Frêne et sumac

Frêne et sumac, GivernyMonet aimait faire se rencontrer dans son jardin des plantes aux affinités de couleur ou de forme. Ces feuillages, par exemple, dans le jardin d’eau. A première vue on dirait le même arbre. Même vert, mêmes feuilles composées. Mais à part cette coïncidence ces deux-là n’ont pas grand chose en commun.
Permettez-moi de faire les présentations. En haut voici le frêne, un arbre majestueux de nos régions. En bas, le sumac de Virginie, originaire d’Amérique du Nord, de taille plus modeste.
Qui a copié sur l’autre ? Qui s’est dit le premier tiens, je pourrais installer des mini-feuilles le long d’une tige comme des chambres le long d’un couloir, ce sera plus commode pour la distribution de sève ?
Peut-être qu’ils ont eu la même idée en toute indépendance, sans imaginer que cela existait déjà ailleurs sur la planète. Peut-être que les mêmes problèmes n’ont qu’un nombre limité de façons d’être résolus, que les mêmes besoins conduisent à un nombre restreint de réponses.
L’histoire humaine est pleine de ces coïncidences. A propos de l’invention de l’aviation, par exemple. Pour les Français, le papa du vol d’un plus lourd que l’air s’appelle Clément Ader. Pour les Américains, pas d’hésitation, ce sont les frères Wright qui ont inventé l’avion.

Cosmos

Fleur de CosmosEn toute simplicité, cette fleur s’appelle Cosmos.
Quand on porte un nom aussi démesuré, tout l’art consiste à garder des dehors modestes.
Aussi le cosmos s’applique-t-il à ne pas en faire trop. Ses pétales ne la ramènent pas, ni par l’ampleur ni par le volume, un petit plissé tout simple, pas de froufrous superflus. La tige est toute fine comme un trait de crayon, le feuillage, une brume légère qui ne fait d’ombre à personne.
Côté couleur le cosmos a une préférence pour les roses vifs ou le blanc frais, les deux se mêlant parfois à la façon d’une aquarelle.
Surtout le cosmos a oublié d’être capricieux, et sa culture enfantine le fait aimer des jardiniers débutants qui découvrent avec lui le bonheur de se créer un univers.

Potager fermé

potager de la Roche-Guyon Les dahlias fleurissent pour personne dans le potager-verger du château de la Roche-Guyon. Quatre années seulement après son ouverture en 2004, le jardin est déjà fermé.
Malgré les deux pages d’explications affichées sur les grilles, les raisons qui ont présidé à cette fermeture du potager ne sont pas vraiment claires. Peut-être son entretien était-il tout simplement trop cher pour le conseil général du Val d’Oise, propriétaire du château.
Ce qui est bien expliqué, en revanche, c’est le virage écologique et social que va prendre le jardin. On avait voulu recréer ici le potager-verger du château tel qu’il se présentait au 18e siècle, mais impossible de lui fournir les trente jardiniers qui s’y activaient à l’époque. On aura désormais un potager soucieux de préservation de l’environnement d’où la chimie polluante sera proscrite, et dont la production devra trouver des débouchés sur les marchés locaux, auprès des associations caritatives et d’insertion.
Selon Gilles Clément, qui mène ce projet, on sera de la sorte beaucoup plus près des intentions qui ont présidé à la création du jardin au 18e siècle. Il s’agissait de se nourrir avec des produits locaux, cultivés de façon naturelle. On expérimentait aussi dans les jardins de châteaux, on testait de nouvelles espèces, des méthodes de cultures innovantes, pour le bien-être de l’humanité. Le nouveau potager, qui ouvrira peut-être en 2009, misera lui aussi sur la biodiversité.

Mer de fleurs

GivernyC’est peut-être le meilleur moment de l’année pour visiter les jardins de Monet à Giverny, plus éblouissants que jamais : tout est en fleur, les Nymphéas bien sûr, les capucines dans la grande allée, les rosiers remontants, les annuelles d’été éclatantes de couleurs.
Mais curieusement chaque année l’affluence marque le pas au début août.
On trouvera plus facilement un banc libre pour s’asseoir à l’ombre au milieu d’une mer de fleurs.

Par la barbichette

Gargouille, EvreuxS’il te plaît, dessine-moi un monstre…
Pas si facile d’inventer un truc vraiment effrayant.
Les sculpteurs du Moyen-Âge qui devaient imaginer des gargouilles ont dû se creuser la tête pour composer des bêtes horribles.
Ils ont souvent dérivé l’idée du gros chien, comme ici à Evreux au-dessus du cloître de la cathédrale.
C’est une expérience que chacun a faite de se trouver face à un gros chien aboyeur et furieux, il y a de quoi ne pas en mener large.
Celui-ci, en plus de ses oreilles couchées, de ses dents menaçantes et de ses narines dilatées, a été affublé d’une barbiche supposée le rendre plus hideux encore.
Ils lui donneraient plutôt un petit air comique, ses trois poils au menton.

Foulon

cuve à foulon, EvreuxL’endroit où l’on peut admirer cette cuve de pierre aurait tendance à induire tout le monde en erreur : nous sommes ici dans le cloître situé derrière la cathédrale d’Evreux.
On a vite fait d’en déduire que cette cuve servait à pratiquer des baptêmes, au cours d’un rite hypothétique où l’on se serait immergé de la tête aux pieds dans une petite piscine.
Que nenni.
Point du tout.
Aux dernières nouvelles il s’agit d’une cuve à foulon qui remonterait rien moins qu’aux gallo-romains. On pardonnera au vénérable objet vieux de mille huit cents ans d’être fendu et rafistolé au fil de fer.
A quoi servait une cuve à foulon ? A fouler, cela va de soi, c’est-à-dire écraser du pied les draps de laine de manière à les feutrer. Le feutrage a pour effet de faire s’accrocher entre eux les petits brins de la laine, le tissu devient plus épais, résistant et offre une meilleure protection contre les intempéries.
Cela devait être long, fastidieux et fatigant de fouler la laine, aussi l’ingéniosité humaine a-t-elle par la suite conduit à l’utilisation d’une autre force motrice. A Evreux, on a installé des moulins sur les bords de l’Iton.
La cuve à foulon s’est trouvée sans emploi, sauf à servir de baignoire aux petits oiseaux.
Hors de portée de leurs jets d’eau, elle nargue les gargouilles, des jeunettes qui n’ont que cinq siècles au compteur.

L’union des sports

L'union des sports, café restaurant à VernonAu temps lointain où cette enseigne correspondait à l’établissement qu’elle domine, le propriétaire avait trouvé judicieux, pour attirer une vaste clientèle, de nommer son café restaurant « A l’union des sports ».
Cela sonne comme une dédicace, mais c’était plutôt un appel du pied aux joyeux sportifs pour qu’ils viennent célébrer ici les victoires, se consoler des défaites, refaire le monde et l’arbitrage autour d’un canon et organiser leur banquet de fin d’année.
On n’était pas sectaire, des footeux aux joueurs de boules, tout le monde était le bienvenu, tous réunis dans la même communion d’après l’effort.

Le local a changé moultes fois d’affectation, sans doute, et l’Union des Sports s’est évanouie comme un idéal qui disparaît.

A une semaine de l’ouverture des Jeux Olympiques, la polémique pékinoise bat son plein. Les Jeux, c’est pourtant l’occasion de célébrer l’union des sports, ce qui n’arrive pas si souvent.

Enseigne ancienne rue Carnot à Vernon

Après la pluie

reflet de la tonnelle de Claude Monet à GivernyIl faut les grosses chaleurs de l’été pour se souvenir comme c’est bon, la pluie, les gouttes fraîches qui vous criblent les bras nus et traversent les vêtements légers jusqu’à la peau, les filets d’eau qui ruissellent le long du visage ou des cheveux et vous chatouillent le creux du cou…
Le thermomètre affichait un bon 33° cet après-midi, un score inhabituel pour Vernon transformée en ville morte.
Et puis toute cette humidité puisée dans l’océan a fini par se déverser sur la Normandie, sur les vaches qui broutent imperturbables, sur les chemins poussiéreux et les humains alanguis.
Ouf ! On respire à nouveau, tandis que s’exhalent dans l’air du soir des parfums de terre et de foin.
Derrière les nuages qui se déchirent le ciel bleu refait son apparition.
Ce soir les flaques ouvrent des coins d’azur sous les pieds, où viennent se mirer les roses des tonnelles.

Trouville, hôtel des Roches Noires

Trouville, hôtel des Roches NoiresQuel est ce ressort qui nous fait éprouver une jubilation étonnante à découvrir le motif du peintre, le paysage qui a servi de modèle à un tableau célèbre ?
J’étais toute heureuse, à Trouville, de voir de mes yeux et en vrai l’hôtel des Roches Noires, un établissement de standing aujourd’hui divisé en appartements qui donne directement sur la plage de sable blond.
Et un peu frustrée de n’avoir pas sous la main une reproduction de la toile que Claude Monet en a fait en 1870 pour comparer, chercher l’emplacement exact où il a planté son chevalet et voir ce qui est resté semblable et ce qui a changé depuis 138 ans.
La façade de pierre dorée est toujours la même, mêmes volets blancs, même ligne brisée des balcons, même toit d’ardoise gris bleu.
La tour se devine dans le fond, mais les réverbères ont disparu tout comme les drapeaux, tandis que des bancs tournés vers le large ont fait leur apparition.
Hôtel des Roches Noires, Trouville, par Claude Monet, 1870, Musée d'Orsay Paris Le lion de pierre qui monte la garde était-il déjà là à l’époque de Monet ?
Combien de temps a-t-il fallu pour que son pelage se creuse et s’érode sous les colères de la mer ?

Je ne sais pas ce que l’on cherche sur les lieux de la création, ce qui fait venir tant de gens de si loin pour admirer le bassin aux Nymphéas à Giverny.
Peut-être l’identification au ressenti du peintre face au motif ?
Mais il y avait dans ce que j’éprouvais à Trouville quelque chose de la joie de revoir un ami après de longs mois, avec ce décalage entre l’image que nous avons gardé de lui et sa présence effective, quand nous recherchons sous sa nouvelle coiffure et son visage un peu changé les traits que nous avons conservé en mémoire.

Arrosage

Arrosage à GivernyEn langage de jardinier, forte chaleur signifie arrosage, car beaucoup de fleurs sont fragiles et se dessèchent en cas de canicule.
Dans les jardins de Giverny, tôt le matin, les rampes d’arrosage sont installées.
Elles projettent dans l’air de fines gouttelettes qui capturent la lumière.
A travers le rideau de bruine les rayons du soleil se matérialisent en éventail, les ombres s’allongent en oblique.
Il naît partout, à volonté, de minuscules arcs-en-ciel, souvenirs de la palette de Claude Monet.

Point du jour

VernonVernon possède une rue nommée rue du point du jour, elle est curieusement située à l’ouest du centre ville.
Certaines appellations demeurent mystérieuses, peut-être qu’un jour je découvrirai l’origine de ce nom poétique, dans un grand éclat de soleil qui viendra frapper la plaque de rue…
Pour l’instant, bien que ce soit une voie large et baignée de lumière, la rue du point du jour garde pour moi quelque chose d’obscur, comme si s’attachait à son nom une part des ombres de la nuit.

Quel joli moment, quand la ville sort de ses rêves nocturnes et que les façades émergent doucement du néant qui les enveloppait !
Le silence baigne les ruelles, pas une mouche ne bourdonne, pas un oiseau ne lui vole après.
Les passants ne passent pas encore.
La vie se tait derrière les volets clos.
Le soleil va réveiller l’orchestre de la cité en brandissant mille baguettes.
Il flotte dans l’air une odeur de croissants chauds.

Porte-fenêtre

porte-fenêtre, maison de Monet à GivernyMonet qui a tant peint les reflets n’a jamais pris pour motif ceux qui se dessinaient dans sa porte.
Tout son jardin vient buter contre la vitre de la porte-fenêtre de la cuisine, prêt à se précipiter à l’intérieur si quelqu’un venait à l’ouvrir.
Les couleurs de l’été claquent dans le soleil, le rouge des pélargoniums, le vert des peintures plus lumineux que jamais.
En comparaison tout paraît sombre à l’intérieur.
Comme dans un miroir le reflet masque ce qui se trouve derrière la vitre.
Impossible de deviner le fourneau, de distinguer les rangées de cuivres qui luisent dans la cuisine.
Il suffirait de tourner la poignée de porcelaine blanche et d’entrer pour s’apercevoir que la pièce n’est pas si obscure.
C’est l’ambiguïté de la porte-fenêtre, cette frêle barrière entre le dedans et le dehors capable de s’effacer avec civilité pour vous laisser passer.

Effet de soleil

Feuilles à contre-jour
Pas un jardinier sans doute n’a été plus attentif aux effets de lumière sur ses plates-bandes que Claude Monet.
Le peintre de Giverny étudiait avec minutie le rendu du soleil matinal ou vespéral à travers les plantes. Il jouait des textures translucides ou au contraire opaques et veloutées pour obtenir dans son jardin ce scintillement, cette vibration colorée caractéristique des tableaux impressionnistes.
De nombreuses fleurs se prêtent bien à ce jeu avec le soleil rasant, par exemple les pavots, les lavatères, les mauves, les roses trémières.
Le contre-jour magnifie leur éclat à la façon d’un vitrail.
Plus graphique, les rayons qui traversent les longues feuilles lancéolées des iris, des glaïeuls ou des crocosmias font ressortir leurs nervures parallèles et projettent sur cet écran des ombres chinoises aussi indéchiffrables que des idéogrammes.

Volubilis

ipomée Que nous cultivions les volubilis ou ipomées, voilà encore une de ces bizarreries de chez nous qui étonnent les visiteurs venus de l’autre côté de la terre.
Tout comme les agapanthes qui poussent comme du chiendent en Australie, les volubilis sont considérés comme des pestes aux antipodes.
De jolies mauvaises herbes, comme peut l’être notre liseron, mais qu’on ne se risquerait pas à inviter chez soi de crainte de ne plus jamais s’en débarrasser.
Les jardiniers de Giverny n’ont pas ce genre d’inquiétudes. Ils savent qu’ils ne courent aucun danger d’être envahis par les ipomées.
Nous avons pour contrer la volubilité des volubilis une arme fatale : l’hiver. La belle grimpante ne résiste pas à nos gelées.
Il faut la replanter tous les ans à la belle saison, moyennant quoi elle ne tarde pas à partir à l’assaut de tous les supports qu’on veut bien lui fournir, et se garnit bientôt de corolles bleu nuit au centre desquelles rayonne un coeur tout blanc comme une lune.
Celles-ci ornent la pergola aux glycines du Musée d’Art Américain de Giverny, on peut aussi en voir chez Monet accrochées aux supports des clématites.

Château d’Anet

chateau d'AnetIl n’y a pas que dans le val de Loire que l’on trouve des châteaux Renaissance ! A Anet, à une quarantaine de kilomètres de Giverny, on peut en visiter un qui a été construit au bord de l’Eure pour les beaux yeux de Diane de Poitiers, favorite du roi Henri II.
La demeure a le charme des châteaux habités par leurs propriétaires, patiemment meublée et décorée dans le style du 16e siècle. On y perçoit tout le faste et le raffinement de la Renaissance.
Les décorateurs ont décliné ici les symboles liés à Diane, déesse de la chasse. Un exemple ? Le portail d’entrée est orné d’une pendule. A l’époque où Diane de Poitiers était la maîtresse des lieux et du roi, les statues qui surmontent la pendule étaient des automates. Le cerf frappait du sabot pour marquer les heures tandis que les chiens aboyaient.

Roses trémières

roses trémières à VernonLa simplicité rustique des roses trémières fait bon ménage avec les maisons à colombages de la rue Potard à Vernon.
Cette rue médiévale, une des plus anciennes de la ville, vient d’être refaite et rendue piétonne. Des espaces ont été aménagés dans le revêtement pour laisser aux roses trémières la place de pousser.
Alignées en gros bouquets devant les maisons, les longues tiges couvertes de corolles de couleur vive ont toujours un effet spectaculaire. Elles ajoutent encore au charme de cette rue qui a gardé tout son caractère.

Tête de pavot

Pavot Quand le pavot est défleuri il reste très décoratif avec sa grosse tête ronde et sa petite couronne en forme de calebasse. Celui-ci revient de la corvée d’eau au marigot, il transpire à grosse goutte…
Plus tard en saison les têtes de pavots changent encore. Elles sèchent, perdent leur couleur verte pour devenir blondes. De petites ouvertures laissent échapper de minuscules graines, à la façon d’une salière. Ce sont ces petites graines grises qui sont utilisées en boulangerie pour fabriquer les pains spéciaux.

Pavot

Pavot Une petite tête aux cheveux bien peignés émerge d’un col façon fraise de François Premier, au milieu d’une envolée froufroutante : le pavot a un style à déconcerter les couturiers.
Une fois qu’il s’est extrait de son bouton, il étale sa grande corolle au soleil, bien droite ou un peu penchée en parabole de télé. Avec qui veut-il communiquer ? Ses fans sans doute, nombreux, fascinés par ses multiples toilettes crêpées. Le pavot aime le rouge vermillon bien claquant, ou alors le rose maculé de violet, mais parmi les plus petits il en existe aussi des blancs, des jaunes ou des bleu ciel du plus bel effet.
A Giverny Monet en cultivait déjà, et comme à son époque on peut apercevoir dans les massifs des Papaver orientalis mêlés à leurs cousins, des coquelicots indigènes arrivés là plus ou moins par hasard.

Repiquage

Repiquage à GivernyLe jardinier a tombé la veste, il fait vite chaud dans le clos normand du jardin de Monet à Giverny, exposé plein sud. Il est occupé à repiquer des centaines de fleurs pour regarnir les massifs.
Les huit jardiniers de la Fondation Claude Monet ne chôment pas. Tout au long de la saison on peut les voir travailler dans le jardin du peintre.
Une de leurs tâches les plus importantes est de faire évoluer les plates-bandes. Dès que la période de floraison de certaines fleurs annuelles est passée, ils les arrachent et ils les remplacent par de jeunes plants sur le point de fleurir, tout juste sortis de la serre.
Grâce à ce travail colossal le spectacle est permanent tout au long de la saison, sans être jamais le même puisque la composition des parterres change avec le temps.

Cloître gothique

Cloître gothique à EvreuxCe magnifique cloître gothique était autrefois réservé à l’usage de l’évêque d’Evreux pour lui permettre de se rendre de son palais épiscopal à la sacristie de la cathédrale voisine.
Aujourd’hui l’évêque a déménagé, l’évêché est devenu un musée, et tout le monde peut se promener librement dans le cloître les jours d’ouverture du musée.
Le cloître n’est pas complet, il ne dessine que deux côtés d’un carré. La construction de cette galerie date de la fin du 16e siècle. Malgré cette édification tardive, elle est bâtie en un style gothique flamboyant au dessin harmonieux.
Le matériau utilisé est la pierre de Vernon, que l’on reconnaît facilement aux rognons de silex laissés intacts par les tailleurs de pierre au milieu du calcaire parfaitement appareillé.

Libellule

libellule Le corps fuselé comme une flûte traversière, et des couleurs de pierres précieuses sous des ailes de fée Clochette : les libellules sont les plus gracieuses des habitantes du jardin d’eau de Claude Monet à Giverny.
Les plus courantes ne sont pas plus longues que le petit doigt, transparentes, aussi légères que le vent. Turquoise un peu fluo, rouge grenat, bleu outremer, on dirait qu’elles sont allées se servir dans la palette de Monet avant de venir tourbillonner au-dessus de ses Nymphéas.
Certains jours on en voit passer des maousses toutes vrombissantes, style mon papa est un hélicoptère. Difficile de ne pas les remarquer, mais pas très envie qu’elles s’approchent trop près.
Rien n’est plus insaisissable qu’une libellule. Elles ne tiennent pas en place, tout leur être est vol, mouvement.
J’avais quasiment renoncé à arriver jamais à en photographier une quand ce matin celle-ci a bien voulu poser longuement sur sa feuille d’iris.
Les photos valent par ce qu’elles montrent mais aussi par ce qu’elles nous rappellent, les images, les sensations qu’elles font revenir à la mémoire. Derrière la libellule je vois mes visiteurs de ce matin, au moment où j’ai pris la photo, un jeune couple en compagnie de deux enfants de 4 et 6 ans.
Une visite guidée avec des petits, il y a de quoi hésiter. Mais les parents, passionnés par Monet, ont tenté le coup.
Comme d’habitude je me suis régalée à donner la main, à porter pour faire voir des trucs. Entre deux explications pour adultes (pendant lesquelles les enfants alignaient avec concentration des gravillons sur un mouchoir en papier), on a regardé les poules, cherché les dindons, les poissons, décrit les couleurs des fleurs, appris à reconnaître le vrai bambou du faux, joué aux devinettes, raconté l’histoire du chat en porcelaine, senti les phlox, les lavandes, compté les abeilles et les casseroles en cuivre, admiré la marqueterie du bureau de Monet, on est descendu dans un tunnel et passé sur des ponts… et on a vu des libellules.
A la fin de la visite je serrais la main des parents pour prendre congé quand la petite de six ans m’a enlacé les jambes, un geste tendre et spontané qui m’a fait fondre. Vous en connaissez d’autres, des métiers où ce genre de choses risque de vous arriver, un câlin enfantin impromptu alors qu’on se connaît depuis deux heures ?
Cette petite fille, c’est elle, ma libellule du jour, ma petite fée Clochette.

Poignée de porte

poignée de porte en corneComment faisait-on avant le pétrole et le plastique ? Ils ont tellement envahi notre quotidien qu’il est devenu difficile à croire que l’on ait pu s’en passer. Et pourtant il existait naguère des solutions alternatives pour tous les objets.
En Normandie, terre d’élevage, on utilisait volontiers la corne à toutes sortes d’usages. Les portes-fenêtres de la maison de Monet à Giverny sont équipées de poignées de portes anciennes en corne tournée, vraisemblablement d’origine.
Le temps et les intempéries y ont creusé de fines gerçures. Elles rappellent les mains âgées qui s’y sont posées, il y a bien longtemps.

La couleur de la barque

Barque, GivernyL’essor de la photo numérique a pour corollaire une inflation d’images dans nos ordinateurs. Si l’on veut faire quelque chose de ses photos, une sélection s’impose. Mais comment choisir, en fonction de quels critères ?
Selon l’humeur, la sélectivité est plus ou moins grande. Bien sûr, il y a les photos qui provoquent un Waou ! quand on les découvre. Pour celles-ci, même pas la peine de se poser de question ; on sait sans hésiter que ce sont de bons clichés. De même qu’on n’a souvent aucun doute, hélas ! sur la médiocrité de certaines vues.
Et puis il y a les photos pas trop mal. On la garde ou pas ?
Cela dépend de ce qu’elle inspire. Comme les êtres humains, les photos sont plus ou moins belles et racontent des histoires plus ou moins intéressantes.
Et comme les être humains, elles peuvent avoir des défauts qui les rendent attachantes.
J’avais d’abord éliminé celle-ci. Elle a quelque chose qui me dérange parce que je sais que la barque de Monet est d’un vert vif et non presque noire, et que le saule devrait être plus vert lui aussi.
Et puis, prise de remords, je l’ai exhumée de la poubelle. Elle a quelque chose qui me retient, le contraste du chaud et du froid, du lisse et du brouillé, du rectiligne et de l’arrondi, et ce reflet qui fait comme un livre ouvert…
Et je repense à la leçon de Monet qui disait qu’il fallait peindre exactement ce que l’on perçoit en oubliant ce que l’on sait des objets.
C’est ainsi que chez lui les ombres sont violettes, et que la neige est rose, jaune, grise… mais jamais blanche. Il n’aurait pas cherché à peindre une barque verte.

Christian Avril

peintre à Giverny Il s’appelle Christian Avril, c’est son vrai nom. Comme les hirondelles, chaque printemps ramène monsieur Avril à Giverny.
Depuis quinze ans qu’il plante son chevalet près de la Fondation Claude Monet, il a fini par faire partie du décor, le seul peintre de Giverny à exercer ses talents dans la rue, sous le regard des passants.
Christian Avril peint comme il respire, avec naturel. Tout autour de lui sont accrochées ses toiles, surtout des petits formats, et l’on y reconnaît avec amusement chaque détail de la rue, les roses trémières devant le portail d’en face, le panneau indicateur, la boîte aux lettres jaune au milieu des roses, jusqu’aux touristes qui flânent.
C’est comme un jeu, l’oeil regarde la toile et cherche aussitôt le motif aux alentours, puis revient à la toile. La rue Claude Monet qui pouvait paraître banale devient poétique quand elle est transfigurée par la peinture.
Rue Claude Monet, Christian AvrilC’est une chose précieuse d’avoir un peintre pour animer la rue du village. On ne se lasse pas de regarder comment un tableautin se fait, touche après touche. Pour les enfants, pour tous ceux qui ne savent pas peindre, la naissance de l’image a quelque chose de magique.
Les instituteurs nomment le chevalet, la palette. Les étrangers se prennent en photo à côté du peintre et de son petit chien.
Après avoir admiré toutes les fleurs du jardin de Monet, vu au musée d’art américain des oeuvres d’artistes qui ne sont plus, poussé la porte de galeries aux toiles abouties, dont le format et le prix peuvent sembler intimidants, cela fait plaisir d’assister en direct à la naissance d’une oeuvre qui tiendra facilement dans les bagages, dont l’achat ne mettra pas en péril le budget des vacances, et qui fera un bien joli souvenir de Giverny.

Erythrine

erythrine crista galliSi vous deviez trouver un nom à cette plante, comment la nommeriez-vous ? Ceux qui se sont posé la question avant nous l’ont baptisée Erythrine crista galli, nom botanique où Erythrine dérive du mot grec qui veut dire rouge, et crista galli signifie crête de coq.
Rouge c’est rouge ! La plante porte aussi le joli nom d’arbre corail. D’autres comparent ses fleurs à des… pinces de homard. Bien vu !
L’Erythrine est originaire d’Amérique du Sud où elle est capable de faire de grands arbres de six à dix mètres de haut.
Chez nous la belle est plus modeste. Gilbert Vahé, le chef-jardinier de la Fondation Monet, la cultive en pot et la garde à l’ombre. Je présume qu’elle ira faire un tour en serre cet hiver, même si elle supporte un peu de gel.
L’Erythrine a un côté inattendu et spectaculaire qui attire sur elle tous les regards. Les visiteurs s’aprochent, se penchent pour déchiffrer l’étiquette… et repartent en faisant la grimace. Erythrine crista galli rouge écarlate ! Dur à lire et encore plus à retenir ! On pourrait pas faire plus simple comme petit nom ?

Cher lecteur, ces textes et ces photos ne sont pas libres de droits.
Merci de respecter mon travail en ne les copiant pas sans mon accord.
Ariane.

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