sa famille. On a du mal à comprendre pourquoi il ne s’est guère préoccupé de la tombe de la « pauvre Camille », pendant le presque demi-siècle où il lui a survécu.

Rentrée des classes

Ancien panneau de signalisation routière Danger écolePendant tout l’été, cela paraissait un peu incongru de ralentir aux abords des écoles désertes. Depuis ce matin, brise-vitesse et panneaux ont retrouvé toute leur raison d’être.
Celui-ci doit avoir une cinquantaine d’années. Il a presque disparu de nos routes, pour être remplacé par une version plus schématique.
C’est Maman qui conduit sa fille à l’école. On les voit de profil, elles ont les cheveux courts, on peut détailler leurs vêtements. La mère porte une jupe et un manteau, des bottes, et un grand sac à main à la Bernadette. Sa fille, en jupette et souliers à talons plats, tient un livre dans la main gauche.
L’enfant est devant, prête à traverser, mais sa mère la retient par le bras. Attention, ma fille, tu n’as pas vu la voiture ? Elles ont les pieds bien plantés sur le sol matérialisé par un trait.

nouveau panneau de signalisation routière Danger école Dans la nouvelle version du panneau, il ne faut plus compter sur les piétons pour laisser passer les véhicules. Le conducteur fera bien de se méfier, car ils s’élancent quasiment sous ses roues tant ils sont pressés. La petite écolière est toujours là, symbole de fragilité à protéger, mais sa mère a disparu. A sa place, le papa ou peut-être le grand frère, si l’on en juge par la taille : sur le panneau signalant le passage protégé, le piéton semble nettement plus grand.
Ils courent, les deux enfants, ils sont en retard, et la petite doit faire d’énormes enjambées pour suivre son grand frère qui lui tient la main.
Deux époques, deux visions du monde. Dans les années cinquante, on propose une image de bonne élève. Le monde paraît stable, l’école un lieu où étancher la soif d’apprendre. Dans la version contemporaine, on a surtout cherché à optimiser l’effet produit sur l’automobiliste, pour le pousser à ralentir. L’insouciance des enfants est mise en avant, la référence à l’école a disparu. Le panneau a vu son emploi élargi à d’autres établissements, comme les centres de loisirs.

Pointe du Hoc

Pointe du HocGiverny n’est qu’à deux heures de route des plages du Débarquement, qui s’étirent tout au long du littoral du Calvados jusqu’à la Manche.
Un des épisodes les plus dramatiques du 6 juin 1944 s’est déroulé à la Pointe du Hoc. Le site vient de faire l’objet de travaux de réaménagement de grande ampleur. Grâce à cette mise en valeur, la lecture du champ de bataille est devenue plus aisée, son impact plus fort.

A la pointe du Hoc, la falaise s’avance dans la mer comme l’étrave d’un navire. Au sommet de cet emplacement stratégique, les Allemands avaient installé une batterie de canons capables d’atteindre les plages voisines, Omaha et Utah. Les armes étaient placées dans des bunkers de béton.
Visiter le site, c’est revivre le jour J côté allemand. Dès l’arrivée, on est frappé par la multitude de trous d’obus. Plus de soixante ans après la bataille, ils témoignent du déluge de feu qui s’est abattu sur ce secteur les jours précédant le Débarquement.
Si votre imagination vous fait entendre les sifflements et les détonations terrifiantes, vous aurez envie de vous réfugier dans un abri. On peut entrer dans un bunker. C’est étroit, très étroit. Humide, froid, bétonné. Tout d’une tombe. Tellement oppressant qu’on ressort vite à l’extérieur.
Du belvédère, le regard porte loin sur la mer, toute vide. A l’aube du D Day, elle était couverte de navires de guerre, fonçant droit vers vous. Je me demande quelle terreur on ressent dans cette situation. Quand on sait qu’on n’a qu’une chance infime de voir l’aube suivante.
A 7h30, les Rangers américains ont lancé l’assaut. Eux aussi devaient avoir la peur au ventre. Sous un feu meurtrier, ils ont lutté pour gravir la falaise, en utilisant des échelles de pompiers, des grappins et des cordes. La bataille a été longue et terrible. Il a leur a fallu deux jours pour se rendre maître de la pointe du Hoc.

Eglise de Vétheuil

L'église de VétheuilL'église de Vétheuil est une vraie star de la peinture. Monet, à lui tout seul, l'a représentée une soixantaine de fois, et il n'est pas le seul artiste à l'avoir prise pour modèle.
Notre-Dame de Vétheuil était un lieu de pèlerinage marial. Ses bâtisseurs l'ont installée de façon à attirer tous les regards. Depuis un promontoire à flanc de colline, elle domine une boucle de la Seine.
L'histoire de sa construction explique sa forme inhabituelle. Il y eut d'abord une église primitive, qu'on a décidé d'agrandir quand elle s'est révélée trop petite. Cette fois, on allait lui donner des dimensions généreuses ! La construction a commencé par le choeur, sur la droite de la photo. C'est la fin du 12e siècle, les bâtisseurs cherchent des solutions pour faire évoluer l'art roman. A Vétheuil, ils imaginent des contreforts qui deviendront bientôt les arcs boutants de l'art gothique.
Le clocher ne correspond plus à la taille de l'édifice projeté. Plutôt que de le démolir pour en construire un autre, l'architecte a tout simplement bâti le nouveau autour de l'ancien !
Et puis, pendant trois cents ans, le chantier s'arrête. Enfin, au 16e siècle, les seigneurs de Vétheuil se remettent à l'ouvrage. Ils terminent leur église dans le goût de la Renaissance, avec une profusion de frontons et de coquilles.
Toutes ces caractéristiques en font une église originale et pleine d'intérêt. Mais l'intérieur mérite à lui tout seul la visite pour son très riche mobilier, composé surtout de sculptures du Moyen-Age et de la Renaissance. La plus émouvante est la statue de la Vierge à l'Enfant, Notre-Dame de Grâce de Vétheuil, vénérée par les pèlerins dès le 14e siècle.

Style rocaille

balustrade en ciment façon faux bois, moulin d'Andé, EureRegardez ce chêne, comment il a l’air de donner la main à la balustrade qu’on lui a accolée. La barrière est en faux bois de ciment, le tronc est un vrai chêne en bois d’arbre.
Voilà quelque cent ans, le maçon a installé son garde-corps au ras de l’arbre qui, en grossissant, a fini par s’y souder, parachevant l’illusion.

La photo est prise au moulin d’Andé, un moulin sur la Seine entre Giverny et Rouen.
Ce centre de rencontres culturelles très réputé sur les plans littéraire, musical, cinématographique, dispose d’une salle de spectacles située au sommet de la colline. De là-haut, le panorama s’étend, magnifique, sur la vallée de la Seine. Le belvédère est bordé par cette balustrade en faux bois, qui voisine avec un ravissant kiosque dont les poteaux figurent des arbres tous différents.
Le style rocaille a été abondamment décliné dans toute cette partie du domaine, des rambardes de pont aux fausses souches. Le plus spectaculaire et original, ce sont les énormes murs de soutènement à flanc de coteau qui imitent des rochers de montagne.

Quand j’étais ado, je détestais le faux bois en ciment. Je le trouvais ridicule et kitsch. Les temps changent, aujourd’hui je suis pleine de tendresse et d’indulgence pour le style rocaille. Son côté désuet me paraît charmant. C’est peut-être simplement qu’assez de temps a passé, comme pour toute mode, adulée, rejetée puis redécouverte.
A Paris, le faux bois règne en maître aux Buttes Chaumont, il se déroule en interminables escaliers à Montmartre. Nos arrières grands-parents ont tellement adoré ça qu’on en trouve encore partout.
Parfois, l’ouvrage un peu écorché laisse voir, sous l’écorce factice, l’armature de fer, comme un magicien qui dévoilerait un truc. Il s’en dégage quelque chose de pathétique. Le plus souvent, c’est la fantaisie qui domine, ce gigantesque élan vers le végétal qui a porté tout le courant art nouveau à la fin du 19e siècle.
C’est presque étonnant qu’il n’y ait pas le moindre soupçon de faux bois dans les jardins de Monet à Giverny, contemporains de l’époque où des forêts de ciment s’abattaient sur les parcs et les jardinets. Avec son oeil perçant, le peintre ne devait pas aimer ces imitations plus ou moins réussies.

Georges Braque

Georges Braque, Pélias et NéléeC’est plus qu’un testament artistique. A la fin de sa vie, le peintre Georges Braque a demandé au joaillier H.M. Heger de Loewenfeld de réaliser pour lui des bijoux à partir de ses oeuvres les plus importantes.
Il s’agissait de faire passer des images qui hantaient Braque dans la matière précieuse en trois dimensions, afin de le libérer de ces obsessions.
La peinture ne lui suffisait pas pour s’en défaire. Ce n’est pas assez  » de faire voir ce que l’on peint, il faut aussi le faire toucher « . De la collaboration du peintre et du joaillier pendant deux ans sont nés des bijoux extraordinaires.
Le Château de Vascoeuil, dans l’Eure, présente jusqu’au 17 septembre 2006 les oeuvres de Braque qui ont subi ces « Métamorphoses Artistiques » (c’est le nom de l’exposition).
Somptueux bijoux, sculptures précieuses, Gobelins, tapis, porcelaine de Limoges, cape griffée Yves Saint Laurent… Toujours Braque a d’abord synthétisé une de ses oeuvres à la gouache avant de la laisser s’incarner entre les mains d’autres créateurs.
Tout un monde de têtes grecques, de poissons, et surtout d’oiseaux a pris vie. Braque a atteint son but, « libérer l’oiseau, symbole de l’espace et du temps » et se sentir libéré. Il s’est éteint le 31 août 1963.

Monet et la pollution de Londres

Le Parlement, trouée de soleil dans le brouillard, Claude MONET 1900-1901 Musée d'Orsay, Paris Des scientifiques anglais se penchent sur les tableaux de Londres par Monet pour y chercher des indications sur… la pollution de la capitale britannique au siècle dernier !
En étudiant la façon dont il a rendu la dispersion de la lumière, ces chercheurs en Géographie, Sciences de la Terre et de l’Environnement de l’université de Birmingham espèrent trouver des informations sur les particules qui composaient le fog, l’épais brouillard londonien qui plaisait tant à Monet. Le phénomène a atteint son apogée dans les années 1880 puis a progressivement diminué.
Monet peignait exactement ce qu’il voyait, et entretenait une correspondance quotidienne avec sa femme dans laquelle il était beaucoup question du temps qu’il faisait. Les chercheurs disposent donc d’indications précises sur lesquelles s’appuyer. Car on ne sait pas grand chose sur les causes réelles de ces brumes tenaces qui privaient les habitants de Londres de soleil pendant tout l’hiver.
Monet a fait trois séjours à Londres, en 1899, 1900 et 1901, au cours desquels il a exécuté plusieurs séries de vues de la Tamise, représentant une centaine de toiles.
Celle-ci, intitulée Le Parlement, trouée de soleil dans le brouillard, (1900-1901) se trouve au Musée d’Orsay à Paris.

Les Nymphéas de Monet

Nymphéas par Claude Monet Nymphéas, Claude Monet vers 1914-18, huile sur toile, Musée Marmottan-Monet, Paris

Le plaisir d’une promenade dans les jardins de Giverny, c’est d’y découvrir les motifs qui ont inspiré le maître des lieux.
Quand on passe sous le grand saule près du pont japonais, par exemple, on ne peut s’empêcher de penser à ce tableau célèbre du musée Marmottan à Paris, peint à la fin de la guerre 1914-1918.
Monet, reclus chez lui, ne puise plus son inspiration que dans son jardin.
Il est atteint d’une double cataracte qui l’empêche d’apprécier les couleurs à leur juste valeur et rend les contours imprécis. Monet peint alors de mémoire et en fonction de l’ordre dans lequel il dispose les couleurs sur sa palette. C’est peut-être ce qui explique cette profonde différence de coloris entre son tableau, où le bleu ciel domine, et ce que notre oeil voit aujourd’hui, une teinte qui tire sur le vert glauque. Mais peut-être doit-on cette différence à la croissance des arbres depuis près d’un siècle. Parvenus à maturité, ils se reflètent davantage dans le bassin. Pour paraître bleue, l’eau doit réfléchir le ciel, et non les arbres.
étang aux nénuphars dans le jardin de Monet Dans la toile de Monet, pas de berge, pas de bord. Les branches du saule tombent on ne sait d’où – pas de tronc non plus. Elles ressemblent à un rideau de théâtre autour d’une scène, à des cheveux encadrant un visage. Elles donnent la verticale, comme un léger fil à plomb.
Entre les branches du saule, en plein milieu du tableau, le reflet de jolis nuages blancs. Le cadrage est serré, mais l’impression d’espace énorme, à cause de ces nuages, qui ouvrent une profondeur infinie, comme un trou dans la toile. En même temps que ces immensités, le reflet du ciel matérialise l’horizontale de la surface de l’eau, concrétisée par les deux radeaux de nymphéas qui y flottent et créent un effet de perspective. Quelques petites touches de rose et de jaune donnent toute son intensité au bleu, dans une harmonie pleine de douceur.
Enfin, au premier plan, des touches plus sombres sous les feuilles de nénuphar évoquent la profondeur du bassin, comme si on plongeait le regard dans l’eau.
C’est la gageure de cette oeuvre, représenter dans l’espace à deux dimensions de la toile tous ces différents plans et volumes dans lesquels l’oeil se perd.
Comme en photographie, pour être réussie l’image picturale doit capter longtemps le regard, le laisser errer d’un point à un autre pour y chercher des réponses.

La Libération de Giverny

champ de coquelicots à GivernyLes Britanniques fleurissent les tombes de leurs soldats morts au combat avec des coquelicots. Symbole du sang versé, un champ de coquelicots donne une idée de la multitude de vies fauchées en pleine jeunesse pendant la seconde guerre mondiale.
C’est l’anniversaire de la Libération de Giverny, le 28 août 1944. Le village, relativement épargné par la guerre jusque là, a subi de violents combats en août 44.
Au soir du 27 août, la moitié du village était aux mains des Anglais. Mais le lendemain, quand les Alliés ont inspecté une à une toutes les maisons de l’autre moitié, les Allemands s’étaient repliés pendant la nuit. On retient cependant la date du 28 comme celle de la libération de Giverny.
On peut voir au cimetière de Giverny la tombe des sept membres de l’équipage du bombardier Lancaster abattu dans la plaine des Ajoux le 8 juin 44, et une plaque avec le nom des six victimes civiles et des deux victimes militaires françaises de la guerre 1939-1945. A ce bilan, il faut ajouter le lieutenant britannique Peter Edge, tué pendant la bataille pour le contrôle du village. Un carrefour porte son nom. Côté allemand, il n’existe pas de bilan précis des pertes essuyées ce jour là à Giverny.

La Grande Allée fin août

La Grande Allée du jardin de Monet, fin aoûtVision saisissante ce matin : un promeneur dans la Grande Allée ! Tous les visiteurs des jardins de Monet à Giverny le savent, il est interdit de marcher dans cette allée, fermée de chaque côté par des chaînes. L’oeil s’est habitué à la voir toujours vide. Et soudain, voici quelqu’un qui chemine entre les vagues de capucines.
Un mince parapluie dans la main droite, un costume noir sur une chemise blanche, le look du promeneur n’aurait sans doute pas étonné les contemporains du maître de l’impressionnisme. En tout cas, la présence insolite de cette silhouette dans l’allée principale du jardin de Monet renvoie à ce temps où le domaine était vécu comme une maison et son jardin, et non pas comme un musée. A cette époque, la grande allée était le passage obligé de la porte du bas vers la demeure.
De nos jours, impossible d’en conserver l’accès si l’on veut laisser pousser les fragiles capucines. Pour que l’allée ressemble à ce qu’elle était du temps de Monet, il faut en faire un sanctuaire. Aussi quelle sensation cela doit être d’en fouler le sol ! Un petit plaisir matinal avant l’arrivée des visiteurs.

Nymphéa dans un petit bassin

Nénuphar à Plantbessin, NormandieQuand le nénuphar manque de place, il entasse les feuilles les unes sur les autres.
Les fleurs s’adaptent à cette nouvelle situation dans leur quête de lumière. Elles ne flottent plus à la surface de l’eau mais se perchent au sommet d’une longue tige qui émerge de l’eau comme un périscope.
On dirait qu’elles sont arrivées en retard au défilé et qu’elles cherchent à apercevoir les majorettes en se haussant du col derrière plusieurs rangées de spectateurs.
Ce n’est pas du tout ce qui se passe dans l’étang aux nymphéas de Claude Monet à Giverny. Sur ce vaste plan d’eau, les nénuphars ont beaucoup de place et flottent deci-delà en radeaux.
J’ai pris cette photo dans un bassin bien plus petit, à Castillon, dans le Calvados. La pépinière Plantbessin a créé de superbes jardins en guise de vitrine. Après s’être émerveillé devant des réalisations talentueuses, on peut acquérir les plantes pour lesquelles on a craqué et tenter de les acclimater chez soi.
Le bassin aux nymphéas est de dimensions réduites, ce qui permet de voir les nénuphars de près et même, et c’est le plus joli, de dessus : on peut se régaler à loisir de leur géométrie rigoureuse et de leurs coloris tendres.

Festival de musique de chambre

Festival de musique de chambre à Giverny, 24 août 2006 - 3 septembre 2006Le Festival de musique de chambre de Giverny débute ce soir. Dans l’atmosphère feutrée de l’auditorium du musée d’art américain, ou dans celle, recueillie, de l’église du village, toute une série de concerts d’exception vont se succéder jusqu’au 3 septembre.
En résidence à Giverny, de jeunes et talentueux musiciens venus de différents pays viennent jouer avec des concertistes internationaux, sous l’égide d’un compositeur invité.
Les journées studieuses s’achèvent en concerts d’une rare virtuosité.
Cette année, le programme met Schumann à l’honneur. Si vous aimez la musique de chambre, c’est un rendez-vous de fin d’été de grande qualité.

Le visuel ci-contre illustre l’affiche du festival, et c’est un plaisir de la voir fleurir un peu partout, tellement l’image est jolie. Outre l’hommage à Monet et ses chers reflets, à ses couleurs, il y a comme une musicalité dans le tremblé, l’impression de courant, en contraste avec la zone calme au milieu de l’image.

Les pinceaux de Monet

Monet peignant sans son atelierC’est un bruit recueilli par Benoît Cottereau, auteur des « Coquelicots de la Libération ».
Dans ce livre consacré aux combats pour la Libération de Giverny en août 1944, l’historien rapporte une rumeur à laquelle il semble ajouter une certaine foi : Blanche Hoschedé-Monet, la belle-fille de Claude Monet, « aurait fait cadeau de quelques pinceaux du Maître aux officiers anglais libérateurs de Giverny.« 
Même si les preuves manquent, je ne suis pas loin de penser que c’est vrai. C’est tellement dans la manière de Blanche.
En 1944, Blanche habite toujours la maison de Monet, décédé depuis 1926. Elle est la gardienne de sa mémoire, entretenant comme elle le peut la vaste propriété, qui a réussi à éviter l’occupation par les troupes allemandes.
Mais les biens sur lesquels Blanche veille ne lui appartiennent pas. Maison, collections et fond d’atelier sont la propriété de Michel, l’unique fils survivant de Monet.
Il semble attesté que des officiers britanniques ont logé dans la demeure après la Libération. Alors voici le beau geste de reconnaissance de la fille spirituelle de Monet. Portée par la joie de la Libération, elle donne des pinceaux, objets suprêmement symboliques mais qui n’entament pas l’héritage de Michel.

Les cadrages de la ville

A Vernon, le donjon du chateau se reflète dans les vitres du centre culturelQuelquefois la ville a des cadrages qui nous dépassent. Elle se joue du photographe, avec l’air de dire « regarde comme je suis plus maligne que toi ! Quest-ce que tu dis de ça ? »
A Vernon le haut de l’Espace Philippe Auguste, centre culturel de construction récente, joue un tel tour. Ses vitres réfléchissantes se sont saisies de l’image de l’ancien donjon du château médiéval, à demi masqué par une demeure du 18e. Avec leur quadrillage à la Mondrian, les miroirs d’aujourd’hui dialoguent avec l’ellipse du donjon, les diagonales du toit et des lucarnes. On dirait les traits de construction d’un peintre débutant.
Et quelle harmonie de couleurs ! Comment faites-vous, Madame la ville, pour avoir un ciel aussi bleu, alors que celui de ma pauvre photo est tout blanc ? Je m’incline, vous êtes la plus forte. Vous m’avez bluffée.

Feuillage panaché

Saxifrage Philadelphus Snowflake et pelargonium panaché, fondation Monet, GivernyC’est un coin des jardins de Monet où presque personne ne va : à droite de l’allée des tilleuls, derrière la verrière du salon-atelier, une zone ombragée forme une impasse. La floraison y est pourtant aussi raffinée qu’ailleurs.
Quelle délicatesse dans cette harmonie verte, ce petit tapis de feuilles vertes frangées de blanc ! Un jardinier a pensé que ce serait bien de rappeler ces tons dans la potée de pelargoniums qui prendrait place à côté.
C’est l’un des petits bonheurs que réserve la visite dans les jardins de Monet, à condition de prendre son temps, tranquillement. Si on va trop vite, on sentira l’harmonie d’ensemble, mais on risque de passer à côté des détails.

Peut-être qu’on apprécie mieux la peinture quand on peint soi-même, et peut-être qu’on comprend mieux toutes les subtilités de la composition d’un jardin quand on est expert en jardinage. La maîtrise de l’art apprend à voir. Pour tous les autres qui n’ont pas cette chance, la compréhension soudaine de l’intention qui a présidé à un arrangement donne un instant de joie.
J’aime bien, derrière les fleurs, entrevoir l’être humain qui les a pensées.

Trompe l’oeil

escalier en trompe l'oeil au moulin de Fourges près de Giverny Il faut qu’une porte soit ouverte ou fermée, n’est-ce pas ? Au restaurant du moulin de Fourges, près de Giverny, ce trompe l’oeil m’a fait sourire. Cacher en montrant, montrer en cachant l’escalier qui se dissimule derrière cette porte. L’escalier oui, les courants d’air non !

Qu’est-ce d’autre que la peinture, sinon un trompe l’oeil ? On fixe un support recouvert de couleurs et on croit voir quelque chose qui n’est pas là. Ceci n’est pas une pipe, ironisait Magritte.

Un jardin grandeur nature

papillon dans le jardin de Monet à GivernyL’image ne rend que partiellement compte du côté paradisiaque du jardin de Monet à Giverny.
Par une chaude journée d’été, les fleurs exhalent tous leurs parfums. Hmmm ! Leur fragrance invite à de grandes inspirations extatiques…
Les humains ne sont d’ailleurs pas les seuls à qui les senteurs fleuries font tourner la tête. Des dizaines de petits papillons voltigent autour des buissons de phlox et dans les allées bordées de lavande.
De gros bourdons patauds prennent leur envol, les poils des pattes jaunis de pollen. Du côté de l’étang, les libellules zigzaguent au ras de l’eau. Sous la surface, on devine le glissement des carpes.
Les grands arbres qui entourent le bassin aux nymphéas sont le royaume des oiseaux, qui se manifestent en un concert désordonné et joyeux.
Le vent balance les branches des saules, fait frémir les feuilles des peupliers. Va-t-il pleuvoir ? L’averse tambourinera sur les plantes et dans les allées, les gouttes picoteront la surface de l’étang, la pluie ruissellera dans toutes les rigoles.
On a dit du jardin de Monet que c’était « un tableau à même la nature ». C’est vrai, Monet l’a composé avec des couleurs et des perspectives comme un tableau. Depuis, la terre, l’eau, le soleil, les plantes en font un coin de nature, qui se moque pas mal d’être un tableau.

Coin à pique-nique

Coin à pique-nique au bord de la Seine à VernonLa visite de Giverny ou de Vernon vous a ouvert l’appétit. C’est le moment de déballer votre sympathique casse-croûte, dès que vous aurez trouvé un coin à pique-nique.
Dans ce domaine, le niveau d’exigence de chacun est extrêmement variable. Certains se trouvent très bien assis sur une bordure de trottoir près de leur voiture dans un parking. D’autres prétendent chercher l’endroit idéal, et mettent un temps infini à se décider.
Si vous êtes plutôt du genre pragmatique, que vous aimez manger en plein air, mais assis à table, voici un des endroits idylliques que la ville de Vernon a aménagés au bord de la Seine. D’accord, ce n’est pas le calme de la campagne. Vous êtes dans un espace vert à quelques pas de la nationale 15, en ville, tout près du pont qui franchit la Seine en direction de Giverny. Mais quelle vue ! Entre deux bouchées, vous flottez au fil de l’eau, dans les reflets chers à Monet. Il y a un bon siècle, dans son bateau atelier, le maître de l’impressionnisme peignait le vieux moulin en face de vous.
Vous trouverez des aires de pique-nique de chaque côté du pont. Ma préférée est celle à côté du vieux moulin, avec le château des Tourelles à l’arrière plan. Le site est tellement joli qu’il est classé.
Par beau temps, les places sont très convoitées. Si vous ne trouvez pas votre bonheur au bord de la Seine, vous pouvez également aller pique-niquer en forêt de Bizy, en haut de la colline qui surplombe Vernon. Dans un autre genre, c’est tout aussi charmant.

Le temps de la moisson

champ moissonné près d'EvreuxAprès la moisson, ce champ fauché court ressemble à une carte géodésique, avec le dessin des courbes de niveau. La parcelle doit sa forme un peu biscornue à une zone plus humide à gauche, au fond du vallon, qui est cultivée en prairie.
Les lignes disent l’expérience issue de siècles de culture, le temps lointain du défrichage, qui a laissé de côté le petit bois du fond, au sol sans doute moins riche.

A quoi pense le conducteur du tracteur tandis que le passage de ses roues dessine les marques blanches qui se verront encore des mois plus tard ? Il connaît sa parcelle par coeur. Il en parcourt la surface machinalement, comme on tond la pelouse ou comme on passe l’aspirateur. On peut refaire des yeux le chemin du tracteur, passage après passage.
C’est long. Le temps s’écoule.

Entre les lignes claires, les bandes dorées des restes de paille. Le blé a germé comme un duvet vert, puis poussé, grandi, changé de couleur au soleil de l’été, jusqu’à être à point pour la récolte. Cette brosse blonde qui coiffe la terre raconte les saisons qui passent.
Un champ après la moisson ? Non, un calendrier, une horloge, une stèle !..

Peinture orientaliste

Exposition L'Afrique du Nord révélée par les musées de province, musée de Vernon, 1er juillet au 29 octobre 2006Tout a commencé avec la campagne de Napoléon en Egypte. Tout à coup, l’Europe s’est piquée d’orientalisme, en art et en littérature.
Au milieu du 19e siècle, la colonisation de l’Algérie a ouvert les portes du Maghreb à une génération d’artistes qui n’avait fait qu’en rêver jusque là. C’est le choc d’une lumière éblouissante et d’une population préservée du modernisme qui fait rage en Europe.
Le musée de Vernon fait redécouvrir le courant orientaliste à travers une exposition qui se poursuit jusqu’au 29 octobre 2006.
Peintre officiel, boursiers ou artistes partis dans le sillage de Delacroix, ils ont à faire face aux mêmes difficultés : comment rendre les couleurs écrasées de soleil, comment trouver des modèles dans un pays musulman qui rejette la représentation de la figure humaine, comment aborder l’expression d’une culture très différente de celle de la métropole… L’exposition présente les réponses trouvées par les peintres contemporains de Monet à cette problématique.
De Monet, il n’est point question. On aurait aimé pourtant voir évoquée la période algérienne du maître de Giverny. Il est vrai qu’elle est difficile à documenter. Monet lui-même s’est employé à en effacer le souvenir.
Ce qu’on sait : en 1861, il est affecté au 1er régiment de chasseurs d’Afrique. Durée de l’engagement : sept ans ! Monet n’en effectuera que 18 mois, pour cause de typhoïde.
On a de lui un portrait en tenue de chasseur qui se trouve au musée Marmottan, peint par son ami Charles Lhuillier. Mais sa propre production durant son séjour algérien a disparu.
Dans une lettre à Geffroy, Monet parle d’aquarelles et de dessins faits en Algérie en 1862. Ils ne sont plus localisés aujourd’hui.

Les maisons Guignol

le jardin des Arts à VernonAu jardin des Arts à Vernon, les maisons tapies derrière le rempart médiéval semblent vouloir jeter un oeil par-dessus le mur. Y aurait-il quelque chose à voir ? On entend des voix d’enfants. Oh ! regarde ! un jardin ! Ca commère ferme entre les vénérables bâtisses.
Côté jardin, on n’est pas en reste. Assis sur la pelouse, les ifs taillés en cône chuchotent. Tu crois que ça va bientôt commencer ? Chut ! Tais-toi ! Elle t’a regardé !
On se croirait à Guignol.

Château d’eau

château d'eau décoré d'une fresque à Caillouet Orgeville près d'EvreuxLes petites routes de campagne réservent parfois de jolies surprises. A Caillouet Orgeville, près d’Evreux, ce château d’eau sans doute assez disgracieux par le passé est devenu une oeuvre d’art.
Le sujet rend hommage à la vocation agricole du village. C’est un paysan qui avance droit vers nous, tout en jetant de pleines poignées de grains dans les sillons. Devant lui, assis dans l’herbe, un lapin le regarde approcher. L’artiste a soigneusement choisi ses couleurs pour que le bleu se fonde dans le bleu du ciel et que le vert se mêle au vert du champ.
J’imagine que ce n’est pas facile de peindre un château d’eau. Il doit falloir tout un matériel de nacelle adapté. Mais quelle astuce de transformer cette tour de béton en atout de charme pour le village ! Si toutes les communes s’y mettaient, quel circuit à travers les champs cela ferait !
Les châteaux d’eau méritent de tels égards. Ce sont les phares de nos campagnes. L’eau n’est-elle pas aussi précieuse que la lumière ?

Le banc idéal

Banc dans les jardins de Monet à GivernyEn toute modestie, voici le banc idéal. Ce n’est pas une profession de foi, c’est la marque.
Ce banc meuble avec élégance les jardins de Claude Monet à Giverny.
Il déploie son assise autour d’une structure métallique aux lignes Art Nouveau qui vous a un petit côté bouche de métro.
Ce banc a été fabriqué en Alsace. Il a l’air d’une solidité qui défie le temps.
Comme tout le mobilier de jardin de la Fondation Monet, il est repeint régulièrement en vert, le même vert que le pont japonais et les fenêtres de la maison.

Cher lecteur, ces textes et ces photos ne sont pas libres de droits.
Merci de respecter mon travail en ne les copiant pas sans mon accord.
Ariane.

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